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Greenpeace : « Les billets d’avion ne sont pas assez chers »

Depuis 2019, les billets d’avion ont subi une forte inflation. Pour autant, ils ne sont toujours pas à leur juste prix, estime Alexis Chailloux, dans une interview à L’Echo touristique. Ce responsable voyages bas carbone de Greenpeace regrette aussi que l’Etat français n’avance pas plus vite sur le train.

Selon une étude de Greenpeace, le train est 2,6 fois plus cher que l’avion sur les liaisons européennes, au départ de la France. Comment l’expliquer ? Faut-il stabiliser les prix des billets de train ?

Alexis Chailloux : Le train est trop cher sur certaines connexions, à certains moments. Mais il ne peut pas être compétitif, puisque l’avion est anormalement peu cher sur plusieurs liaisons européennes que nous avons étudiées. Nous l’expliquons notamment par une fiscalité avantageuse : l’avion n’est pas soumis à une taxe sur le kérosène ni, sur les billets internationaux, à la TVA. Nous l’expliquons aussi par la prépondérance des compagnies low cost, qui proposent des billets à 30 euros en pratiquant du dumping social et fiscal. Donc, le prix de l’avion n’est pas assez cher, compte tenu de son impact climatique, et de ces exemptions fiscales anachroniques. Il faut le dire clairement, même si ce n’est pas une idée populaire.

Mais l’aérien paie d’autres taxes. Et toute taxe nouvelle décidée au niveau de la France pénaliserait le pavillon français par rapport aux compagnies étrangères…

Alexis Chailloux : C’est un argument qui n’est pas entendable d’après nous. La taxe sur le kérosène ou la question de la TVA peuvent être discutées au niveau européen. Dès maintenant, nous pourrions aussi évoquer une TVA de 20% sur les vols intérieurs en France, laquelle est aujourd’hui réduite à 10% (une TVA de 10% s’applique aussi au train, NDLR). Certains pays l’ont déjà mise en place. Par ailleurs, une autre mesure efficace consisterait à relever l’écocontribution au décollage. En France, cette écocontribution s’élève à seulement 2,6 euros par billet sur les vols en Europe. Elle pourrait passer à 30 euros sur les vols en Europe décollant du territoire français. Selon une étude de Transport & Environment, la France s’est privée de 5 milliards d’euros de recettes fiscales en 2022 à cause des très faibles niveaux de taxation du secteur aérien.

Taxer l’aérien, n’est-ce pas brider les compagnies aériennes dans leurs efforts bien réels de décarbonation ?

Alexis Chailloux : Cela permettrait de dégager des fonds pouvant en grande partie être affectés à des transports déjà décarbonés. Et poursuivre, dans une moindre mesure, la R&D dans l’aviation moins carbonée. L’avion vert ou bas carbone, il faudra 10 ou 15 ans pour en connaître les premiers prototypes. Donc, d’ici là, la seule solution réside dans la réduction du trafic aérien pour atteindre nos objectifs de décarbonation. Il faudrait en diminuer au moins 30% des émissions de CO2 dans les 10 ans à venir. Tous les secteurs doivent se mobiliser.

Sur les trains de nuit, l’Etat doit sortir le chéquier.

Du côté du ferroviaire, quels sont les leviers pour faire baisser les prix ?

Alexis Chailloux : Nous proposons trois mesures. D’abord, un billet climat sur le modèle allemand, soit un pass mensuel relativement abordable pour tous les trains sauf les TGV. Ce projet, que le président Emmanuel Macron a récemment évoqué, est intéressant pour les trajets en France, avec une dimension sociale. L’abonnement permet de relocaliser des vacances, améliorer la lisibilité des prix, et limiter l’usage de la voiture. La deuxième mesure, c’est l’investissement dans le train de nuit, pour concurrencer l’avion. L’Etat doit sortir le chéquier pour commander des rames de train de nuit, il y a une vraie urgence. Le gouvernement communique sur le fait que la France veut ouvrir quelques lignes d’ici 2030. Mais tant qu’il n’aura pas commandé du matériel roulant, ce ne sera pas possible. Si nous en commandions aujourd’hui, il serait livré en 2028 au plus tôt…

Combien de rames faudrait-il commander ?

Alexis Chailloux : Un rapport de 2021, commandé par le ministère des Transports, recommandait l’achat de 600 nouvelles voitures-couchettes pour faire preuve d’ambition. Or aujourd’hui, nous sommes à zéro, et l’Etat envisagerait la commande de seulement 150 rames. Il faut pourtant développer des itinéraires comme Paris-Barcelone, Paris-Rome ou Nantes-Genève. La troisième mesure que nous défendons, c’est la diminution des redevances de péage sur les trains longue distance payées par les compagnies ferroviaires.

100Mds d’ici 2040 pour le transport ferroviaire…Pour l’instant, c’est juste une annonce.

La SNCF a dégagé des bénéfices record en 2022. Ne doit-elle pas, justement, faire un effort pour baisser ses prix ou les stabiliser ?

Alexis Chailloux : Ce n’est pas la SNCF que l’on vise. Pour nous, l’Etat doit mettre en place une politique volontariste pour que les opérateurs ferroviaires en général affichent des tarifs en baisse ou stables.

La Première ministre Elisabeth Borne a annoncé un plan de 100 milliards d’euros d’ici 2040 pour le transport ferroviaire. Comment financer, selon vous ?

Alexis Chailloux : Pour l’instant, c’est juste une annonce. Nous attendons des précisions sur ce plan à environ 5 milliards d’euros par an. Le projet reste flou, ce n’est pas voté. Or il faudrait vraiment un choc d’investissement, pour avoir un choc d’offres.

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1 commentaire
  1. Martino dit

    Il est extraordinaire que les gens de « gôche », dont les parents se sont battus pour obtenir des congés payés, veuillent maintenant que ceux-ci soient le privilège des seuls riches !

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