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Aérien : « Nous demandons à l’Europe des avoirs comme pour les tour-opérateurs »

Avoirs sur les vols, tensions avec les agences, sortie de crise : nous abordons tous les sujets avec Jean-Pierre Sauvage, président du BAR France, l’association des représentants de compagnies aériennes en France.

L’Echo Touristique : Cela fait maintenant plus de deux semaines que la crise du Covid-19 a touché la France. Quels sont désormais vos axes de travail au niveau de l’aérien ?

Jean-Pierre Sauvage, président du BAR France.

Jean-Pierre Sauvage, président du BAR FranceLe dossier social a déjà été couvert avec la mise en place du chômage partiel pris en charge par l’Etat. Reste désormais à étudier le volet économique. Nous tentons de mettre en place un moratoire sur les taxes et redevances des aéroports.

Concernant la taxe de solidarité dans l’aérien par exemple, nous demandons à ce qu’elle ne soit pas rétroactive, pour les billets émis avant la promulgation de la loi (28/12/2019). Pour les redevances aéroportuaires, nous essayons également d’obtenir des paiements différés pour les compagnies. Mais les structures aéroportuaires sont dans la même position financière que nous. Les réponses apportées doivent être au cas par cas. Il faut faire preuve de souplesse, car c’est très sensible, il y a aussi des règles de concurrence à respecter.

Pour tout ce travail, le BAR est en lien direct avec la Direction générale de l’aviation civile. C’est elle aussi qui va porter la voix des compagnies auprès de l’Union Européenne pour obtenir, comme pour les tour-opérateurs, une mesure transitoire. Normalement selon les textes européens, lorsqu’il y a annulation, les compagnies doivent procéder à un remboursement et à une indemnisation. Nous avons obtenu que l’indemnisation soit annulée. Nous aimerions que le remboursement se transforme en avoir, comme pour le tour-operating. Bien sûr cette mesure ne concerne que les billets non remboursables.

Que répondez-vous aux critiques envers IATA et les compagnies, qui ont fusé lors de la phase de rapatriement, notamment au niveau du BSP, des remboursements mais aussi des prix des billets ?

Jean-Pierre Sauvage : Il a fallu trouver un juste équilibre entre les difficultés de chacun. C’est Iata qui définit le mode opératoire. Elle a pris des dispositions pour la défense de ses mandants. A un moment donné, les remboursements étaient supérieurs aux encaissements. Les compagnies ne pouvaient pas faire du BSP négatif. Concernant le yield des billets pendant les phases de rapatriement, je pense que les robots ont continué de tourner mais de la même manière que ceux de la SNCF, qui est pourtant une entreprise publique. Et je pense que cela a été résiduel.

Alors que certains imaginaient une reprise aussi forte que la chute, les dernières analyses estiment qu’elle sera plus lente. Quelle est votre analyse ?

Jean-Pierre Sauvage :  Les projections que l’on a sont simplement des estimations. Quand Iata annonce 252 milliards de pertes pour le transport aérien, c’est plus ou moins les revenus sur un trimestre des compagnies qu’elle représente sur une année. Soit la période de confinement et de reprise. Mais nous n’avons pas d’éléments objectifs qui nous permettent d’anticiper. Les seules projections que l’on a en ce moment, ce sont des projections sanitaires.

Il risque d’y avoir des décalages entre les différents pays. La vague est partie de l’Est vers l’Ouest. On observe que la Chine commence à frémir à nouveau alors qu’en Europe, on n’est sans doute pas encore arrivé dans le creux de la vague. On sait qu’il n’y aura pas de renouveau avant mai. De toute façon, c’est la production d’été qui fait l’essentiel de l’exercice des compagnies et elle est plus que compromise. S’il y a un regain d’activité, ce sera pour engranger des ventes sur l’automne ou l’hiver. Je pense que personne n’envisage pour l’instant de voyager cet été.

Italie, Norvège, Allemagne mais aussi France. De plus en plus d’Etats envisagent de nationaliser ou de soutenir encore plus fortement les compagnies. Qu’en pensez-vous ?

Jean-Pierre Sauvage : Quand on voit que la France engage 300 milliards d’euros pour aider les entreprises, on se rend compte qu’on est désormais dans une forme de « nationalisation globale » de l’économie. Au niveau européen, 750 milliards d’euros ont été débloqués, et tous les éléments restrictifs quant aux règles budgétaires ont désormais sauté. Bruno Le Maire (ministre de l’Économie et des Finances, Ndlr) le dit, la conjoncture ressemble au krach de 1929. Effectivement il y a des Etats qui se sont positionnés pour soutenir leur compagnie. Je crois qu’ils se rendent bien compte que le transport aérien est stratégique à bien des égards.

Plus globalement, cette période de crise nous permet d’insister sur le caractère essentiel du transport aérien, longuement critiqué ces derniers temps. Et notamment du transport international pour la France. Il permet à des millions de touristes de venir faire du tourisme dans notre pays. Cela représente 50 milliards d’euros, soit un tiers des recettes du tourisme français. Il ne faut donc pas se limiter à une vision franco-française de l’aérien.

Concernant l’après crise, inutile de jouer les oiseaux de malheur. Toutes les compagnies gardent leur réserve pour une hypothétique reprise. Certains parlent d’une nouvelle consolidation dans quelques mois. Je pense qu’elle a déjà été faite. Les compagnies les plus faibles tomberont à nouveau. Ce qui est paradoxal, c’est que c’est au moment où le pétrole est au plus bas que les compagnies ne volent plus.

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