Avoirs sur les vols secs : comment la médiation désamorce les conflits
Les réclamations des voyageurs n’ont jamais été aussi nombreuses. Comment désamorcer un conflit, et éviter une éventuelle action en justice ? Nous avons interrogé Khalid El Wardi, secrétaire général de la Médiation Tourisme et Voyage.
Covid-19 oblige, la Médiation du Tourisme et Voyage (MTV) a tourné à plein régime en 2020. « Le nombre de demandes de médiation a bondi de 120% au cours de la période estivale 2020, en comparaison avec 2019. Cette année, nous avons déjà reçu plus de 12 000 dossiers à date, contre moins de 9000 l’an passé, nous indique son secrétaire général Khalid El Wardi. Nous anticipons une année record depuis la création de la médiation en 2012. »
Quelles sont les doléances des voyageurs ? La crise sanitaire a généré deux grandes typologies de réclamations, liées aux annulations de vols secs d’une part, et de celles des forfaits dans le cadre de l’ordonnance du 25 mars d’autre part.
Vols secs : des avoirs bonifiés
S’agissant des vols secs, les avoirs délivrés par de nombreuses compagnies aériennes « ne découlent pas d’un texte (de loi), mais d’une position commerciale », rappelle Khalid El Wardi. Le Règlement européen n°261/2004 sur le droit des consommateurs prévoit au contraire le remboursement des vols annulés. Mais le système de bons d’achat doit être encouragé, afin de soutenir le secteur du tourisme, nuance Bruxelles.
« Nous ne défendons ni les consommateurs ni les professionnels », ajoute le secrétaire général de la MTV, toujours en quête de compromis. « Quand la compagnie veut maintenir l’avoir, nous l’encourageons à réévaluer la valeur de l’avoir. » Comment ? En bonifiant sa valeur de 5% par exemple, en modifiant sa durée (plus courte ou plus longue), en élargissant son champ d’application. Les avoirs bonifiés ont permis de régler « un grand nombre de dossiers », et d’éviter ainsi le passage à la case tribunal.
« Nous avons trouvé des solutions au cas par cas, cela a plutôt bien marché. Certaines compagnies ont même changé de position, pour revenir à un remboursement classique. »
Ordonnance : l’art de la pédagogie
Pour les voyages à forfait, les doléances résultent souvent de la méconnaissance de l’ordonnance du 25 mars 2020 de la part de nombreux voyageurs, selon la MTV. Instauré dans le cadre de la crise sanitaire, ce dispositif permettant l’émission d’avoirs valables 18 mois au lieu d’un remboursement pour un forfait annulé, n’est pas toujours bien appréhendé au niveau de son contenu et de son caractère rétroactif.
« Cette incompréhension peut créer des tensions. Les clients ont parfois le sentiment que l’agence de voyages profite de la situation. Nous les rassurons sur plusieurs points : la délivrance d’avoirs est légitime, l’avoir est garanti en cas de difficulté de l’agence ou du TO, le remboursement possible après 18 mois. »
« Dans la majorité des cas, nous réexpliquons le dispositif (de l’ordonnance), tout en soulignant son caractère exceptionnel. Et les voyageurs se montrent alors compréhensifs. » Quelques vacanciers insistent toutefois pour obtenir un remboursement immédiat, quand leur situation personnelle ne leur permet pas d’attendre le délai des 18 mois. C’est là qu’intervient la Commission paritaire chargée d’étudier les cas difficiles. Cette commission est composée de Familles de France, du Centre Européen des Consommateurs, du Seto et des EdV, et les dossiers sont instruits par la Médiation.
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