Tourisme : « Pékin ou Shanghai pourraient détrôner Paris » selon Julia Simpson

L’Echo touristique : Vous avez participé au 2e Sommet Destination France jeudi 11 janvier, au château de Chantilly. Qu’en avez-vous pensé ?

Julia Simpson : C’est une très bonne idée et un signal fort. Comme vous savez, Emmanuel Macron a organisé ce grand événement pour stimuler les investissements dans le tourisme et le voyage en France. Les pays qui rencontrent le plus de succès dans le secteur sont ceux dans lesquels le secteur privé et le gouvernement travaillent en bonne intelligence. 

Pour vous, la France est-elle restée la première destination mondiale en 2023 ?

Julia Simpson : La concurrence internationale est très forte, notamment de la part de la Chine et de l’Arabie saoudite. Cependant, oui, je suis ravie de confirmer que la France est restée la première destination mondiale en 2023, en termes d’arrivées internationales. Elle le restera en 2024. La France a une telle richesse culturelle et naturelle, de gastronomie et de vins !

Paris reste également la ville la plus populaire au monde. Mais des villes asiatiques émergent très rapidement. Au WTTC, nous estimons que Pékin ou Shanghai pourraient détrôner Paris dans les 10 prochaines années.

Quand vous êtes dans une position de leader, il faut travailler très fort pour se maintenir. C’est la raison pour laquelle le Sommet Destination France revêt une grande importance. Nous avons ainsi pu comprendre les conditions d’investissement en France.

La France souhaite également être la première destination durable à l’horizon 2030. Pour prétendre à ce titre, le pays – où Airbus est basé – doit-il impérativement prendre le leadership en matière de carburants durables ?

Julia Simpson : La production de carburants durables est le devoir de tous les pays dont la France bien sûr. Ce n’est pas le rôle des compagnies aériennes mais bien celui des gouvernements. Les Etats-Unis sont aujourd’hui le pays leader en matière de production de carburants durables, ils mettent des incitations en la matière. Par ailleurs, les avions de nouvelle génération dégagent 20% de CO2 de moins que les anciens. Mais, à l’échelle mondiale, nous ne produisons pas du tout assez de carburants durables. Le tourisme et le voyage représentent 8% des gaz à effet de serre. Il faut travailler sur les mobilités, le gaspillage alimentaire et les énergies renouvelables.

Pour vous, quel est le plus grand concurrent de la France, soit celui qui pourrait lui ravir son leadership en termes d’arrivées internationales ? L’Espagne, l’Arabie saoudite, la Chine ?

Julia Simpson : Le secteur français du voyage et du tourisme va poursuivre son essor. Selon notre étude d’impact économique, il devrait croître en moyenne de 3% par an au cours de la prochaine décennie, soit deux fois le taux de croissance annuel de 1,5% de l’économie globale du pays. Le secteur devrait ainsi représenter des recettes de 297 milliards d’euros – 9,7% du PIB – .

En termes de recettes, en dollars, les Etats-Unis arrivent en tête. Mais nous pensons que la Chine va les détrôner. Il y a beaucoup de compétition, en Asie comme au Proche-Orient.

Toutefois, la France a de grandes forces, notamment ses atouts naturels et culturels, sa stabilité politique et son économie.

Pour le gouvernement français, le tourisme représente 7,5% du PIB. Quelles sont vos estimations ?

Julia Simpson : En 2023, le tourisme représente 8,4% de son PIB et 2,7 millions d’emplois directs et indirects. Il contribue à hauteur de 220 milliards d’euros à l’économie nationale. Nous pensons que, d’ici 10 ans, plus d’un demi-million d’emplois seront créés en France dans le secteur du tourisme et du voyage. C’est un enjeu important pour le gouvernement.

Nous utilisons de plus en plus de technologie et d’IA dans nos vies, et donc des emplois vont disparaître. Dans le voyage, vous aurez toujours besoin d’humains, de rencontres en face-à-face. Et c’est un secteur dans lequel vous pouvez démarrer en bas de l’échelle et gravir ensuite les échelons.