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Jean-Baptiste Lemoyne : « Nous n’avons pas émis d’interdiction de voyager vers l’Espagne ou le Portugal à ce jour »

Les professionnels du tourisme doivent-ils annuler les voyages de leurs clients prévus en Espagne ou au Portugal ? L’Echo touristique a posé la question au secrétaire d’Etat au Tourisme, dans le cadre d’une interview qui porte aussi sur la vaccination et la destination France.

Clément Beaune incite les Français à éviter le Portugal et l’Espagne, notamment la Catalogne. Il évoque aussi des « mesures renforcées ». Que faut-il comprendre ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Tout simplement qu’il faut rester prudent dans la façon d’organiser et de vivre ses vacances. Certes les activités ont rouvert en France comme en Europe. Mais nous ne sommes pas sortis de cette pandémie. Nous devons redoubler de prudence et de vigilance face à ce variant Delta. Il faut continuer à respecter les gestes barrière ainsi que les protocoles sanitaires, et poursuivre la vaccination. Le vaccin, c’est la clé de l’été, de l’arrière-saison et de la reprise d’activité. C’est pourquoi nous déployons cet été un dispositif dit « aller vers », permettant aux vacanciers français de faire une première ou une deuxième injection sur leurs lieux de vacances.

Ce qui pourrait être envisagé, c’est par exemple de renforcer un certain nombre de contrôles.

Un Conseil de défense a lieu lundi prochain. Le Portugal et/ou l’Espagne sont-ils susceptibles de passer du statut de pays vert à celui de pays orange ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Nous nous retrouvons régulièrement autour du président de la République pour un Conseil de défense. Le dernier était mercredi, le prochain a lieu lundi. Depuis le début de la crise, nous évaluons en permanence la situation sanitaire, en France, en Europe et ailleurs dans le monde, pour prendre les décisions les plus adéquates, avec les objectifs suivants : maintenir un niveau élevé de vaccination, surtout parmi les publics les plus exposés, et endiguer la circulation du virus. Nous avons encore deux ou trois jours de travail avant le prochain conseil de défense pour examiner tous ces éléments, en vue de proposer des scénarii au chef de l’Etat, qui tranchera. Ce qui pourrait être envisagé, c’est par exemple de renforcer un certain nombre de contrôles.

Des contrôles aléatoires ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Les contrôles peuvent être une piste. Quand on se déplace, notamment en avion, il y a le certificat sanitaire. Et donc, il est important qu’on vérifie que les personnes sont bel et bien vaccinées, testées négatif ou immunisées.

Monsieur le ministre, vous le savez, pour l’Espagne, environ 80% des Français vont sur place en voiture, et les contrôles par voie terrestre sont aléatoires…

Jean-Baptiste Lemoyne : C’est la raison pour laquelle j’évoque l’hypothèse de contrôles renforcés, compte tenu de la circulation des variants.

Ma recommandation, c’est d’attendre que le Conseil de défense statue, lundi, et que les informations soient communiquées.

Revenons à cette déclaration sur l’Espagne et le Portugal, qui intervient au moment des premiers grands départs en vacances. Que dîtes-vous aux professionnels ? De ne pas annuler les voyages de leurs clients et d’attendre le Conseil de défense lundi ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Ma recommandation, c’est d’attendre que le Conseil de défense statue, lundi, et que les informations soient communiquées. Nous n’avons pas émis d’interdiction de voyager vers l’Espagne ou le Portugal à ce jour. Les déplacements demeurent possibles, nous appelons juste à la prudence. Nous continuerons de nous adapter à l’évolution de la situation sanitaire en temps réel. L’expérience que vous pourrez vivre en Catalogne sera vraisemblablement dégradée puisque les autorités régionales prennent des décisions de fermeture administrative.

Le variant, c’est l’inattendu permanent. C’est pour cela que je le redis : je conseille à nos concitoyens d’avoir recours, s’ils souhaitent se déplacer à l’étranger, aux services des professionnels de voyage. Ce sont des spécialistes, des professionnels. Voyager est malheureusement devenu plus compliqué avec le coronavirus. Le virus nous amène aussi à faire évoluer la carte des pays verts, orange et rouges tous les 15 jours environ. Le Centre De Crise européen, lui-même, actualise cette carte régulièrement.

Les points de vigilance lundi seront – j’imagine – sur l’Espagne, le Portugal, la Tunisie, le Royaume-Uni ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Ce sont des pays où le variant Delta circule de manière importante. Nous leur attachons une attention toute particulière.

Les Vingt-Sept ont acté la possibilité pour les Etats membres qui le souhaitent d’activer « un frein d’urgence » avec par exemple des tests de dépistage ou des quarantaines temporaires. Explorez-vous cette option ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Différentes options sont sur la table. Notre mot d’ordre est simple : adaptation en temps réel et pragmatisme des décisions. Je comprends l’incertitude que cela peut générer mais dans le contexte actuel, nous ne pouvons pas baisser la garde. Nous devons rester vigilants.

