L’office du tourisme doit évoluer vers un service de conciergerie, selon Jean Viard
A travers l’exemple de Paris, le sociologue Jean Viard évoque l’évolution de la mission de l’office du tourisme. Et il défend la nécessité de maintenir une forme de conciergerie de destination, dans une grande ville, capable d’aider le visiteur.
L’Office du tourisme Paris a décidé de fermer son dernier bureau d’accueil touristique. Bonne ou mauvaise décision ?
Jean Viard : En France, nous avons créé beaucoup trop de structures, qui nous coûtent extrêmement cher de manière générale. Donc, nous sommes dans une phase où nous allons supprimer des tas de services. En soi, je trouve que c’est plutôt positif. Si les gens n’y allaient pas, cela ne servait à rien (de le maintenir). Je suis plutôt pour la débureaucratisation, c’est la seule chose que j’aime chez Elon Musk…
Paris a eu les Jeux olympiques, donc de toute façon, la ville va être submergée de touristes dans les années qui viennent. La destination ne sera pas du tout en manque de visiteurs. La question sur laquelle il faut travailler maintenant, c’est le récit de ces voyageurs, quand ils vont rentrer chez eux. Le visiteur américain sera-t-il content ou pas ? Donnera-t-il envie à ses proches de voyager ?
Il faut raisonner en termes de conciergerie, pour répondre aux problèmes spécifiques des touristes : comme trouver un médecin ou un service de baby-sitting.
Quel est le rôle de l’office du tourisme vis-à-vis du visiteur ?
Jean Viard : Tout dépend des territoires bien sûr. Si vous voulez mettre un territoire en tourisme, il faut alors créer des points d ‘accueil. Cette situation n’est évidemment pas celle de Paris. Le visiteur n’a pas besoin d’un office de tourisme pour les horaires du Louvre, c’est déjà sur son téléphone. Il faut raisonner en termes de conciergerie, pour répondre aux problèmes spécifiques des touristes : comme trouver un médecin ou un service de baby-sitting. Comment, non pas expliquer la ville, mais répondre à des questions du quotidien, quelle que soit la langue du voyageur. L’idée, c’est aussi de répondre au désarroi de quelqu’un qui s’est fait voler son sac, par exemple. Et ce service peut être virtuel.
L’Office du tourisme de Paris prévoit justement une conciergerie, totalement digitale…
Jean Viard : Spontanément, il me semble un peu bizarre qu’il n’y ait aucun lieu où se rendre dans une ville comme Paris quand on fait face à un problème. Je pense donc à un tiers lieu par exemple, dans lequel le touriste peut poser des questions, en anglais ou en chinois. Des questions qui n’ont rien à voir avec les visites touristiques, mais qui aident une personne pendant son séjour. Si je vais à Rome ou à New York, je suis content de savoir qu’il y a un endroit où je peux aller en cas de problème.
Alors, à New York, justement, l’office du tourisme n’a plus de bureau d’accueil touristique…
Jean Viard : Alors il faut peut-être considérer que ce type de lieu est périmé… Le problème, c’est que tout ça a été créé quand les gens ne savaient pas voyager. Ils n’avaient pas les codes. Maintenant, les gens ont la culture du voyage, ils se débrouillent, ils se servent du numérique. Et donc, peut-être ces lieux ne servent-ils plus à rien, effectivement.
En conclusion, quelle est votre opinion sur les bureaux physiques des offices de tourisme ?
Jean Viard : Peut-être faut-il les fermer. Quand une destination est très connue, faire la seule promotion ne sert à rien. La destination a déjà plutôt trop de monde. Il faut alors beaucoup plus travailler sur la question de « comment organiser les flux dans le temps et dans l ‘espace ».
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