Retrouvez l'actualité du Tourisme pour les professionnels du secteur tourisme avec l'Echo Touristique : agences de voyages, GDS, prestataires spécialisés, voyagistes

Grégory Mavoian (Manor) : « Notre modèle économique doit changer, c’est une question de survie »

Comment préserver son activité en tant que professionnel du voyage d’affaires alors que les coûts de distribution dérapent ? Grégory Mavoian, président de Manor, évoque plusieurs pistes dans une interview à L’Echo touristique, à la veille du congrès annuel du réseau.

L’Echo touristique : Qui est Manor aujourd’hui ?

Grégory Mavoian : Notre réseau de distribution regroupe 320 agences de voyages, pour un volume d’affaires de 1,4 milliard d’euros en 2019. Nous sommes particulièrement identifiés comme des spécialistes du voyage d’affaires, même si la plupart de nos membres développent une activité mixte. Manor, c’est aussi le seul réseau en France qui reverse à ses adhérents l’intégralité des incentives et commissions fournisseurs – soit des millions d’euros chaque année. C’est même la pierre angulaire la construction de notre réseau. Le réseau n’a pas vocation à devenir riche, il est voué à enrichir ses adhérents. Pour son développement, nous comptons faire des campagnes de recrutement afin d’attirer de nouvelles agences.

GBTA prévoit la reprise mondiale et totale du voyage d’affaires au niveau pré-Covid en 2026. Et vous ?

Grégory Mavoian : Le début de l’année 2022 n’est pas très représentatif de notre dynamique actuelle. La fin de l’année l’est bien davantage. La reprise d’activité est soutenue. Le marché se situe à environ à 80%-85% de la période pré-Covid. Certains de nos membres sont déjà au-dessus du niveau de 2019. Je suis plus optimiste que 2026. Pour moi, 2023 et 2024 seront de bonnes années pour les déplacements professionnels. Nous aurons aussi des enjeux touristiques importants en France, avec la Coupe du monde de rugby et les JO 2024.

Je pense qu’en 2024, nous retrouverons les niveaux pré-Covid.

Donc, serons-nous revenus à des niveaux pré-Covid en 2023 ou en 2024 ?

Grégory Mavoian : Je pense qu’en 2024, nous serons revenus au niveau de 2019 même si c’est toujours compliqué de se projeter loin dans le temps. Nous ne sommes jamais à l’abri d’une guerre – comme nous pouvons le voir en Ukraine mais aussi en Arménie – d’une pénurie de carburant, etc. Le niveau de reprise dépend également de la capacité de nos collaborateurs à performer. Chez Manor, nous avons des adhérents de qualité, qui font mieux que le marché.

Le congrès Manor se déroule à Aix-en-Provence du 11 au 13 novembre. Quel est le modèle économique d’avenir des agences, lequel sera au cœur des débats ?

Grégory Mavoian : Le modèle économique des agences est dicté par le marché. Sommes-nous arrivés à la fin d’un cycle ? C’est la question que nous allons nous poser au sein de Manor. Au mois d’avril 2005 (avec la commission 0 d’Air France, NDLR), nous sommes passés des management fees aux transaction fees. Dix-sept plus tard, tous les acteurs s’accordent à dire que nous sommes au bout de ce cycle, et qu’il est important de se renouveler.

Notre écosystème est bousculé par un éclatement croissant de l’offre, en dehors de nos outils habituels. Ce qui vient dégrader la productivité de nos équipes. En outre, nous étions auparavant payés pour distribuer. Aujourd’hui, nous payons pour distribuer… C’est un changement fondamental.

Notre priorité, c’est d’avoir l’exhaustivité de l’offre. Nous ne pouvons pas être moins bien outillés que les voyageurs d’affaires en termes de produits et de tarifs. Autre point important, nos coûts technologiques et salariaux augmentent au-delà de l’inflation, alors que les commissions baissent. L’équation ne fonctionne plus. Donc, comment la profession peut-elle survivre ? Notre modèle économique doit obligatoirement changer. C’est une question de survie.

Manor va beaucoup travailler sur le pilotage en temps réel des ventes. Nous allons sans doute mieux vendre certains partenaires, d’autres moins bien. 

Vos coûts de distribution augmentent, les revenus baissent. Comment faire ?

Grégory Mavoian : Plein d’options sont envisageables. Nous sommes en discussion avec l’ensemble des acteurs du marché sur le sujet. Faut-il revenir (davantage) au modèle des commissions ? Faut-il changer le statut des mandataires ? Faut-il appliquer une surcharge quand le producteur dégrade notre productivité ? Doit-on avoir une offre de tarifs nets packagés comme dans d’autres activités comme le tour-operating ou les événements sportifs ? Faut-il revenir au management fees ? Toutes les options sont sur la table et c’est effectivement le thème du congrès, pour examiner celle qui pourrait représenter le futur.

Le retour aux commissions, les compagnies aériennes ne l’accepteront jamais…

Grégory Mavoian : Je crois que tout le monde a besoin de preuves. Ce que les compagnies aériennes et les autres producteurs attendent, c’est le pilotage de nos ventes. Le sujet est clé. Manor va justement beaucoup travailler sur le pilotage en temps réel des ventes (à travers une solution technologique, NDLR). Nous allons sans doute mieux vendre certains partenaires, d’autres moins bien. 

Les comportements de consommation évoluent également. C’est la raison pour laquelle, pour la première fois, nous avons invité de nombreux réceptifs au congrès. Nous allons par ailleurs annoncer de nouveaux services pour les adhérents. Le social, c’est un autre sujet clé. Au regard des difficultés de recrutement dans la profession, nous lançons la Manor Académie. Ce sera un programme de formation agréé par l’Etat, avec des classes dédiées au réseau. Dans ce cadre, nous garantirons l’embauche.

A lire aussi : Congrès Manor : le modèle économique des TMC en question(s)

Laisser votre commentaire (qui sera publié après moderation)

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Dans la même rubrique