Pourquoi Argelès-sur-Mer s’offre un nouvel office de tourisme
L’office de tourisme physique a-t-il un avenir ? Argelès-sur-Mer en est convaincue. La ville balnéaire des Pyrénées-Orientales vient d’entièrement rénover son bureau d’accueil, nous indique sa directrice Nathalie Brunie.
C’est un projet qui animait Nathalie Brunie depuis plusieurs années. Arrivée en 2004 à l’Office de tourisme d’Argelès-sur-Mer en tant que directrice adjointe, celle qui en est désormais la directrice avait à cœur de « revoir complètement le bâtiment » de 1993. « Il avait bien vieilli, mais n’était plus du tout en accord avec les nouvelles attentes des clientèles, ni avec l’ADN d’Argelès », nous explique-t-elle.
C’est à partir de 2017 que l’équipe commence à se questionner pour remettre son bâtiment au goût du jour. « On a commencé avec de petits projets minimalistes, mais ça ne nous satisfaisait pas. » En 2021, le verdict est clair : « il faut se renouveler, il faut réinventer l’Office de tourisme », tranche Nathalie Brunie. Alors, la réflexion s’articule autour de ce qu’elle considère être le « cœur du métier » : l’accueil. « On s’est demandé quelles étaient les attentes des touristes », résume la directrice.
« Désanctuariser » l’Office de tourisme
L’Office de tourisme d’Argelès s’était digitalisé depuis des années, et est aujourd’hui équipé d’un site internet et d’une application. La destination est également présente sur les réseaux sociaux et n’hésite pas à travailler avec des influenceurs afin d’assoir sa présence digitale. Mais la question qui animait l’Office de tourisme touche à l’humain : « Comment réinventer l’accueil des visiteurs, mais également des locaux ? », se demande Mme Brunie. « J’avais à cœur de désanctuariser cet Office de tourisme, d’en faire un lieu d’accueil – pas un sanctuaire à touristes, mais un lieu pour tout type de clientèles ».
Le nouveau bâtiment sera alors multi-usages : point d’accueil, boutique proposant des produits locaux, salle de réunions, mais également un espace immersif. « Une salle de 25 mètres carrés avec projecteurs sur quatre écrans. On y est immergés dans le noir. L’idée est de présenter le territoire de manière adaptée à tous les publics, y compris les personnes en situation de handicap, qui ne peuvent pas accéder à certains sites, via une vidéo son et lumière », détaille Nathalie Brunie.

Surtout, l’aménagement de ce nouvel espace d’accueil devrait permettre à l’Office de tourisme de réorganiser l’accès à l’information. « On a mis en place un accueil « prémâché » à l’extérieur et à l’intérieur », explique la directrice. Ainsi, à l’extérieur du bâtiment, les touristes pourront retrouver des informations sans avoir besoin de consulter les agents d’accueil. « Tout ce qu’on considère être des informations sans valeur ajoutée : météo, horaires de bus, des choses qui ne nous apportent rien en termes de retombées sur le territoire. »
Le rôle des « conseillers en séjour »
L’objectif : que les hôtes d’accueil puissent devenir de véritables « conseillers en séjour ». « Ils sont là pour vendre le territoire », résume Mme Brunie. « Je suis frustrée de voir des conseillers passer des heures à donner des informations sur les bus ou les trains : pour moi, ce n’est pas de la valeur ajoutée. Faire la promotion du territoire, faire découvrir Collioure, Carcassonne, le Musée d’Elne, même si ce n’est pas chez nous, c’est ça, la valeur ajoutée : faire rayonner les touristes et leur faire découvrir notre patrimoine. »
Car la dirigeante croit en la valeur d’un travail humain. « La clientèle évolue, mais on a encore beaucoup de voyageurs, notamment les seniors actifs, qui veulent du conseil éclairé et un support. La digitalisation est en marche, mais ce n’est pas une finalité. Il faut préserver le contact : notre identité transparaît dans l’humain », insiste Nathalie Brunie.

Aujourd’hui, elle estime avoir trouvé « le bon équilibre », entre le digital, le local et l’accueil humain. Le bâtiment rénové sera d’ailleurs décoré d’une fresque de 17 m² réalisée par un artiste local.
Afin de répondre aux besoins de cet office repensé, la directrice envisage même quelques créations de poste. Une réflexion qui n’a, pour l’instant, pas abouti. Mais, selon les besoins, elle envisage d’élargir son équipe de 10 permanents. « J’attends de voir comment ça va fonctionner à l’ouverture, mais il y aura peut-être un poste dédié à la gestion de la salle immersive et de la salle séminaire », concède-t-elle.
Intelligence collective vs IA
Ses employés, Nathalie Brunie les forme afin qu’ils puissent apporter un conseil éclairé aux voyageurs. Les agents font « régulièrement des formations. » « Il y a aussi un gros travail de connaissance du territoire. C’est un élément fondamental. » C’est ce qui fait « la force des Offices de tourisme », selon l’Occitane.
Et alors qu’on lui demande pourquoi elle tient tant à mettre en valeur l’humain, elle répond franchement : « c’est un peu pour lutter contre l’intelligence artificielle. » La directrice choisit de miser « sur l’intelligence collective. » « L’un ne remplacera pas l’autre (…). Il faut trouver un équilibre. » Et de concéder : « même moi, qui utilise le digital pour préparer mes vacances, j’apprécie d’avoir le conseil d’un local, l’astuce que je ne trouverai pas ailleurs. La relation humaine restera toujours centrale. »
Le nouvel Office de tourisme d’Argelès a été inauguré jeudi 19 juin.
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