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Quatre portraits de femmes dirigeantes

À l'occasion de ce numéro spécial, L'Écho touristique donne la parole à quatre femmes managers. De profils et de styles différents, elles racontent leur parcours, leurs contraintes mais aussi leurs satisfactions. Et livrent quelques conseils…

Élise Bras, fondatrice et directrice de l'agence Une balade à vélo
«J'ai créé mon agence de voyages à vélo à 24 ans, en 2013, dès mon diplôme de l'École Supérieure de Commerce de Rennes en poche. Cela me trottait dans la tête depuis qu'en 2011 j'avais essayé, pour mes vacances, d'organiser une virée cyclotouriste en Bretagne sans trouver de professionnel pouvant inclure le transport de bagage d'une étape à l'autre. Est-ce que je me suis posé des questions parce que j'étais jeune et en plus une fille ? ça non ! J'ai bien le temps de rejoindre une grande entreprise. Aujourd'hui, je n'ai aucune contrainte, pas d'enfant et surtout, rien à perdre. Même si Une balade à vélo, créée sous forme de SAS – une formule plus intéressante que l'URL pour s'ouvrir à des financements -, ne se développait pas comme je l'espère, ce sera une bonne expérience sur mon CV. Mon projet était bien ficelé, j'étais crédible en termes de formation puisque la gestion et la vente sont ma partie. La banque à laquelle je me suis adressée pour un emprunt, minime, m'a fait confiance. J'ai complété avec un peu de «family founding» et les démarches d'immatriculation avec Atout France n'ont pas posé de problème. Je dirais qu'être une jeune femme m'a plutôt servi. Plus qu'un handicap, c'est un atout dont j'ai joué. Ça a interpellé et plu à mes interlocuteurs qui m'ont trouvée audacieuse et motivée. En revanche, ce qui m'énerve par-dessus tout, c'est de continuer à recevoir des courriers adressés à «M. le directeur». Pas facile de faire changer les mentalités !»

Marianne Chandernagor, directrice de salons, Comexposium
«Je suis rentrée jeune diplômée il y a 13 ans chez Comexposium à un poste de chargée de communication. J'ai rapidement gravi les échelons : à 25 ans, j'étais devenue responsable d'un service. Ensuite on m'a confié la direction des salons Mahana puis Tourissima, le SMT et enfin deux salons des seniors. J'ai la chance d'être dans une entreprise qui fait confiance aux jeunes et aux femmes. Mais la chance on la provoque aussi. À un moment, je me suis posée la question de savoir si j'étais capable de relever le défi qu'on me lançait et j'ai osé. Les femmes doivent avoir confiance en elles, arrêter de se poser des questions. Est-ce que les hommes le font ? Il faut prendre le train en marche car il ne se présente pas deux fois. En plus, dans le tourisme et l'événementiel, la mobilité est une vraie problématique et un frein à beaucoup de carrières. Pour que les femmes puissent progresser, il faut aussi que les hommes investissent la sphère familiale, que les tâches soient bien réparties, et qu'ils acceptent que l'on puisse parfois mieux gagner notre vie qu'eux. Dans mon métier, être une jeune femme a toujours été une force. En général, les a priori du début se transforment vite sous réserve d'avoir un discours professionnel, rationnel et réfléchi. L'événementiel demande aussi beaucoup de rigueur, de gestion de dossiers et d'anticipation. Les femmes ont ces qualités. Mais il y a encore un gros boulot à faire dans l'ascension des femmes à des postes à responsabilité. Le mouvement naturel est très lent, les lois sont essentielles»

Magali Boisseau Becerril, présidente fondatrice de BedyCasa
«BedyCasa est parti d'un blog créé en 2007, pour lequel nous avons mis cinq ans à trouver le financement. Je n'ai pas ressenti de discrimination lors de mes recherches de fonds par rapport à ma condition de femme, mais beaucoup plus vis-à-vis de mes origines : je ne venais ni de Paris, ni d'une grande école de commerce. J'ai passé un Master de Commerce International à Avignon. Après avoir beaucoup voyagé, depuis l'âge de 14 ans, la création de la plate-forme de chambres chez l'habitant BedyCasa m'est vite apparue évidente. Mon équipe est aujourd'hui composée de 14 personnes, qui sont à 60% des femmes. Jusqu'à la fin 2011, j'étais seule avec mon associée Estelle. Nous continuons à rédiger toutes les deux les cahiers des charges du site. Nous sommes complémentaires, nous avons une bonne connaissance de nos clients, grâce à notre démarche empathique. Les femmes ont des qualités naturelles d'écoute. En général, elles savent aussi moins se mettre en avant. Ce sont des planificatrices. Je n'aime pas mettre en opposition les hommes et les femmes. Mais le monde du tourisme compte beaucoup de femmes exécutantes. Il manque des femmes dirigeantes, dans lesquelles nous devrions avoir confiance, auxquelles nous devrions confier des prises de décision. Cette remarque vaut aussi pour le web. Le secteur reste une institution très formatée, avec des modes de fonctionnement classiques dans les entreprises et dans les écoles. Mais les mentalités changent, doucement. Nous sommes sur la bonne voie»

Françoise Gri, directrice générale du Groupe Pierre et Vacances-Center Parcs
«Avant de rejoindre le secteur du tourisme, j'étais chez IBM France, un monde très techno où il y a moins de 20% de femmes à l'embauche. Mais comme elles sont rares, on y prête plus attention. Quand vous êtes en minorité, c'est un avantage car vous pouvez être repérée plus facilement. Ensuite, j'ai rejoint Manpower France, un secteur de services comme le tourisme. Le sujet de la place des femmes dans l'entreprise me tient particulièrement à coeur car des progrès sont faits mais on n'y est pas encore. La diversité est longue à mettre en place et le modèle de leadership a des racines profondes. Je suis persuadée que les entreprises n'arrivent à se transformer qu'avec des contributeurs et des leaders différents dans leurs rangs et les femmes en font partie. Avec la nouvelle génération, on devrait y arriver. Il y a beaucoup de jeunes patrons sensibles à ces sujets. Les mentalités évoluent. On voit que dans les jeunes couples, des progrès sont faits. Car une des plus grandes difficultés des femmes qui veulent accéder à un poste de direction, ce n'est pas de faire face à des comportements machos stupides ou à des stéréotypes, c'est de trouver un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle. Pour ne pas se limiter dans leurs ambitions, les femmes doivent investir dans la logistique et garder en tête ce qui est important pour elles. Les normes, on doit les décider soi-même et ne pas culpabiliser. Il y a des sacrifices à faire pour s'assurer une sérénité et une harmonie. Mais cela en vaut la peine»

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