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Stella Cadente : « Nous avons besoin que les touristes reviennent au Maroc »

Après avoir signé la décoration d’hôtels aux quatre coins du monde, la designer Stella Cadente a posé ses bagages au Maroc. Quelques jours après le séisme, elle témoigne de sa préoccupation pour l’avenir de son pays d’adoption, dont l’économie dépend en grande partie du tourisme.

Chez elle aussi, la terre a tremblé. Des fissures sont apparues sur la maison, une partie de l’étage est à refaire. « On ne va pas se plaindre », lâche sobrement la créatrice. Ces dégâts matériels lui semblent bien dérisoires face à la tragédie qui a touché tant de gens. D’après un dernier bilan, plus de 3000 personnes y ont laissé leur vie. Et tant d’autres ont tout perdu.

« Là où la situation est réellement terrible, c’est à une cinquantaine de kilomètres de Marrakech », témoigne Stella Cadente. L’épicentre du séisme qui a frappé le Maroc dans la nuit du 8 au 9 septembre se situait dans la province d’Al-Haouz, au sud-ouest de Marrakech. « Certains villages ont été rayés de la carte. Les habitants n’ont plus rien. » Très vite, un immense élan de solidarité s’est mis en place. Des cagnottes ont été créées pour collecter les dons et soutenir les associations. D’abord pour acheter de la nourriture, des médicaments. Il faut maintenant acheminer des tentes, des matelas et des couvertures.  « Ce que l’on craint désormais, c’est l’arrivée de la pluie, explique-t-elle. Il faut que nous puissions protéger ces gens de l’humidité et du froid. Tout le monde met la main à la pâte, d’une manière ou d’une autre. Il y a une très grosse solidarité dans le pays. Et nous, nous sommes Marocains de cœur, alors nous faisons aussi le maximum. »

« A Marrakech, la vie a repris son cours »

Cela fait plusieurs années que la créatrice vit au Maroc. D’abord à Casablanca, avant de s’installer à une vingtaine de kilomètres de Marrakech, sur la route de l’Ourika. Elle aussi vit du tourisme. Après avoir signé avec son associé Florian Claudel la décoration de nombreux hôtels à travers le monde, elle a ouvert un concept store à Marrakech, dans le quartier de Dar-el-Bacha, l’un des plus prisés des touristes. Un lieu tout entier dédié à l’artisanat marocain. Si quelques édifices déjà fragiles n’ont pas résisté à la secousse, dans la médina, la vie a très vite repris son cours, assure la designer. Dans un communiqué diffusé lundi, le Seto confirme lui aussi qu’à Marrakech, « l’ensemble des infrastructures hôtelières, touristiques et aéroportuaires est opérationnel. » Mais le séisme a porté un brutal coup d’arrêt à l’activité, selon Stella Cadente. « S’il y a encore un peu de touristes, beaucoup sont partis. Les riads se sont vidés d’un seul coup, tout le monde a annulé », nous indiquait-elle quelques jours après la catastrophe. « On a beau expliquer aux gens qu’à Marrakech, la vie est revenue à la normale, que tout est sécurisé, ils ont du mal à nous croire, regrette-t-elle. Un tremblement de terre, c’est un peu comme le Covid, ça engendre des peurs irrationnelles. »

Et de fustiger au passage les chaînes d’infos, consciente de l’impact que cela risque d’avoir sur la fréquentation touristique. « Chacun à son petit niveau fait ce qu’il peut pour rassurer les gens sur la réalité de la situation, mais il faudrait que les grosses chaînes de télévision qui harcèlent toujours avec les mêmes images pour faire du sensationnalisme arrêtent. C’est complètement contre-productif pour le pays. Les gens vont se trouver enfermés dans une pauvreté qui sera difficile à surmonter. » 

« Nous sommes très inquiets pour la suite, avoue-t-elle. Nous avons besoin que les touristes reviennent. Je me joins à l’appel qui a été lancé aux touristes par plusieurs personnalités. Surtout ne partez pas et revenez vite parce que nous avons besoin de vous pour nourrir les gens, les aider à se reloger, pour soutenir l’artisanat marocain. » A Marrakech, la designer relooke aussi des riads que les propriétaires aménagent en chambres d’hôtes. Suite au séisme, trois de ses clients ont préféré annuler les travaux, anticipant des mois difficiles pour l’activité touristique.

