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Annulation d’un séjour ski, informations aux voyageurs, frontières fermées… : l’avis d’Emmanuelle Llop

Emmanuelle Llop, fondatrice du cabinet Equinoxe Avocats, a répondu à de nombreuses questions lors du webinaire juridique organisé par L’Echo touristique mardi 26 janvier.

Environ 450 professionnels ont assisté au webinaire organisé le 26 janvier 2021. A cette occasion, Emmanuelle Llop, avocate au sein du cabinet Equinoxe Avocats, a répondu aux nombreuses questions de nos lecteurs. Extraits choisis de ses conseils et précisions. Des éclairages très utiles alors que les pros et les voyageurs sont « dans l’oeil du cyclone », pour reprendre les termes de l’avocate. Avec des nouvelles restrictions et injonctions presque quotidiennes.

=> Les remontées mécaniques restent fermées jusqu’à nouvel ordre (au moins jusqu’à la mi-février, et nous allons sans doute vers une saison blanche). Dans ce contexte, le client peut-il annuler sans frais un séjour à la montagne commençant le 6 février ? Examinons deux cas de figure : la réservation d’un hébergement sec, et celle d’un séjour tout compris incluant un forfait ski, type Club Med ?

« Rappelons le droit qui s’applique à ce genre de situation, répond Emmanuelle Llop. Nous sommes sortis de l’ordonnance depuis le 16 septembre 2020, nous revenons dans le droit commun en cas de demande d’annulation. Le client doit prouver qu’à destination, ou pendant le transport vers cette destination, surviennent des Circonstances exceptionnelles et inévitables (CEI) qui vont empêcher le déroulement correct de son contrat. Quand un client achète un séjour à dominante ski, votre deuxième cas de figure (comme au Club Med, NDLR), son séjour sera bien sûr impacté par la fermeture des remontées mécaniques. Le client pourra malheureusement demander une annulation sans frais. » En revanche, pour une location sèche d’appartement à la montagne, la situation est différente. « Le professionnel n’a pas vendu de prestation ski. » Les frais d’annulation au contrat peuvent alors s’appliquer, puisque l’hébergement est possible. Et la montagne reste accessible.

=> Le Seto encourage les reports, plutôt que les annulations. Si toutefois le client préfère annuler (notamment à cause de la septaine au retour), faut-il appliquer les frais d’annulation prévus au contrat, en général ? Et ce, sauf dans le cas particulier des Dom-Tom imposant une septaine à l’arrivée, et créent donc des CEI ?

« Il y a effectivement une différence entre la septaine des Français ou des étrangers au retour en France, entre la septaine dans des Dom-Tom à l’arrivée sur place. » Une septaine au retour ne peut pas constituer une CEI pour une agence de voyages, qui a vendu une destination étrangère, et non la France. « En revanche, une septaine à destination – on pense notamment aux Outre-mer, va constituer une CEI, qui est susceptible de constituer une raison pour le client de demander un remboursement sans frais, malheureusement (cf. article L211-14 du Code du tourisme). Sauf meilleur accord bien sûr entre le client, l’agence et le voyagiste : nous encourageons tout le monde, y compris les clients, à préférer un report. Ce sont des conditions extrêmement difficiles pour les professionnels », qui encaissent des restrictions de voyage quasi quotidiennes.

=> La Réunion n’accepte plus que les voyages impérieux à compter de jeudi. Quel conseil pouvez-vous donner pour les départs de samedi prochain et les suivants ?

En toute logique, le motif impérieux pourra être d’ordre familial ou professionnel. « Dire qu’on a impérativement besoin de vitamine D, cela ne passera pas », rappelle avec humour Emmanuelle Llop. Donc dans le cadre d’un voyage loisir, même s’il faut « privilégier un accord prévoyant un report », le client est en droit de demander – en raison de la septaine exigée à l’arrivée –  un remboursement sans frais en invoquant une CEI. D’expérience, nous savons aussi que certains voyageurs passeront outre, et partiront quand même… Quoi qu’il en soit, il faut bien informer le voyageur du contexte, qui décidera alors en connaissance de cause.

