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Contrôle aérien : une modernisation sous haute tension

C’est avec une certaine transparence que Florian Guillermet, directeur de la Direction des services de la Navigation aérienne (DSNA), a fait le point sur l’ambitieux plan de modernisation du contrôle aérien en France.

« Nous avons une navigation aérienne en France qui n’est pas très performante, et qui est surtout très en retard sur son calendrier de modernisation », a rappelé Florian Guillermet, directeur de la DSNA, lors de la conférence du BAR France, le 6 février.

La France (très) en retard

A l’heure où nous parlons d’intelligence artificielle, les contrôleurs aériens travaillent toujours… avec des bandelettes de papier sur lesquelles sont notées des informations et autres instructions pour les pilotes. Le nouveau logiciel 4-Flight permet tout simplement de digitaliser le procédé en France, un pays à la traîne. « Les outils électroniques sont déployés depuis une bonne vingtaine d’années dans la plupart de nos voisins européens. » Ce retard à l’allumage rend plus compliquée l’informatisation, puisque le trafic a fortement progressé depuis.

Le plan de modernisation, L’Echo touristique en a déjà largement parlé. Pour gérer les 3 millions de mouvements aériens annuels, dont 60% de survols, le contrôle aérien français est divisé en cinq Centres en route de la navigation aérienne (CRNA). Un à Reims, un à Aix-en-Provence, un à Brest, un à Bordeaux et le dernier, le plus important, à Athis-Mons près d’Orly. C’est celui d’Athis-Mons qui vient de tester le logiciel 4-Flight, du 9 janvier au 5 février, avant une mise en place définitive le 5 novembre 2024. Le basculement de ce centre, qui gère les aéroports de CDG, Orly, Beauvais et Le Bourget, représente un exercice de très haute voltige. 

Des vols supprimés en fin d’année 2024 ?

Afin de le préparer, la DSNA a opéré une série de tests dans la région parisienne dès le mois d’octobre 2023. La dernière expérimentation, terminée la semaine dernière donc, a entraîné l’annulation de très nombreux vols. Les prochaines auront lieu en mars et en avril, sur 2 ou 3 jours, avant une longue pause en raison des Jeux olympiques. Des essais se dérouleront pendant quelques jours au mois d’octobre. La grande bascule reste programmée au mois de novembre.

Jean-Pierre Sauvage, le président du BAR, n’a pas caché l’inquiétude des compagnies aériennes, puisque le basculement du centre d’Athis-Mons interviendra juste avant les vacances de Noël. « Nous souhaiterions un éventuel petit report dans la mise en application » pour éviter « des annulations à chaud puisqu’il subsiste des grains de sable dans le système », a souligné Jean-Pierre Sauvage lors de la conférence du BAR.

Tout en restant ouvert à la discussion, Florian Guillermet a confirmé le calendrier. D’autant plus que d’autres centres attendent à leur tour leur modernisation… « Tous les voyants sont au vert pour prévoir un basculement tel que prévu, en novembre. Mon avis personnel, c’est que nous devons garder cette date, puisque nous avons pris toutes les précautions. En revanche, je ne peux pas vous garantir un risque zéro avec ce genre de manipulation. On a forcément un risque et des besoins d’adaptation qui seront nécessaires pour la période des vacances de Noël 2024. »

Contrôleurs aériens : une vague de départs à la retraite

Florian Guillermet a également mentionné le manque d’attractivité du métier de contrôleur aérien et des problèmes RH à venir. Evoquant une situation de « sous-effectif latent et permanent ».

« Il faut absolument qu’on transforme, aussi, notre socle social pour avoir les forces de contrôle au bon moment au bon endroit. » La DSNA a entrepris « un dialogue social » sur « des dispositifs d’attractivité pour fidéliser les contrôleurs, et pour réduire le temps de formation en France qui est extravagant ». Dans l’Hexagone, la formation dure 5 ans, contre 2,5 à 3 ans en moyenne en Europe.

L’objectif ultime est de recruter massivement. Il y a urgence. Entre 2028-2033, un tiers des contrôleurs aériens vont partir à la retraite.

La réduction de la formation ne doit toutefois pas s’opérer au détriment de la qualité. Après un accident évité de justesse à Bordeaux, un rapport sur les contrôleurs aériens tire la sonnette d’alarme. « Nous avons un plan d’action correctif »  « pour que ce type d’événement ne se reproduise pas. » Evoquant au passage le fait que « certains contrôleurs s’octroient de petites libertés par rapport aux horaires de travail »…

Eté 2024 : les contrôleurs doivent se déclarer en grève

L’année 2023 avait été marquée par des grèves en lien avec réforme des retraites. La DNSA a comptabilisé une soixantaine de mouvements, qui ont duré jusqu’à l’été.

Ce qui change, par rapport aux 40 dernières années, c’est la loi imposant désormais une déclaration préalable des contrôleurs aériens qui veulent faire la grève. C’est « un marqueur fort dans l’histoire de la navigation aérienne » et « ce sera un élément transformateur ». La loi a été promulguée le 28 décembre 2023

Toutefois, prévient Florian Guillermet, « il ne faut pas s’attendre à des miracles. Beaucoup de choses doivent être mises en œuvre pour que cela se passe bien lors des prochains mouvements ».

L’été, les différents centres en route de la navigation aérienne gèrent 10500 à 11000 vols par jour, contre 6000 vols en janvier.

Moins de retards prévus à Nice

Pour le directeur, la meilleure gestion des pics de trafic passe par des réformes au niveau de l’accord social avec les contrôleurs aériens. « Nous étions au maximum des curseurs l’été dernier dans le cadre actuel, fixé dans un arrêté qui date de 2003. Donc, les choses n’ont pas tellement évolué depuis une vingtaine d’années, il faut les faire bouger. Nous sommes en train de nous y atteler avec le directeur général pour obtenir un nouvel accord social qui nous donne plus de flexibilité et nous permette d’engager les capacités de contrôle quand et où nous en avons besoin. »

En attendant, l’été 2024 devrait se dérouler dans des conditions analogues à l’été 2023, soit un niveau « plutôt moyen » de ponctualité. L’été dernier, Nice, Orly et Roissy-CDG ont été les aéroports qui ont enregistré le plus de retards. L’équation devrait être meilleure sur Nice l’été prochain.

Le transport aérien français, lui, n’a pas fini de se transformer. Après les CRNA, il faudra moderniser les 80 tours de contrôle qui, elles aussi, travaillent avec des bandelettes en papier.

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