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« Pas de paiements BSP hebdomadaires en vue »

Dans un contexte difficile pour l’aérien, les compagnies veulent mieux se protéger des défaillances de paiement et des accusations de pollueurs. Non sans assumer leur part de responsabilité, aussi bien financière qu’environnementale.

L’Écho touritique : Quelle est la vocation de l’Iata ?

Jérôme Bonnin : L’Association du transport aérien international (Iata) établit les normes commerciales qui sont à la base de l’industrie aérienne mondiale. La mission de l’Iata est de représenter, d’orienter et de servir l’industrie aérienne. Ses effectifs comprennent quelque 230 compagnies aériennes, qui assurent 93 % du transport aérien international régulier. La deuxième vocation de l’Iata consiste, dans le cadre du BSP, à protéger, autant que faire se peut, les intérêts des intervenants, compagnies, agences de voyages et leurs clients. Notre mission est très cadrée, sur le plan juridique. Iata France gère les contrats avec 1 485 entités juridiques agences, correspondant à environ 3 500 points de vente. Depuis deux ans, nous perdons 50 à 60 points de vente par an. Cette baisse est surtout due à la consolidation. Mais les volumes compensés ne diminuent pas pour autant. La majorité de nos revenus provient des compagnies aériennes, à partir des produits que nous leur proposons et qui permettent de financer nos projets.

Il y a eu une hausse sensible des faillites de compagnies en 2008 et en 2009. Quel a été votre rôle, vis-à-vis des agences françaises ?

Nous essayons, dans la majorité des cas, d’assurer au mieux les remboursements en bloquant les fonds à l’échelle mondiale. Concernant Air Sénégal (Iata a remboursé 1,5ME aux agences, ndlr), l’intervention de Iata, avec l’aide du Snav, a permis de passer d’un taux de remboursement de 20 % à un taux de 100 %, par rapport aux demandes éligibles des agences françaises. Entre 2004 et 2008, la perte sèche pour les agences, en billets non-remboursés, a atteint 4ME sur le marché français, dont 2,8ME sont attribuables à une seule compagnie. Si Iata n’avait pas existé, le préjudice global, soit la perte pour les clients des agences, aurait atteint environ 7ME sur la période 2004-2008.

Malgré la crise, les agences semblent tenir le choc. Comment l’expliquez-vous ?

Lors du paiement au BSP du 17 septembre, les agences arrivent avec une trésorerie assez basse, puisque les ventes d’août sont très faibles. C’est à cette échéance que se manifestent en général les problèmes financiers. Mais les agences ont montré leur capacité à réagir et à tenir le choc. Seules quelques-unes n’ont pas payé, et elles devraient régulariser leur situation. L’année dernière, le contexte était plus inquiétant. Nous avions observé une assez forte dégradation de la santé financière des agences. Ces problèmes, qui sont d’ordinaire réglés au plus tard à Top Resa, ont traîné jusqu’à fin décembre. Heureusement, les agences ont vraiment pris le problème en main. Leurs efforts portent leurs fruits depuis le début de l’année 2009. Seulement quatre agences ont présenté de petits défauts depuis janvier. Les compagnies ont perdu 1,7ME jusqu’à fin septembre 2009 à cause de défauts de paiements sur la France, contre 16ME l’an dernier.

Pour renouveler leur agrément, les agences doivent satisfaire à quatre critères*. Il serait question de les durcir…

Les compagnies ont établi des règles, que nous avons pour mandat d’appliquer. À son niveau, Iata n’a aucune marge de manoeuvre concernant les quatre critères qui figurent dans le Manuel de l’agent de voyages. Toute modification passe par un vote à l’unanimité des compagnies. Mais, c’est vrai, les compagnies veulent se protéger des défaillances des distributeurs. Les 16ME perdus en 2008 y sont pour beaucoup. Par conséquent, Iata pourrait exiger des garanties supplémentaires dès le début de l’année prochaine. N’oublions pas que nos critères locaux ont 25 ans !

Les paiements au BSP sont mensuels, le 17 du mois. Est-il question de les rendre hebdomadaires ou bimensuels, comme certains le craignent ?

Dans la majorité des pays du monde Iata, les règlements ont lieu chaque semaine, voire deux fois par mois. Les compagnies pourraient être tentées d’augmenter la périodicité en France, pour limiter leurs risques et améliorer leur trésorerie, surtout suite à l’affaire Wasteels. Je comprends donc les craintes de Jean-Pierre Mas (président d’Afat Voyages, ndrl) ou de François-Xavier Deboüard (président de Selectour, ndlr). Lors des consultations périodiques en France, qui réunissent huit agences et huit compagnies aériennes tous les deux à trois mois, nous abordons régulièrement la question. Certains disent que les compagnies veulent imposer un paiement hebdomadaire. Je vous affirme que c’est faux ! Il n’y a aucune proposition de compagnies en ce sens. Pour moi, il n’y aura pas, à horizon visible, d’accroissement volontaire des échéances de paiement aux agences françaises. Un changement passe par une démarche assez lourde, avec vote des compagnies aériennes. Une décision de ce type ne peut être prise à la hussarde. Ce n’est pas à l’ordre du jour.

Qu’entendez-vous par « horizon visible » ?

