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Transport : l’aérien est prêt à à faire des efforts, mais pas à la décroissance

L’aérien le dit et le répète : il fait tout pour réduire ses émissions. Mais dans quelle mesure pourra-t-il les limiter alors que le trafic redécolle fortement depuis la fin de la pandémie ?

C’est un sujet désormais quotidien. Impossible de parler de transport sans aborder son impact sur l’environnement. Avec comme cible principale le transport aérien. Après de longues années à faire la sourde oreille, le secteur comme beaucoup d’autres secteurs se rend compte désormais de l’urgence à agir. Il faut donc à tout prix, et très vite, décarboner.

Mais est-il trop tard ? Le transport aérien a-t-il perdu les faveurs des consommateurs ? Les jeunes générations vont-elles bouder l’aérien au profit du train ? Tels étaient les enjeux questionnés par la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (Fnam) lors de son congrès annuel. Sur scène, un large panel d’invités et de positions, ce qui est assez rare dans l’aérien. Et qui mérite d’être souligné.

Assez vite, les intervenants sont tombés d’accord sur un point. Les Français aiment toujours l’avion. Selon Mathieu Blondel, du cabinet Arthur D. Little, « les Français ont un rapport très positif avec l’aérien. Actuellement, le trafic revient malgré les conditions économiques difficiles, et des prix plus élevés. Il y a peut-être une schizophrénie médiatique sur l’avion mais pas une schizophrénie sociétale. »

L’aérien : une image ambiguë 

Une vision confirmée par Antoine Bristielle, le directeur de l’observatoire de l’opinion de la fondation Jean-Jaurès : « Nos études confirment cette vision positive du transport aérien. Notamment des grandes entreprises du secteur. Il y a toujours un futur avec l’avion pour les jeunes générations. Par contre, il est vrai qu’il a des préoccupations environnementales sous-jacentes. D’après une étude, 78% des jeunes pensent qu’un avion propre existera. Mais 60% pensent également que les entreprises du secteur aérien ne font pas assez. »

Pour Jean-François Rial, le PDG de Voyageurs du Monde, c’est un problème de communication.  « Nous communiquons mal et nous continuons à mal communiquer. Nous sommes trop sur la défensive. On est à côté de la plaque. On peut se raconter tout ce qu’on veut. La quote-part de l’émission de l’aérien est importante et elle ne va faire que de monter car on décarbone moins bien que les autres secteurs. Le discours qui dit ‘on est à 3 ou 4%‘, cela ne marchera pas. Si on le ramène à chaque passager, c’est plus important. »

Les entreprises devront payer

Pour le patron de Voyageurs du Monde, il faut faire mieux. « Expliquer tout ce qu’on fait sur la diminution. » Et oublier certains grands mécanismes de compensation : « C’est terminé, ça ne marche pas. Personne ne comprend rien à Corsia (un marché destiné à compenser la fraction des émissions de CO₂ des vols internationaux excédant leur niveau de 2020, NDLR). En ce moment, la vision de l’aérien c’est ‘L’avion ça émet beaucoup par personne et c’est pour les riches’. Il faut que l’on parle de la clientèle ethnique, qui pour le coup n’est pas une clientèle aisée. Mais aussi de l’utilité sociale de l’avion. Ses retombées économiques, ses retombées sociales considérables pour les populations locales, qui bénéficient pleinement de l’avion et de ses passagers. »

Pour lui, la cible doit davantage être l’aviation d’affaires. « Il faut lui imposer d’investir massivement dans les carburants de synthèse. C’est eux qui vont développer la filière. Cela va leur coûter plus cher mais ce n’est pas grave. Ils ont de l’argent. »

Haro sur la décroissance

Ainsi donc se serait en grande partie aux entreprises de payer selon Jean-François Rial. Des acteurs également ciblés par Diane Strauss, la directrice France de l’ONG Transport & Environnement : « Il y a deux leviers pour baisser les émissions. La technologie effectivement. Malheureusement elle ne va pas assez vite. L’autre levier, c’est la réduction de la demande. C’est un prérequis, car les effets des carburants d’aviation durable sont encore trop limités. La question est donc désormais de savoir qui doit réduire ses émissions, au nom de la justice sociale. Pour nous, ce sont les entreprises. Si on réduit de 50% les voyages professionnels, avec une utilisation des SAF en parallèle, on pourra atteindre les objectifs pour 2050. On sait que dans l’aérien, 1% de la population émet 50% des émissions. Ce sont les jets, mais aussi beaucoup de voyageurs fréquents. Stratégiquement, c’est là qu’on peut réduire le plus vite. C’est ce qui permettra à tout le monde de continuer à voyager. »

Mais pour Jean-François Rial, si la cible est la même, aborder la question d’une limitation est une ineptie. « La décroissance, ce n’est pas humain. C’est comme le communisme. C’est magnifique mais cela n’a jamais marché. Les gens de Chine, du Sri Lanka ou de New York ne voudront jamais. On peut la décréter mais cela n’arrivera jamais. C’est l’anti-solution écologique. »

Une déclaration qui a été vivement applaudie par la salle, soulagée d’entendre quelqu’un venir rappeler les fondements actuels de l’industrie. Et peu importe qu’Augustin de Romanet, le patron d’ADP en personne, Jean-Marc Jancovici et surtout le Giec aient appelé à une réduction des vols. La protection de l’environnement, d’accord. Mais la décroissance, c’est trop.

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1 commentaire
  1. PIERRE PRIM dit

    Je fais un AR par an et je le maintiendrai. Je suis d’accord pour payer un peu plus cher et ne pas voyager davantage. Par contre je refuse l’argument biaisé qui consiste à mettre en avant les jets privés et les voyageurs hyper fréquents pour mettre tout le monde dans le même panier et décréter avion=riche. Et je demande aux anti-avion de nous dire où ils en sont dans le consommation de numérique…

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