« Le Covid a asséché tout le monde financièrement »

Si les touristes désertent la destination, cela risque bien d’être la crise de trop, après celle du Covid. La crainte est dans tous les esprits. « Ici, il n’y a pas eu d’aides comme il y a pu en avoir en France, rappelle Stella Cadente. Là encore, la résilience et l’entraide ont joué à plein, mais le Covid a asséché tout le monde financièrement, aussi bien les petits artisans que les gens qui travaillaient dans le tourisme, ça a été très difficile. De notre côté, nous avons continué à payer nos salariés pendant toute la durée de la crise sanitaire, nous savions pertinemment que si nous arrêtions, ils n’avaient plus rien pour vivre. Et au moment où ça commençait enfin à repartir correctement, il y a ce tremblement de terre. » 

Des voix de professionnels se sont aussi élevées pour appeler à soutenir la destination. « Nous sommes tous Marocains, lançait il y a quelques jours Lionel Habasque, le PDG de Terres d’Aventure dans un communiqué. (…) Il est essentiel de retourner au Maroc. Pour sa beauté mais surtout car, pour se reconstruire, les Marocains auront plus que jamais besoin du tourisme, un secteur qui emploie 10% de la population. » Terres d’Aventure a décidé de soutenir, via sa fondation, l’association Cœur et Act recommandée par ses équipes locales. Respire, de son côté, a choisi de s’engager en lançant un appel à projets pour soutenir les professionnels locaux. Les initiatives se multiplient. « Nous prouverons une fois encore que le Maroc est debout et qu’il le restera » : sur sa page Linkedin, l’OMNT a diffusé ce mardi un message pour rassurer touristes et professionnels.

Le FMI débloque 1,3 milliard de dollars

Pour faire face aux conséquences du séisme, le FMI a de son côté annoncé lundi un prêt de 1,3 milliard de dollars au Maroc, informe le site Econostrum. Aux côtés de la Banque mondiale, le FMI a également confirmé le maintien de leurs réunions annuelles au Maroc, du 9 au 15 octobre prochain à Marrakech. La décision devait être prise après « étude de la capacité du pays à accueillir la rencontre ». Pour le chef du gouvernement marocain, Aziz Akhannouch, l’annulation aurait eu un effet « assez dévastateur » pour le secteur hôtelier, rapportent les médias locaux. Un signal positif pour la destination, estime Stella Cadente. « Pour le moment, les touristes ne sont pas encore revenus, nous indiquait-elle ce mardi matin. Mais on perçoit, grâce à cette annonce, que les craintes commencent un peu à s’estomper. »

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1 commentaire
  1. Jean Balandras dit

    Nous ne pouvons qu’être d’accord avec Stella Cadente. Il faut témoigner sans cesse pour convaincre les hésitants que la vie reprend son cours à Marrakech, qui par ailleurs n’a pas subi de trop gros dégâts. Bien sûr nous avons fait partie de ces gens qui ont failli annuler leur séjour, moins par peur que par crainte de paraître indécents en venant en villégiature à Marrakech dans un tel contexte.
    Mais, comme le dit très bien Stella Cadente, le tourisme est crucial pour cette region et ne pas venir rajouterai encore plus à leur malheur. Nous avons donc maintenu notre séjour.
    Il faut garder néanmoins une pensée forte pour ceux qui ont tout perdu et espérer que tout soit mis en oeuvre pour leur sécurité.
    Le Maroc est un peuple optimiste, résilient et solidaire.
    Ne doutons pas qu’il se relève encore plus fort de cette épreuve.
    Jean

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