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À Bagdad, Aigle Azur espère le retour aux affaires

En étant la première à rouvrir une ligne directe entre l’Europe et la capitale irakienne, la compagnie française espère capter un trafic business que l’amélioration des conditions de sécurité et l’étendue des marchés à conquérir dans le pays devraient booster.

Le fusil-mitrailleur est à portée de main, coincé contre le siège du chauffeur. Les consignes sont strictes : interdit de sortir du 4 x 4 blindé sans son autorisation ni sa protection. Le convoi de véhicules file à toute allure sur la route qui relie l’aéroport au centre de Bagdad. Autrefois surnommée la « Route de la mort », elle était, il y a encore deux ans, considérée comme l’une des plus dangereuses du monde. Mais les choses ont bien changé : protégée par des murs anti-explosion et une armada de gardes armés aux couleurs de Group 4 Securicor, la société britannique qui a remporté le contrat de sécurisation des lieux, la zone est devenue la plus sûre de la capitale irakienne. Dans l’ensemble de la ville, le déploiement de force de l’armée et de la police demeure, lui aussi, impressionnant. Blindés, miradors, postes de mitrailleuses, chars en position : à l’approche de la Zone verte, le coeur ultrasensible de la capitale, où la plupart des ambassades et des organisations occidentales sont installées, Bagdad continue de ressembler à une ville assiégée. Depuis l’aéroport, il faut franchir pas loin d’une dizaine de check points pour accéder à la zone, cernée et parcourue de kilomètres de T-Walls, ces palissades de béton destinées à protéger des attentats. Pour les habitants de la ville autorisés à y entrer, cela peut prendre des heures. Même les convois encadrés par des blindés de la police ne sont pas à l’abri d’un contrôle de fond en comble. Principales cibles des attaques terroristes, les forces de sécurité restent sur les dents.

DEUX ROTATIONS PRÉVUES PAR SEMAINE

Dans l’ensemble, la situation sécuritaire s’est pourtant largement améliorée dans le pays depuis un an et demi. De 200 au plus fort de la crise, le nombre d’attentats quotidiens est tombé à une dizaine. « Nous avons atteint un seuil acceptable pour faire venir des hommes d’affaires », affirme Frédéric Gallois, ancien patron du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale, aujourd’hui directeur de la société française Galice Security. Une amélioration des conditions sur laquelle Aigle Azur a décidé de parier. D’ici moins de trois mois, la compagnie sera la première dans toute l’Europe à reprogrammer la desserte de la capitale irakienne (supprimée il y a vingt ans lors du déclenchement de la première guerre du Golfe), au nez et à la barbe de concurrentes comme Lufthansa, qui y pense aussi depuis plusieurs mois. Dimanche 31 octobre, le vol inaugural a servi de ballon d’essai, et surtout de joli coup de pub. À la veille de l’ouverture de la Foire internationale de Bagdad, une soixantaine de patrons et presque autant de journalistes, accompagnés d’Anne-Marie Idrac, la secrétaire d’État chargée du Commerce extérieur, avaient embarqué dans l’avion. Opérés par un A 319 de 144 places, les sièges devraient être mis en machine d’ici fin novembre, pour un démarrage de l’exploitation en janvier, à raison de deux rotations par semaine, sans doute les lundis et jeudis, et pour un tarif aller-retour supérieur à 1 000 E en classe économique. Mais y a-t-il un potentiel de clients suffisant pour faire vivre la ligne ?

AVEC LE SOUTIEN DE L’AMBASSADE

« On sait que la première année, on va perdre de l’argent, reconnaît Meziane Idjerouidene, le vice-président du conseil de surveillance d’Aigle Azur. Il y a une vraie demande. C’est un vol à vocation affaires, mais nous comptons aussi sur un trafic touristique d’Irakiens souhaitant voyager en Europe. » Et puis la compagnie espère profiter de son statut de précurseur européen pour capter d’autres clientèles occidentales. « Si nous avons choisi de nous positionner à Roissy, alors que notre base principale est à Orly, ce n’est pas pour rien », poursuit-il, reconnaissant que des discussions sont en cours avec plusieurs compagnies, dont Air France, pour des accords de pré-acheminements et de partage de code. Il y a au moins un soutien indéfectible dont la compagnie peut être sûre, c’est celui de Boris Boillon, le jeune et télégénique ambassadeur de France à Bagdad. Dimanche dernier, il n’a eu de cesse de le répéter : « Les entreprises françaises qui veulent faire des affaires peuvent et doivent revenir. » Et pour cause : les exportations tricolores dans le pays représentent à peine 1,5 % des placements étrangers, alors que les marchés à conquérir sont énormes. Selon les chiffres de la Mission économique de l’ambassade, elles auraient cependant grimpé de 65 % au premier semestre 2010. Est-ce le début d’un réveil ?

UN CENTRE D’AFFAIRES TOUT CONFORT

Dans le compound sécurisé, une ancienne base de l’armée américaine au coeur de la Zone verte, qui les accueille durant la Foire internationale de Bagdad, beaucoup d’entrepreneurs français confient ne pas avoir encore démarré leur activité. « Je viens surtout pour recueillir les attentes et les besoins », explique par exemple Pierre Galzot, directeur général d’A-EMC, une société spécialisée dans l’assistance médicale. Pour leur faciliter la tâche, la France a fait construire un centre des affaires tout confort : chambres avec baignoire jacuzzi, piscine, restauration, service d’interprétariat, business center… Le tout situé en face de l’ambassade, dans une rue ultra-sécurisée mais située hors de la Zone verte, rendant les déplacements moins longs et moins compliqués. C’est aussi dans cette zone dite rouge que Bagdad livre son visage de ville presque ordinaire : des magasins, une fête foraine, un match de foot sur les bords du Tigre… Mais dimanche dernier, alors que l’avion d’Aigle Azur redécollait pour Paris, une prise d’otage dans une église chrétienne s’achevait dans un bain de sang, rappelant que la capitale irakienne reste l’une des villes les plus dangereuses de la planète.

« Nous comptons aussi sur un trafic touristique d’Irakiens souhaitant voyager en Europe »

Aigle Azur, précurseur européen, espère bien capter d’autres clientèles occidentales

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