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Pierre et Vacances/Center Parcs : la lettre ouverte de propriétaires de cottages

Suite à notre interview de Franck Gervais, le directeur général de Pierre & Vacances/Center Parcs, l’association de défense des copropriétaires du Domaine des Hauts de Bruyères (ADICDHB) nous a fait parvenir une lettre ouverte que nous publions intégralement.

« À messieurs Gérard Brémond et Franck Gervais et au Cabinet Abitbol&Rousselet

En charge de la conciliation du groupe Pierre & Vacances/Center Parcs

« Nous ne serons pas les moutons de Panurge que l’on mène à l’abattoir »

L’article de Monsieur Gervais, publié dans L’Echo touristique le 16 février 2021, amalgamant fort opportunément les impacts de la crise Covid pour justifier qu’il ne pourrait plus payer les loyers d’avant, nous oblige à publier cette lettre ouverte.

Nous avons analysé les comptes de votre groupe depuis 1999 et nous en tirons quelques enseignements clés.

1. La fermeture des résidences de tourisme : 700 millions de pertes a minima pour le groupe. Le PGE de l’Etat de 240 millions d’euros sera bien insuffisant. Nous ne sommes pas responsables de cette situation. C’est à l’Etat et aux collectivités de trouver les solutions pour isoler les impacts de cette crise et ne pas précipiter les acteurs économiques à la faillite. Compter sur les propriétaires bailleurs pour rembourser vos dettes est tout simplement une illusion au regard des sommes dont nous parlons. L’accumulation de pertes depuis 10 ans, eu égard aux erreurs dans la gestion économique de l’entreprise vous a fragilisé. Il n’est pas certain qu’une entreprise sorte en bonne santé de cette crise alors que dire de celle qui n’allait pas bien avant.

2. A la période faste de 10 années entre 1999 et 2099, vous avez enchaîné 10 ans de pertes entre 2009 et 2019. Sur les comptes publiés sur l’exercice 1999-2000, le groupe fait état d’un chiffre d’affaires de 506 millions d’euros, d’un résultat net positif de 36 millions. Le groupe n’avait que 53 millions de dettes pour des fonds propres de 108 millions. Une situation très saine. Sur la période cumulée de 1999 à 2009 avec le rachat des Center Parcs, vous avez généré 11,3 milliards de chiffre d’affaires. Les résultats ont été très positifs : + 785 millions en résultats d’exploitation, + 503 millions de résultats nets. Les fonds propres se sont accrus de 383 millions pour une dette, qui elle, n’a progressé que de 108 millions. L’excellente rentabilité des domaines Center Parcs – trois fois supérieure à celle de vos résidences historiques – (10% pour les Center Parcs contre 3 % pour les résidences) est à l’origine de cette forte amélioration de vos résultats. Tout se gâte sur la période 2009 à 2019. Vous générez en cumul 14,2 milliards de chiffre d’affaires. Les résultats sont négatifs + 89 millions en résultats d’exploitation mais -232 millions de résultats nets. Les fonds propres diminuent de -240 millions et la dette s’accroît de 169 millions. C’est le temps de l’expansion non maîtrisée, des projets pharaoniques : celui de l’Oasis de Noria au Maroc, celui du développement en Chine du concept Center Parcs avec le Chinois HNA, celui du Center Parcs à Roybon … Tous ces projets abandonnés combien ont-ils coûté ? Dans votre publication de comptes 2019-2020, vous avez passé en pertes et profits 133 millions d’euros dont 61,4 millions au titre des abandons de projets. Tous cela c’était avant la crise du Covid. Au 30 septembre 2019 vous aviez 330 millions de dettes, combien de ces dettes ont été générées par des choix malheureux dont nous, les propriétaires, ne sommes pas responsables ?

3. Qu’avez-vous fait de la cash machine que sont les Center Parcs ? Vous avez racheté en deux temps l’intégralité des 10 domaines historiques de Center Parcs, 50% en 2001 et 50% en 2003. Ces domaines généraient, au moment du rachat, de l’ordre de 520 millions de chiffres d’affaires pour une rentabilité d’exploitation de l’ordre de 72 millions, soit une rentabilité de plus de 13%. Vous avez acheté au prix de 672 millions d’euros et par le jeu d’une vente à la découpe, vous avez encaissé plus d’un milliard d’euros, vous permettant de dégager une très belle plus-value immobilière ! – Revente en 2002 à Jesta Capital des murs des parties communes (dôme…) des Center Parcs des Bois Francs et Haut de Bruyères pour 159 millions d’euros. – Revente en 2006 au fonds de pension Blackstone des murs de 7 Center Parcs pour un montant de 630 millions d’euros en contrepartie d’un bail commercial. – Revente entre 2009 et 2012 des 1 600 cottages rénovés des Bois Francs et des Hauts de Bruyères pour une valeur, estimée par nous, de 240 millions d’euros (travaux de rénovation non compris). En 2019, Blackstone revendra à Aroundtown SA sept parcs de vacances Center Parcs Europe pour environ 1 milliard d’euros. En outre, le contrat de location signé avec Pierre & Vacances pour les 7 parcs cédés avait été prolongé pour 15 ans, ce qui était déjà considéré par certains comme un préalable à une vente éventuelle, la longueur du bail assurant le rendement à long terme. Quelles ont été les conditions de ce renouvellement de bail pour qu’un acteur mette 1 milliard sur la table pour 7 parcs ?!

