Quelle(s) stratégie(s) pour AccorHotels ?
En se rebaptisant AccorHotels, le groupe français cherchait à clarifier son identité d'hôtelier. Mais sa récente boulimie en matière d'investissements et d'acquisitions brouille son image. Alors, Accor est-il un hôtelier, une OTA, un opérateur de l'économie collaborative, un incubateur de start-ups ou les quatre à la fois ?
Depuis son arrivée à la direction du groupe Accor en 2013, Sébastien Bazin a beaucoup dépensé. Il a vendu aussi, c'est vrai, un peu, mais il a surtout acheté. PDG hyperactif, il a engagé une stratégie de transformation totale du groupe, qui pour l'instant semble toujours convaincre ses actionnaires. Ces trois dernières années, AccorHotels s'est offert : Mama Shelter, une marque de boutique hôtels au design jeune et branché, Wipolo, un développeur d'app', Fastbooking un spécialiste de solutions de réservation hôtelières via Internet et a investi plusieurs centaines de millions d'euros dans le développement d'une stratégie digitale reposant notamment sur la création de sa propre plate-forme de réservation : Accorhotels.com. Cette année, le groupe a aussi mis la main sur le groupe FRHI, qui lui ouvre ainsi les portes de l'Amérique Nord et celles de l'hôtellerie de grand luxe via les marques Fairmont Raffles et Swissôtel. Il étoffe enfin un peu plus chaque trimestre sa collection de start-up. Sa dernière acquisition, Onefinestay, est un spécialiste britannique de la location de maisons et d'appartements de haut standing. Pour cette jeune pousse de l'économie collaborative souvent appelé le « Airbnb de luxe », le groupe a déboursé 148 M€ en cash et s'est engagé à injecter 64 M€ supplémentaires pour son développement futur. Ne cachant pas sa frustration d'avoir laissé passer une opportunité d'investir dans Airbnb, Sébastien Bazin, se console donc avec Onefinestay, un concept dans lequel il croit cependant dur comme fer.%%HORSTEXTE:1%%
« Onefinestay sera plus important que Sofitel… »
Invité sur le plateau de BFM Business en avril dernier, le PDG n'avait pas hésité a affirmé que d'ici cinq à dix ans, Onefinestay serait plus important que Sofitel. « Le chiffre d'affaires généré sera dix fois supérieur à celui de Sofitel », avait-il confié ce jour-là. Depuis, on se demande l'intérêt pour le groupe de maintenir sous perfusion cette marque qui n'a jamais vraiment percé dans le monde de l'hôtellerie de luxe et qui très bientôt opérera dans l'ombre de Raffles et Fairmont, deux enseignes qui elles, au contraire, n'ont plus rien à prouver dans ce domaine. Tout comme les appartements Onefinestay, les hôtels Raffles et Fairmont s'afficheront très bientôt côte à côte sur les pages de recherche de la plate-forme Accorhotels.com. Il sera alors intéressant de noter pour quel type d'hébergement de luxe les futurs clients opteront, car les prix affichés sont sensiblement identiques sous les trois enseignes (800 € la nuit). Pour le PDG de AccorHotels, « ces marques ne sont pas concurrentes mais parfaitement complémentaires, elles consolident la présence du groupe dans le monde de l'hébergement de luxe et accompagnent les changements de mentalités en matière de consommation de voyage ».
« Devenir le nouveau compagnon de voyage des clients »
Que l'on se rassure, les choix stratégiques de Sébastien Bazin ne semblent pas nés d'un sentiment de frustration. Ce dernier a un plan, faire du groupe hôtelier un leader mondial du marché des locations de maisons avec services. Et ses ambitions pour le groupe ne s'arrêtent pas là. Au terme d'un pari risqué et dispendieux, qui doit encore faire ses preuves en matière de retour sur investissement, le PDG cherche à faire de AccorHotels.com « le nouveau compagnon de voyage des clients ». C'est dans cette optique que le groupe hôtelier a racheté Wipolo en octobre 2014. Ce développeur d'apps s'est vu confier la mission d'enrichir la plate-forme de réservation avec du contenu de voyage. « En moyenne, un client télécharge sur son mobile deux ou trois applications de voyages, pas plus. Nous oeuvrons pour que Accorhotels.com fasse partie de cette sélection restreinte. Pour y arriver, nous allons développer et proposer des services qui n'ont aucun lien avec la chambre d'hôtel, ni même avec le séjour », nous confiait récemment Romain Roulleau, le directeur des opérations digitales du groupe. À l'heure où pour contrer les OTA's, de nombreux hôteliers chouchoutent à nouveau leurs clients, spécialement ceux affiliés à leurs programmes de fidélité, AccorHotels va encore plus loin en misant sur une palette d'outils technologiques capable d'offrir une connectivité simple, rapide et efficace avec eux. Communiquer avec son client et si c'était ça le secret de l'hôtellerie du futur ?
