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J.-P. Nadir : « Fairmoove lance un calculateur d’impact carbone et social »

Jean-Pierre Nadir avait lancé un écocomparateur à l’époque du portail d’Easyvoyage. Cette fois, c’est un calculateur avec une dimension sociale qu’il crée, avec la casquette Fairmoove.

Après le B2C, vous investissez le B2B2C avec le rachat d’Auxigène (Méditrad/Le temps de vivre) qui vous fait rentrer sur le marché des groupistes. Pourquoi ?

Jean-Pierre Nadir : Il faut replacer cette acquisition dans le contexte. Comme je l’ai dit aux Travel d’Or, je fais plus de chiffre d’affaires que certains croient, mais moins que j’aurais aimé (rires). En 18 mois, nous avons toutefois réussi à bien travailler sur plusieurs sujets. Nous avons levé 1,5 million d’euros via Tudigo, créé une marque sur le tourisme raisonné ainsi qu’une communauté. Fairmoove se situe entre les chantres du tourisme de proximité – Green Go, Explora Project… – et les acteurs du tourisme industriel. Nous avons ainsi pris position, dans la sobriété, en nous appuyant sur deux leviers : les vols directs et un nombre minimum de nuits sur place pour amortir l’empreinte carbone. Mais en B2C, c’est plus long que prévu. Pour évangéliser les consciences, les acteurs du B2B sont des relais intéressants, ils croient en notre modèle. 

D’où votre incursion dans le B2B, en démarrant par l’agence événementielle WHM Project et le rachat d’Auxigène ?

Jean-Pierre Nadir : Parmi nos actionnaires figure effectivement les dirigeants de WHM Project, qui réalise 20M€ dans le Mice, notamment auprès de groupes du CAC 40. Nous avons signé un contrat avec ses deux repreneurs Franck Chaud et Marc Fischer pour accompagner leurs clients dans leur démarche RSE. Nous avions aussi des demandes non traitées de la part des CSE. La reprise des actifs d’Auxygène – la marque, l’équipe, les engagements clients – nous permettra d’y répondre et d’accélérer. Jean Baillon, le fondateur de cet opérateur, voulait justement passer la main, à 70 ans. Auxygène réalisait en 2019 environ 2 millions d’euros de chiffre d’affaires, pour un panier moyen de 2000 à 2500 euros. 

En B2B, de nombreux acteurs se montrent sensibles aux voyages avec un supplément d’âme.

Mais le prix est un critère important pour les CSE, alors que les voyages responsables ne sont pas forcément les moins chers…

Jean-Pierre Nadir : Oui, les CSE sont sensibles au prix, comme toutes les clientèles en général. J’essaie de remettre le produit au cœur du choix en redonnant du sens. En B2B, de nombreux acteurs se montrent sensibles aux voyages avec un supplément d’âme. D’ailleurs, un TO comme Double Sens, avec qui nous avons partagé le Travel d’Or Green Action des Travel d’Or, réalise 40% de son chiffre d’affaires auprès des CSE. C’est lui qui a préempté le créneau du tourisme solidaire.

Quelles sont les solutions que vous apportez aux CSE, par rapport à d’autres groupistes ?

Jean-Pierre Nadir : Nous développons un calculateur d’impact carbone et social, pour ensuite définir une trajectoire de baisse des émissions. Nous pourrons ainsi faire le bilan carbone 2022 d’une entreprise. Et l’inciter par exemple à passer de 5 tonnes par employé en 2022, à 4,5 tonnes en 2023. Nous allons ainsi aider nos clients à adopter une stratégie de décarbonation, pour viser 50% de baisse à horizon 2030. Notre calculateur qui s’appuie sur 15 sources différentes sera lancé en juillet en B2B, pour les entreprises de WHM Project et les CSE. Puis, il le sera en septembre sur notre site grand public. Je me sers ainsi du B2B pour développer mon activité et préparer nos outils.

Sans prétention ni arrogance, je réponds aux rieurs et aux contempteurs.

A quoi correspond l’impact social inclus dans le calculateur ?

