Retrouvez l'actualité du Tourisme pour les professionnels du secteur tourisme avec l'Echo Touristique : agences de voyages, GDS, prestataires spécialisés, voyagistes

FRANÇOIS BACCHETTA, DIRECTEUR GÉNÉRAL FRANCE D’EASYJET « On naît low cost, on ne le devient pas »

Après une année 2013 exceptionnelle, easyJet vise en 2014 plus de 14 millions de passagers en France et l'ouverture de 25 nouvelles lignes. Les agences de voyages contribueront à cette croissance avec des produits et des tarifs négociés, notamment sur le voyage d'affaires.

L'Écho touristique : Quel bilan tirez-vous de l'activité de la compagnie sur l'exercice passé ?

François Bacchetta : 2013 a été exceptionnelle avec des bénéfices en forte hausse. Cela nous a permis de signer une commande record il y a deux mois, de plus de 130 A320. Nos capacités de production pour les années à venir sont assurées. Chaque année, easyJet enregistre une croissance de son trafic de 3 à 5 %, supérieure à la moyenne en Europe. La compagnie, qui détient 7 à 8 % du marché sur les routes intra-européennes, va donc continuer à gagner des parts de marché.

 

Quels sont les résultats et les projets d'easyJet sur le marché français ?

En France, nous avons transporté environ 13,7 millions de passagers de septembre 2012 à septembre 2013, et nous devrions enregistrer une croissance d'environ 5 % en 2014, soit entre 500 000 et 1 million de passagers supplémentaires. EasyJet est la deuxième compagnie en France et nous ouvrons 25 nouvelles lignes en 2014, spécialement au départ de Bordeaux, Toulouse, Paris et Nice, où nous basons un appareil supplémentaire. Sur notre segment de marché, la France est en retard par rapport à la moyenne européenne et il y a encore des opportunités de croissance. Compte tenu de la conjoncture actuelle, nous allons toutefois être prudents.

 

Comment réagissez-vous face à Ryanair, qui change actuellement son modèle, en s'ouvrant par exemple à la distribution via Travelport ?

On voit que Ryanair cherche aussi à séduire la clientèle affaires et s'implante sur des aéroports principaux, par exemple en Italie. Mais la concurrence est moins sensible en France que dans d'autres pays, car nous n'opérons pas sur les mêmes aéroports.

 

La concurrence de compagnies comme Transavia, Vueling ou Volotea s'intensifie. Craignez-vous une guerre des prix ? Allez-vous changer aussi de modèle ?

Nous avons montré que notre modèle était performant et toutes les compagnies regardent ce que l'on fait, que cela soit les low cost ou les compagnies traditionnelles. On copie notre modèle et c'est normal. Mais on naît low cost, on ne le devient pas. Pour l'instant, nous allons encore améliorer notre qualité de service, notre ponctualité et nos routes et continuer à innover. EasyJet doit être un choix positif qui ne doit pas être basé que sur le prix. Mais on ne prévoit pas, aujourd'hui, un changement de modèle.

 

Envisagez-vous une modification de votre politique de distribution ou le retour de la commission pour les agents de voyages ?

On ne réfléchit pas au retour des commissions mais on essaye de répondre aux attentes des agences de voyages avec de nouveaux produits ou des accords négociés sur certains tarifs. Par exemple, le tarif all inclusive réservé à la distribution indirecte, pour les voyageurs d'affaires, offre des prix fixes pour des billets flexibles où tout est compris, et 30 à 40 % moins chers que si l'on ajoutait toutes les options soi-même. C'est un produit simple et compétitif qui marche extrêmement bien et qui tire notre croissance sur le voyage d'affaires.

 

Les compagnies françaises dénoncent régulièrement la « concurrence déloyale » des acteurs étrangers ou low cost. Le coût du travail est-il vraiment trop cher en France ? Est-ce un problème pour vous ?

Depuis plusieurs années, le coût du travail en France s'est éloigné de la moyenne européenne. Il est de 20 % à 30 % plus élevé qu'en Allemagne. Mais ce n'est qu'un élément de la compétitivité. En France, le problème, c'est aussi le poids des taxes et des charges. Il faut aussi prendre en compte le réseau de chaque compagnie, sa politique de distribution et sa puissance commerciale. Mais le principal élément de notre succès, c'est notre modèle. On transporte 65 millions de passagers avec 217 appareils alors qu'Air France ou Lufthansa, pour le même nombre de passagers, aurait besoin de 300 appareils. L'aérien est une industrie capitalistique. Or les low cost ont des appareils qui effectuent une rotation supplémentaire par jour, soit près de 30 % de passagers en plus que les compagnies traditionnelles. On a aussi investi dans des flottes homogènes et neuves ce qui permet d'économiser sur le carburant, de réduire les frais de maintenance, d'avoir moins de problèmes et donc de retards. Enfin, en faisant uniquement du point à point, sans salons, sans hubs, sans procédures et sans tarifs complexes, on simplifie aussi nos opérations et nos structures. C'est simple, Air France a 400 routes et environ 400 personnes qui travaillent sur le revenu management et easyJet, pour 180 routes, a 12 personnes.

 

Mais n'y a t-il pas des compagnies qui jouent sur l'optimisation fiscale ou sociale ? EasyJet paye-t-elle des taxes en France ?

Bien sûr, on paye des taxes, y compris la TVA sur les vols intérieurs. En tout, avec les redevances, plus de 150 millions d'euros par an. Nous avons 26 appareils positionnés en France avec plus de 1 000 salariés. Easyjet est une compagnie basée au Royaume-Uni, avec des salariés dans ce pays. Mais c'est avant tout une compagnie européenne avec du personnel basé dans 25 villes en Europe et des contrats dépendants de chaque pays. On a accepté cette complexité et on s'est conformé aux nouvelles règles européennes, y compris en France. Il y a plus de 20 ans, l'Europe a fait le choix du ciel ouvert. Alors que les compagnies traditionnelles sont restées chez elles, les low cost se sont imposées. 98 % des nouvelles lignes européennes ont été ouvertes par des low cost ces dernières années. Mais il est vrai qu'il y a un problème d'harmonisation fiscale et sociale.

 

« Depuis plusieurs années, le coût du travail en France s'est éloigné de la moyenne européenne. Il est de 20 % à 30 % plus élevé qu'en Allemagne. »

« Nous avons montré que notre modèle était performant et toutes les compagnies regardent ce que l'on fait (…). On copie notre modèle et c'est normal. »

 

Laisser votre commentaire (qui sera publié après moderation)

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Dans la même rubrique