=> Quid du client qui vient avec le CP du Quai d’Orsay, et demande une annulation sans frais (CEI) ?

Les voyages de l’étranger vers la France et de la France vers l’étranger sont « totalement et strictement déconseillés jusqu’à nouvel ordre ». « C’est une interdiction de voyager sans le dire. Les avis du Quai d’Orsay n’engagent pas la responsabilité de l’Etat, sa position m’agace… Les communiqués vont de plus en plus être invoqués par les voyageurs pour pouvoir justifier une annulation sans frais » et pourraient être utilisés par des juges… Mais face à une recommandation aussi générale du ministère, « si les vols sont ouverts, les hôtels aussi, les clients veulent voyager en respectant les tests, voire les septaines, je les ferais voyager. » D’autant qu’il est possible de contracter le virus dans d’autres circonstances, en prenant les transports en commun par exemple… Toutefois, si le client insiste fortement pour exiger l’annulation sans frais, il sera difficile de le lui refuser.

=> La France impose un test PCR à tous les voyageurs européens arrivant en France, et une septaine à ceux qui reviennent d’un pays hors UE. Faut-il en informer tous ses clients par écrit ?

Le professionnel a effectivement deux types d’obligation d’informations : avant le départ, soit avant de conclure le contrat, mais aussi jusqu’au départ, ce qui correspond à « un devoir de conseils », explique l’avocate. Comme les informations changent régulièrement, comment procéder ? « Mon conseil, c’est de donner les informations sanitaires à votre portée (par écrit) en les datant, avec la mention « sous réserve de modification de dernière minute ». Quitte à utiliser des captures d’écran. » Il faut être le plus complet possible, pour éviter tout malentendu, voire tout litige. Le devoir d’information aux voyage s’applique aux voyages à forfait, mais aussi au vol sec.

=> Nous avons des clients qui tiennent absolument à partir, même s’il y a reconfinement dans quelques jours, indique un mini-réseau. Devons-nous leur faire signer une attestation de décharge ?

Non, « les agences ont une responsabilité de plein droit dont elles ne peuvent pas se décharger. Je préconise donc de faire signer au client – ou confirmer qu’il a reçu – une note d’informations. » Et il faut savoir que l’agence ne vend pas les conditions de départ de la France, soit un éventuel confinement. A bon entendeur…

=> Autre question d’un professionnel : en cas de demande d’annulation d’un groupe pour un voyage en Russie en juin, demandée en janvier par le client, considérant que la destination n’est pas accessible à ce jour, mais que nous ne connaissons pas la situation en juin, quelle doit être notre réponse ?  

Même si la destination est actuellement fermée, « pour un départ dans 4 à 6 mois, il est trop tôt pour que le client annule à cause du Covid », estime l’avocate. Dans ce cas, les frais d’annulation doivent s’appliquer. « Pour les nouvelles ventes, il faut informer le client, rappeler que les frontières sont pour l’instant fermées, et que nous aviserons plus tard. » Une suggestion : dans le devis ou les conditions de vente, une clause peut stipuler que le client est prêt à envisager de modifier le contrat, et d’envisager une autre destination.

=> Revenons à l’ordonnance du 25 mars 2020. Un voyage a déjà été reporté grâce à un avoir valable 18 mois. Peut-on redonner vie à l’avoir pour un nouveau report ?

Il est impossible de redonner vie à l’avoir s’il a déjà été utilisé par le client pour un report, dans le cadre de cette ordonnance. C’est « comme un chèque », à usage unique. Ensuite, c’est le Code du tourisme qui s’applique. S’agissant du remboursement, il doit intervenir 18 mois après la date de la nouvelle proposition de voyage.

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