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Portraits de femmes en cadres

Connu pour recruter en majorité des femmes, le secteur du tourisme rechigne encore trop souvent à leur confier des postes de direction. Quelques femmes, pugnaces, parviennent cependant à se hisser au sommet des organigrammes.

Ala veille de la journée de la Femme organisée le 8 mars, nul doute que la parité reste une utopie, et pas seulement au Sénat ! Au Conseil d'administration du Syndicat national des agences de voyages (Snav), 50 membres sur 63 sont des hommes. Le prochain Championnat des vendeurs de L'Echo touristique aura une image autrement plus féminine, puisque seulement onze des 80 sélectionnés sont des garçons. C'est le paradoxe de ce secteur : si tour-opérateurs et agences emploient des femmes à 70 %, leurs états-majors sont souvent masculins ! Un récent ouvrage paru aux Editions du tourisme ne titrait-il pas Les hommes clés du tourisme ? Pour autant, la gente féminine n'est pas mise à l'écart du pouvoir (voir infographie). Quelques battantes se sont hissées au sommet de la pyramide. Des femmes dirigeantes souvent forcenées de travail, prêtes à braver les préjugés et à faire des concessions familiales.

Journées à rallonge, dîner d'affaires : un choix de vie

Pourquoi si peu de femmes coiffent-elles une industrie fortement féminisée ? "Elles nourrissent moins d'ambitions que leurs alter ego masculins et cultivent un vieux complexe d'infériorité", explique Nicole Rodriguez Besson, directrice générale d'Elvia France. C'est aussi la conséquence d'un choix de vie. Journées à rallonge, déplacements fréquents, dîners d'affaires : être au sommet des organigrammes réclame un investissement personnel fort. Toutes les femmes ne sont pas disposées à accepter les règles du jeu. Leur mari non plus. "La société progresse très lentement sur le partage des charges au foyer, rappelle Mireille Faugère, directrice de voyages France-Europe à la SNCF. Il faut un couple soudé. Quand j'ai effectué mon stage de cadre à la SNCF, j'étais aux 3×8. Heureusement pour notre enfant en bas âge, mon époux a assuré."

Carrière et vie de famille : la difficile conjugaison

Le pari de conjuguer carrière et vie de famille reste bien difficile, d'autant que les systèmes de garde d'enfants ne sont pas prévus pour des couples actifs. Mais ce n'est pas mission impossible en France, contrairement à l'Allemagne. Tout repose sur des concessions et une organisation sans faille.

"Accéder à des responsabilités passe par des sacrifices sur le plan personnel, observe Petra Friedmann, directrice d'Opodo. J'ai eu, chez Marmara, un patron particulièrement compréhensif. Hervé Vighier a accepté que je travaille à quatre-cinquième lorsque je développais les sites Internet du groupe. C'est assez exceptionnel. En général, il y a une grande intolérance à l'aménagement du temps de travail des femmes, ce qui freine leurs velléités de carrière." Mais lorsque Petra Friedmann a pris la tête d'Opodo.fr, elle a dû s'investir plus qu'à plein temps dans son travail. "J'ai nettement moins profité de mon fils, aujourd'hui âgé de huit ans, reconnaît cette dernière. Heureusement, ma famille s'est montrée compréhensive. Ma fille de 14 ans m'encourage pleinement. Selon ses propres termes, une femme ne doit pas rester dans l'ombre, mais foncer." C'est justement le leitmotiv de Rose-Marie Farrugia, pour qui "travailler à temps partiel, c'est se mettre un peu sur la touche".

Dormir peu et travailler beaucoup

La directrice générale du Cercle des Vacances venait de décrocher son BTS Tourisme quand elle est devenue attachée commerciale chez Camelia Welcome… pendant la semaine. "Les week-ends, j'étais guide-accompagnatrice, ce qui m'a permis de découvrir de nombreuses destinations." Quelques années plus tard, Air Canada lui cédait les rênes du voyagiste Vacances Air Canada qu'elle a racheté il y a deux ans. "Diriger une PME exige une présence de tous les instants", poursuit-elle. Rose-Marie Farrugia dort peu, et travaille 15 heures par jour, samedi compris. "Heureusement, mes filles sont grandes", ajoute-t-elle. Martine Balouka, directrice générale du pôle tourisme de Pierre & Vacances en 2002, est sur la même longueur d'ondes : "Si j'avais eu des enfants en bas âge, j'aurais réfléchi avant d'accepter mes fonctions actuelles chez Pierre & Vacances. Mes filles ont 23 et 28 ans, la question ne s'est donc pas posée. J'ai eu du temps à leur consacrer lorsqu'elles étaient plus jeunes. C'est indispensable de trouver un équilibre entre vie privée et vie professionnelle."

