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Mayotte : cinq mois après Chido, l’île veut relancer son tourisme

Mayotte met en place une trentaine de mesures visant à « retrouver les niveaux d’activités » et faire « redémarrer efficacement le secteur ».

En décembre 2024, le cyclone Chido frappait Mayotte, laissant l’île – et son industrie touristique – dans un état critique. Face à des pertes estimées à 21 millions d’euros et 68% des infrastructures endommagées, l’Agence d’attractivité et de développement touristique de Mayotte (AaDTM) propose un plan de relance en deux temps. Un plan chiffré à 159 millions d’euros. Réunis à Paris ce jeudi, son directeur et ses présidents en ont détaillé les différentes mesures.

L’objectif : relancer le secteur du tourisme, d’une part. Mais également transformer la catastrophe qui a dévasté l’île en opportunité pour repenser un tourisme plus durable et plus résilient.

« Pourquoi cette fois serait différente ? »

Le bilan du cyclone Chido sur le secteur touristique mahorais est sans appel. « On s’est dit que ça serait impossible de se relever », concède Michel Madi, directeur de l’AaDTM. Selon une enquête menée par l’AaDTM auprès d’une centaine de professionnels, seuls 50% des opérateurs étaient en fonctionnement au 10 mars 2025. Les dégâts matériels sont estimés à 45 millions d’euros, avec 68% du bâti hors d’usage ou en mauvais état.

Les attentes de la part des professionnels sont très élevées. Anonymement cités dans un communiqué, ils se demandent : « On nous a promis de l’aide, et on attend toujours. Pourquoi cette fois serait différente ? »

D’autant plus que le cyclone Chido s’inscrit dans une série de crises qui touchent l’île depuis plus d’une décennie : mouvements sociaux en 2011, 2018 et 2024, crise sanitaire du Covid-19, crise sécuritaire « Wuambushu » et crise de l’eau en 2023.

Reprise inégale

Bien que le secteur tente de faire preuve de résilience face à ces défis, ses perspectives restent incertaines. La reprise complète est estimée à environ deux ans, bien que l’échéance varie selon les types d’établissement et secteurs d’activité. « Certains domaines, comme l’hébergement ou la restauration, pourraient redémarrer plus rapidement, tandis que d’autres, comme les activités de loisirs ou les évènements, risquent de connaître un retour à la normale plus lent. »

A ce jour, la reprise demeure fortement inégale selon les secteurs. Si l’hôtellerie a vu rouvrir 81% de ses hébergements touristiques, seuls 43% des restaurateurs déclarent être ouverts au public. L’hôtellerie est portée par les équipes d’intervention et le tourisme d’affaires. La filière des croisières demeure quant à elle à l’arrêt complet, sans perspective de reprise.

« Le temps de la relance » pour Mayotte

Face à cette situation, l’AaDTM envisage « le temps de la relance » et proposent une trentaine de mesures – certaines à court terme, afin de soutenir la relance du secteur, d’autres à moyen et à long terme, visant à faire du tourisme un « pilier de l’économie locale ».

L’agence d’attractivité envisage ainsi d’abord des aménagements provisoires permettant de relancer certains secteurs au plus vite. Dans l’attente d’un projet plus durable, Mayotte installera dès ce mois d’avril des pontons de plaisance et de croisières provisoires. L’AaDTM prévoit également la conception d’une stratégie de communication. Il organisera par exemple un évènement « Découvrir Mayotte autrement » en août à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Il s’agira également de mobiliser les outils financiers et d’accompagnement, notamment via le déploiement d’aides financières spécifiques aux professionnels souhaitant améliorer leur offre existante.

A moyen terme, Mayotte entend développer une offre touristique centrée sur la valorisation du patrimoine local. Notamment via le développement de quatre pôles touristiques thématiques (patrimoine, cratères, urbain, et la route touristique du sud). L’île espère également créer un Campus du Tourisme, « pouvant proposer des formations initiales qualifiantes et supérieures », afin de réunir jeunes et professionnels autour du secteur.

Procédures « imbuvables »

Le secteur fait néanmoins face à des difficultés administratives qui ralentissent sa relance. Charles-Henri Mandallaz, président de l’AaDTM, dénonce « des procédures aussi longues qu’imbuvables » qui freinent la reprise du tourisme. L’AaDTM demande à l’Etat de « mettre la main à la poche » pour encourager cette reprise. Les assurances ne suffisent pas à couvrir les frais engendrés par le cyclone : 54% des professionnels CHR déclarent ne pas avoir eu de retour satisfaisant de leur assurance. « On nous demande de déclarer les dégâts, mais si demain on vient me dire que mes installations ne sont pas aux normes, c’est moi qui vais payer », dénonce un professionnel.

Malgré les difficultés, une grande majorité des acteurs du secteur touristique continue d’entretenir des projets de développement. L’enjeu pour Mayotte est de transformer cette crise en opportunité pour repenser un tourisme plus durable et résilient. « Le tourisme peut être vu autrement », affirme Michel Madi.

Avant le cyclone, le secteur représentait une part significative de l’économie locale. 74 000 touristes avaient été accueillis en 2024, 88 millions d’euros de dépenses générées et 1,7 million de nuitées enregistrées. Le secteur employait 5,3% des effectifs salariés du département.

Ce département français présente le plus fort taux de pauvreté (77% de la population sous le seuil de pauvreté) et le taux de chômage le plus élevé de France. La reconstruction du secteur touristique y représente ainsi un enjeu économique et social majeur.

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