Le 25 septembre 2008, vous créez la société Center Parcs Resorts France abritant les domaines français des Center Parcs. Elle est dotée en 2011 de 100 millions de fonds. 100 millions de fonds propres pour 4 domaines dont les deux historiques (Bois Francs et Haut de Bruyères) eu égard à la valorisation de plus de 1 milliard tiré de la vente à la découpe des 10 domaines ! Sur quelles bases se sont faites les évaluations d’actifs ?! Le contrat sur lesquels se sont engagés de nombreux petits propriétaires était : – Le modèle économique des Center Parcs est rentable donc pérenne. – Le rendement important de 4 % est la contrepartie d’un prix de vente des cottages surcoté qui a, de fait, généré votre plus-value.

« C’est un peu comme si nous avions fait par la surcote à l’achat une avance de trésorerie au groupe PVCP et qu’il nous rendait cette avance pendant la durée du bail par un loyer plus important » : on ne peut dissocier les deux versants du montage Monsieur Gervais. Le 21 janvier 2021 vous avez décidé, en qualité d’associé unique de réduire le capital de la société Center Parcs Resorts France, non motivé par des pertes, à hauteur de 58, 9 millions d’euros, laissant un capital, après cette opération, à hauteur de 7.5 millions d’euros. Le capital sert à garantir les créanciers que nous sommes ! Pouvez-vous nous expliquer les motivations de votre décision ? Le 29 janvier 2021, vous demandiez l’ouverture d’une procédure de conciliation. Depuis que vous gérez les Center Parcs vous avez :

  • Augmenté le nombre de parcs en France de 2 à 5. 70 000 semaines vendues en 2000 à 168 000 semaines en 2019. L’offre a donc été multiplié par 2.4 !
  • Le prix de la semaine vendue est passée de 700 euros à 1070 euros soit + 53 %. C’est encore +13.5 % inflation comprise
  • Le taux d’occupation est passé de 93 % sur 2 domaines à 76 % pour 5 domaines ! Que dire de l’effet cannibalisation de l’offre historique !

4. Nous les propriétaires bailleurs du Center Parcs des Hauts de Bruyères faisons des propositions. Notre analyse approfondie de la situation économique du groupe Pierre et vacances Center Parcs a été faite au sein d’une association regroupant des compétences fortes. Elle nous amène aux propositions suivantes : 1° La situation de dégradation des comptes du fait de la période Covid doit être isolée et traitée comme un élément exceptionnel. L’état et les collectivités qui ont contribué au développement du modèle par le biais d’incitations fiscales trouvant sa contrepartie dans le reversement de la TVA de taxes locales et de retombées économiques ne peuvent pas s’en laver les mains et regarder cela comme un sujet entre acteurs privés, c’est un peu facile ! 2° Le modèle économique du groupe doit faire l’objet d’une reconfiguration forte permettant d’isoler dans une structure de défaisance les domaines résidences qui contribuent depuis 10 ans aux pertes. 3° Un nouveau Pierre et Center Parcs reprenant les domaines et résidences pérennes doit émerger permettant d’assurer une rentabilité sur la durée. Le modèle défendu depuis plus de 50 ans est obsolète ! 4° Une recapitalisation est nécessaire et un niveau de dettes cohérents avec les fonds propres sont la clé de la pérennité du modèle. C’est un préalable. 5° De notre côté, nous sommes prêts : – A prendre notre part dans le traitement de la période Covid avec des aménagements concertés, – A discuter : des conditions des baux en renouvellement à condition que la verticalité soit prise en compte, en particulier la rentabilité économique des domaines historiques Français qui n’est pas contestable. Sans traitement de choc des problèmes récurrents depuis 10 ans du groupe Pierre et vacances, sans convictions que le modèle économique futur est viable, rien ne sera possible.

Nous demandons par cette lettre ouverte que chacun prenne ses responsabilités. Nous demandons au conciliateur de nous rencontrer pour : lui faire part de nos propositions détaillées et comprendre ce qui se prépare en coulisse, car nous avons le sentiment que votre jeu est parfaitement orchestré au détriment des propriétaires bailleurs malgré vos dires Monsieur Gervais : « Nous ne sommes pas contre les propriétaires. Nous sommes dans le même camp. » Non Monsieur Gervais : depuis le début de crise, vous ignorez les propriétaires bailleurs ! Au-delà des mots, les actes nous permettront de mesurer vos propos.

Sources : Toutes les données sont vérifiables dans les publications financières de PVCP : rapports financiers du groupe PVCP publiés sur le site du groupe et communications presse pour les cessions de murs.

Association de défense des intérêts des copropriétaires du Domaine des Hauts de Bruyères Center Parcs. »

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