Jean-Pierre Nadir : L’impact social correspond à la redistribution à destination au profit des populations locales. Sur ce volet, nous prendrons en compte des critères comme la part du tourisme dans le PIB, le salaire moyen du tourisme, la formation et le cadre social du pays.

En plus d’évoquer des quotas de vols, Jancovici avait déclaré sur France Inter qu’il doutait de la dimension sociale du tourisme, renvoyant à une vision passéiste du secteur et de ses « bronze-culs » qu’invectivait alors Jacques Maillot (fondateur de Nouvelles Frontières, NDLR). Mon crédo, c’est d’expliquer avec force que le secteur est en train de se réinventer, et je suis l’un des seuls sur cette ligne de crête. Je suis un peu l’enfant spirituel du groupe Voyageurs du Monde qui, sur ces sujets, est dans une logique de communication prudente. Moi, au contraire, je suis dans une logique d’explication permanente.

En janvier, vous avez paramétré votre site pour imposer des durées minimales de séjour, notamment de 6 nuits pour un vol long-courrier. Pourriez-vous aller au-delà, jusqu’à 10 nuits ?

Jean-Pierre Nadir : J’avais effectivement pris cette décision très forte, suite notamment à des échanges avec des contradicteurs. Sur le site Fairmoove, par exemple, nous ne vendons plus de 5 nuits à l’île Maurice, une durée qui représente sur la plateforme Orchestra un tiers des offres de séjour. C’est une approche un peu anti-commerciale. Je ne veux toutefois pas imposer à rester 10 jours, mais inciter. Sans prétention ni arrogance, je réponds aux rieurs et aux contempteurs. Passer de 5 à 6 nuits, déjà, nuit à mon taux de transformation. J’apparais plus cher. J’assume, nous sommes dans une évangélisation des consciences. Nous pensons par exemple qu’il est préférable, plutôt que de passer une semaine en République dominicaine et une semaine à l’île Maurice pendant l’été, de rester deux semaines de vacances dans l’une des deux destinations. Notre mission consiste à faire baisser l’impact carbone et montrer l’impact social, pour contribuer à redonner du sens aux modèles touristiques.

Je sème et j’arrose dans le B2C, en attendant la récolte. Le marché grand public est en gestation, alors qu’une vraie demande se développe en B2B.

C’est si compliqué en B2C ?

Jean-Pierre Nadir : Fairmoove ressort en premier sur la requête « Voyage responsable à l’île Maurice », en référencement payant comme en gratuit. Mais cela ne me rapporte rien pour l’instant, puisque personne ne tape cette requête… J’ai construit une centrale électrique sur un fleuve qui n’a pas d’eau (rires). Je crée des conditions pour que la demande décolle, à force de pédagogie et d’accompagnement. Je sème et j’arrose dans le B2C, en attendant la récolte. Le marché grand public est en gestation, alors qu’une vraie demande se développe en B2B.

Pour avoir un réel impact, Fairmoove doit atteindre 100 millions d’euros, aviez-vous déclaré. Où en êtes-vous par rapport à cet objectif ?

Jean-Pierre Nadir : Ces 100 millions d’euros, je les avais imaginés à un horizon de six ans. J’avais été un peu présomptueux en termes de timing. En m’appuyant sur mon réseau, mon expérience et celle des deux autres fondateurs, Corinne Loison et Arthur Courtinat, je pensais aller plus vite. Or nous constatons un manque d’entrain des voyageurs, malgré leurs déclarations d’intention dans les sondages en termes de comportements vertueux. En 2023, le volume d’affaires impacté par Fairmoove, soit en intégrant notre partenariat dans le Mice, atteindra 25 à 30 millions d’euros.

Autre sujet : où en est le Club Fairmoove Invest, un « club des 1000 » dédié aux start-up du tourisme ?

Jean-Pierre Nadir : Ce qui est intéressant, c’est de créer des synergies entre start-up, et de les accompagner. J’en ai pris pleinement conscience lors de l’émission « Qui veut être mon associé ? ». A travers ce club d’investissement, nous identifierons et soutiendrons des start-up, au rythme de 6 à 10 start-up par an. Les deux premières seront dévoilées au mois de juin.

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