S’agissant de la carte des pays, la France prévoit-elle des changements sur les critères des couleurs ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Nous sommes en train d’étudier d’éventuels amendements, liés au code couleur selon le statut vaccinal.

Les personnes vaccinées auraient-elles plus de facilités à voyager ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Oui, cela pourrait être le sens de certaines modifications. Nous allons faire des propositions, et nous verrons si le conseil de défense les adopte ou non.

Dès lundi ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Oui.

Parmi les hypothèses, peut-on imaginer que pour les pays rouges, le motif impérieux ne soit plus exigé des personnes vaccinées ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Rendez-vous lundi. En tout cas, nous sommes force de proposition auprès du conseil de défense et du Président. Nous travaillons pour proposer des aménagements et une facilitation pour les personnes vaccinées. Les personnes vaccinées ne doivent pas être pénalisées par les non-vaccinées.

Le variant Delta a vocation à remplacer les précédents. Donc nous devons tous œuvrer pour le réguler.

Pour aller en Espagne, plus besoin de test ni de vaccin. On peut entrer dans ce pays – mais aussi à Chypre et aux Pays-Bas – comme avant le Covid. Vous regrettez un tel assouplissement, alors même que le virus Delta circule activement ?

Jean-Baptiste Lemoyne : La France a assumé le choix d’être un peu plus conservatrice que certaines destinations du sud comme le Portugal et l’Espagne. Les faits nous donnent malheureusement raison. Le variant Delta a vocation à remplacer les précédents. Donc nous devons tous œuvrer pour le réguler. Les pays qui ont ouvert le plus tôt, le plus vite au plus grand nombre sont les premiers à être rattrapés par cette remontée des contaminations qui pourrait ressembler à une nouvelle vague. Cela valide a posteriori les décisions que nous avons prises. La décision que vous expliquez – l’absence de test quel que soit le statut vaccinal – illustre notre différence d’appréciation avec d’autres pays. Je m’en suis déjà entretenu avec les ministres espagnol et grec du Tourisme. Je précise que la France a fait le choix d’exonérer de tout test les seules personnes vaccinées venant de zones vertes.

Finalement, les principes fondamentaux du certificat sanitaire européen (vaccin, test ou immunité) ne sont pas respectés par l’ensemble des Vingt-Sept. Pour vous qui défendez l’harmonisation européenne, n’est-ce pas décevant ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Le passe sanitaire est un outil construit ensemble au sein de l’UE, et interopérable. Mais chaque Etat reste souverain quant aux conditions d’admission sur son territoire. Dont acte. Le président de la République n’a cessé d’inciter à la prudence dans les conseils de défense, au cours des derniers mois. Il a eu raison.

Alain Capestan (Voyageurs du Monde) dit que, si nous n’avons pas le choix, la vaccination obligatoire peut être la solution. Qu’en pensez-vous ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Aujourd’hui, ce qui est examiné, c’est la vaccination obligatoire de certains publics comme les soignants. Maintenant, nous avons envie de continuer à faire confiance à l’esprit de responsabilité. Pour l’instant, un peu plus de 50% de la population a reçu une première dose. 80% des Français ont émis le souhait de se faire vacciner. Le sujet de l’obligation est délicat.

Cette année, nous aimerions atteindre 50 millions de visiteurs étrangers.

Revenons à la France, qui a accueilli 90 millions de visiteurs étrangers en 2019. Quel est l’objectif cette année ?

Jean-Baptiste Lemoyne : En 2020, d’après les premières estimations, nous avons reçu 35 à 40 millions de visiteurs internationaux. Cette année, nous aimerions atteindre 50 millions, d’autant que le tourisme d’affaires devrait reprendre sur le dernier trimestre. Si nous ne voulons pas compromettre la reprise, la seule solution reste la vaccination. Si nous en restons au niveau actuel, nous risquons d’être débordés par le variant Delta.

Environ 90% des Français ont passé leurs vacances en France l’an passé. Comment se profile la saison 2021 ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Nous observons l’émergence d’un tourisme en circuit court. Avant la crise, 70% des vacanciers français partaient en France l’été, ils devraient être 80% à 85% cette année. Les gens partent moins loin, ce qui bénéficie à la France. Nous sommes une destination de proximité pour les Belges, les Néerlandais, les Allemands, les Suisses, les Italiens.  

Aujourd’hui ont démarré à Châtelaillon-Plage les concertations sur le plan de relance du tourisme. Quel est le budget ?

Jean-Baptiste Lemoyne : Je répondrai en évoquant d’abord la méthode. Le Président de la République a souhaité que l’on bâtisse ce plan de reconquête du tourisme. Nous allons à la rencontre des professionnels pour le coconstruire, comme pour le plan Montagne. C’est le sens de la tournée sur le terrain que j’entame en France avec Alain Griset, Ministre délégué aux PME. Nous allons ainsi nourrir nos cinq grands axes de propositions émanant du terrain, que nous pousserons en interministériel pour obtenir des budgets nouveaux. Le plan sera présenté à l’automne.

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