Sans doute pas avant 2011. Dans le système BSP, nous avons toutefois un levier, que nous n’avons jamais mis en avant en France : toute agence peut volontairement effectuer des versements plus fréquents pour réduire le montant de sa garantie financière. Une agence française paye chaque semaine, ce qui lui permet d’avoir une garantie financière divisée par trois. Quatre autres devraient bientôt payer tous les quinze jours, et voir leur facture diviser par 1,7 ou 1,8.

Sabre, Amadeus et Travelport vous ont attaqué en justice, concernant les Passenger Intelligence Services (PaxIS). Quelles sont les décisions de justice rendues et attendues ? Allez-vous faire appel ? Avez-vous néanmoins pu commercialiser ces PaxIS, qui sont à Iata ce que les MIDT sont aux GDS ?

Nous ne pouvons faire de commentaires à cet égard pour le moment.

Quel est le bilan du BSP France depuis juin 2008, qui a marqué le début de la crise actuelle ?

Le secteur aérien semble avoir touché le fond en mai dernier. Le nombre de transactions enregistré par Iata France a diminué de 8 % de janvier à juin. Fin août, nous étions au même niveau que l’an passé. Par contre, nous constatons une baisse importante en valeur. Les entreprises ont pris l’habitude de faire voyager leurs salariés en classe éco, elles auront d’ailleurs du mal à revenir en arrière. En cumulé depuis janvier, les ventes enregistrées par Iata France ont chuté de 19,8 % en volume d’affaires. La situation commence à s’infléchir. Mais nous sommes toujours au creux de la vague. Nous sommes encore à -15,44 % en août en valeur, mais -0,95 % en nombre de transactions.

Quelles sont les pertes prévisionnelles des compagnies Iata à l’échelle mondiale cette année ?

Les prévisions financières mondiales révisées en septembre laissent entrevoir pour 2009 des pertes totales de 11Mds$ pour les transporteurs aériens, soit 2Mds$ de plus que les pertes anticipées précédemment. Les compagnies aériennes ne sont pas encore à bon port. La crise se poursuit. Cette situation est attribuable à l’augmentation des prix du pétrole et à des rendements exceptionnellement bas. Les revenus de l’industrie pour l’année en cours devraient fléchir de 80Mds$ (15 %) par rapport à ceux de 2008.

Les compagnies ont-elles les moyens d’investir dans le développement durable ?

Le transport aérien est la première industrie à s’engager à atteindre une croissance neutre en carbone à l’échelle mondiale. Et nous avons fait preuve de fermeté en fixant l’échéance à 2020. La stratégie de l’industrie sur les changements climatiques repose sur quatre piliers, soit les progrès technologiques, l’amélioration des opérations, des infrastructures plus efficaces et des mesures économiques positives. Cette stratégie donne déjà des résultats importants. L’empreinte carbone de l’aviation va diminuer de 7 % cette année -5 % en raison de la récession et 2 % grâce à la stratégie de l’industrie de l’aviation. Les gouvernements et l’industrie doivent travailler de concert, et un des éléments clés en Europe sera la création du ciel unique. Il faudrait un seul commandant.

Comment fonctionne le système des quotas ?

Le système européen d’échange de droits d’émissions sur les gaz à effet de serre (EU ETS) est entré en vigueur en janvier 2005. En 2006, la Commission européenne a proposé d’inclure le transport aérien dans le système. En juillet 2008, les représentants de la Commission, du Parlement européen et du Conseil de l’Europe se sont mis d’accord sur les points suivants :

– tous les vols décollant/atterrissant dans l’espace aérien européen seront inclus dans le système à compter de 2012 ;

– le niveau de base est la moyenne de l’ensemble des émissions des compagnies, mesurées en 2004-2006, calculé initialement à exactement 216 608 927 tonnes de CO2, le chiffre fera l’objet d’une révision en 2010 ;

– la limite pour l’ensemble de l’industrie aérienne est de 97 % du niveau de base (donc 210 millions de tonnes actuellement) en 2012 et de 95 % en 2013 ;

– la limite pour chaque compagnie sera calculée en fonction de ses résultats 2010 (en revenu-tonne-kilomètre qui est l’unité de mesure traditionnellement utilisée par l’ensemble des acteurs de l’industrie) ;

– les compagnies recevront gratuitement 85 % de leurs droits et devront en acheter 15 % aux enchères), leurs éventuels besoins supplémentaires, pour assurer leur croissance par exemple, s’achèteront de même aux enchères.

Un point sera fait en 2014 pour revoir l’incorporation de l’aviation dans le système EU ETS.

Quelle est votre position par rapport à la taxe carbone que met en place la France ?

Selon mes informations, cette taxe ne touche pas directement l’aviation. Toutefois, et comme pour les droits d’émission, l’industrie aérienne est mondiale. Les initiatives locales n’ont donc pas vraiment de sens et peuvent même affaiblir une industrie déjà durement touchée. Il est primordial de mettre en oeuvre les principes d’une approche sectorielle mondiale sous l’égide de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et en collaboration avec l’industrie représentée par l’Iata.

* Des fonds propres positifs et supérieurs à 1 % du volume net au BSP, un fond de roulement positif ainsi qu’un rapport capitaux permanents/actifs immobilisés supérieur à 1.

« Toute agence peut

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