Travel Planner : « Les EdV travaillent sur une doctrine des bonnes pratiques »

La nouvelle délégation « commerce illégal » des EdV est déjà à pied d’œuvre. Frédéric Savoyen (Eluxtravel) et de Jean-Charles Franchomme (CDMV), qui la composent, ont organisé une réunion de travail jeudi 2 mai. Juste avant un conseil d’administration du syndicat, tenu dans l’après-midi. L’occasion d’aborder le sujet ultra-sensible des Travel Planners et autres coachs, versus les agences de voyages. Ceux métiers – que France Inter a comparés dans un récent article – se battent souvent à coup de joutes verbales, mais des signes d’apaisement émergent. En témoigne la récente charte écrite par des Travel Planners, qui s’engagent à travailler de manière loyale et éthique. Pour faire le point, nous avons interviewé ce matin Frédéric Savoyen, lequel croit à la convergence des savoir-faire entre Travel Planners et agences même s’il n’oublie pas de rappeler la ligne rouge à ne pas franchir.

L’Echo touristique : Globalement, les Travel Planners et les agences de voyages peuvent-ils collaborer ensemble, comme nous l’évoquions dans un récent édito ?

Frédéric Savoyen : Personnellement, je pense que oui. Il peut y avoir une complémentarité entre les agents de voyages et les Travel Planners qui ne dépassent pas la ligne rouge.

De quoi parle-t-on ? Des Travel Planners et coachs qui créent des programmes pour leurs clients et leur envoient des liens vers des plateformes comme des bedbanks, des sites de réservation de billets d’avion et d’activités. Ils peuvent devenir des « apporteurs d’affaires » pour les agences – qui les rémunèrent en conséquence – même s’ils n’aiment pas ce terme, ce que je peux comprendre.

La position des EdV, c’est qu’il existe une ligne rouge à ne pas dépasser. (…) Après la doctrine, pourquoi pas un contrat-cadre entre Travel Planners et agents de voyages.

Quelle est la ligne rouge à ne pas dépasser ?

Frédéric Savoyen : Les Travel Planners peuvent aiguiller les voyageurs et facturer leurs conseils (un forfait correspondant au temps de recherche, NDLR). En revanche, s’ils se font rémunérer sur les ventes réalisées, alors qu’ils ne sont pas immatriculés auprès d’Atout France, alors ils sont dans l’illégalité. La position des EdV, c’est qu’il existe une ligne rouge à ne pas dépasser. Suite à ma réunion jeudi matin avec Jean-Charles Franchomme, au sein de la délégation « commerce illégal », nous avons décidé de travailler sur une doctrine des bonnes pratiques. Nous souhaitons ainsi établir ce qui est légal et ce qui ne l’est pas.

Cette doctrine dédiée aux Travel Planners et aux nouveaux entrants sera ensuite validée lors d’un conseil d’administration des EdV, probablement début juillet. Nous pourrions aller plus loin, selon moi, avec pourquoi pas un contrat-cadre entre Travel Planners et agents de voyages. Il faut discuter d’un mode de fonctionnement conjoint. Aujourd’hui, le climat reste tendu – voire délétère – entre les métiers. J’aimerais que les invectives s’arrêtent.

Vous faîtes donc un pas vers Travel Planners et autres coachs ?

Frédéric Savoyen : Nous tendons la main tout en menant, avec Jean-Charles, un vrai combat à l’égard de ceux qui sont dans l’illégalité et jouent sur les mots. S’il y a des rétro-commissions de prestataires de voyage, la ligne rouge est franchie. A cela s’ajoute une législation qui n’est pas des plus lisibles, et pourrait évoluer vers plus de clarté. Mais entendons-nous bien : même s’ils font beaucoup parler, les Travel Planners ne représentent pas un gros business. Leur émergence rappelle un peu celle des chauffeurs VTC face aux taxis qui travaillent désormais ensemble.

Nous avons repéré une vingtaine de Travel Planners qui exercent de manière illégale.

Flavie Marie-Naye et sept autres Travel Planners ont récemment créé une charte éthique. « Nous nous engageons pleinement à respecter le cadre légal fixé par le Code du Tourisme, les spécificités liées à notre profession », explique-t-elle. Un bon présage d’une volonté de respecter de bonnes pratiques ?

Frédéric Savoyen : Cette charte part effectivement d’un très bon sentiment. Ces Travel Planners veulent respecter le Code du tourisme, parlent de respect et d’expertise. Mais en parallèle, nous savons que d’autres font n’importe quoi. Nous avons repéré une vingtaine de Travel Planners qui exercent de manière illégale. Et des deux côtés, il peut également y avoir des positions radicales par manque de dialogue. Autant travailler ensemble plutôt que de laisser un business échapper à nos métiers.

Existe-t-il des modèles inspirants à l’étranger ?

Frédéric Savoyen : Oui, bien sûr. Aux Etats-Unis par exemple, 90% des conseillers sont des Independent Contractors, tous affiliés à des agences de voyages traditionnelles qui gèrent la vente et l’après-vente. Les agences classiques n’ont donc presque plus de salariés, ce qui traduit aussi une évolution plus profonde du marché du travail. L’agent de voyages, au sens américain du terme, est devenu un free-lance dans un marché différent, avec moins de garanties. Au Royaume-Uni, ce modèle se développe avec des opérateurs tel 360 Private Travel qui essaime à l’étranger.