A fonctions égales, la femme doit souvent travailler plus

Pour preuve, à l'exception de Laurence Berman Clément, qui attend un heureux événement pour le mois de juin, toutes les chefs d'entreprise interrogées dans cette enquête ont des enfants. Et en sont fières : "Je suis une vraie mère poule, s'enorgueillit Isabelle Cordier-Archer, directrice générale de Vacances Carrefour. Je travaillais à quatre-cinquième lorsque j'étais à la direction de Casino. Maintenant, j'essaye de préserver mes mercredis après-midi pour aller au cinéma ou faire les boutiques avec Thibault. Bien sûr, comme lui, je ramène des devoirs à la maison pour le samedi."

La femme doit-elle davantage travailler qu'un homme, à fonctions égales ? Oui, répond tout de go Isabelle Cordier-Archer, et même deux fois plus. Non, estime pour sa part Rose-Marie Farrugia. "Un chouia", répond Martine Balouka, qui occupe des postes de direction et d'encadrement depuis 20 ans. Chez Pierre & Vacances, elle coiffe 4 000 personnes, et s'amuse rétrospectivement de ses débuts. "Lorsque j'ai postulé pour mon premier poste d'assistante marketing, avec mon diplôme de Sup' de Co en poche, il m'a été demandé si je savais taper à la machine ! Cette question semble incongrue aujourd'hui et ne serait d'ail-leurs plus posée. Les mentalités ont changé, ce n'est plus autant le parcours du combattant quand on est une femme pour parvenir à des responsabilités." Une position partagée également par Nicole Rodriguez Besson : "Il y a dix ans, un président hésitait à nommer une directrice générale, de peur de décrédibiliser son entreprise au regard des salariés et des partenaires. La même suspicion planait sur les femmes pilotes de ligne ou chauffeur d'autobus. La situation s'est améliorée, même s'il subsiste un seuil de tolérance à la promotion des femmes."

Se battre contre les clichés et le machisme ordinaire

Des différences culturelles entrent également en jeu, souligne Laurence Berman Clément : "Les groupes anglo-saxons, comme Disney par exemple, se révèlent plus ouverts sur la mixité des équipes, au niveau du genre humain comme des nationalités", relève l'actuelle directrice générale de Jet tours, qui fut directrice de la stratégie de Disneyland Paris à l'âge de 24 ans. Dans certains pays, les clichés et les traditions sont plus tenaces. La confiance accordée aux femmes se fait parfois au long cours. "En Tunisie, au Maroc ou en Egypte, une dirigeante doit faire ses preuves pendant la première demi-heure d'une réunion. A contrario, l'homme inspire con-fiance dès la première minute. Pourtant, dans ces pays, la femme est très respectée. Du coup, elle l'est doublement quand elle a su montrer ses aptitudes de chef d'entreprise", poursuit Laurence Berman Clément.

Et les entreprises du tourisme en France, sont-elles machistes ? Oui, mais pas toutes, répondent la plupart des dirigeantes interviewées. "Mon patron Gérard Brémond est un homme doué d'une rare ouverture d'esprit. La finance, l'immobilier et le pôle tourisme sont dirigés par trois femmes. C'est dire l'importance qu'il accorde dans ses choix aux compétences des personnes, sans égard à leur sexe", note Martine Balouka. La confiance est un facteur clé. Carole Peyre, directrice générale de Beachcomber Tours, est bien placée pour le dire : "J'ai rencontré tout au long de ma carrière des dirigeants hommes sans a priori sur la capacité des femmes à entreprendre. Ainsi, le groupe mauricien Beachcomber m'a-t-il fait confiance en 1991 en me confiant la création de Beachcomber Tours en France." Le tour-opérateur emploie 40 personnes (25 femmes et 15 hommes), avec un comité de pilotage mixte. "Je crois à l'importance de cette complémentarité, de cet équilibre dans l'élaboration, la présentation et la commercialisation des voyages."

Recruter des femmes, un signe de modernité

Mireille Faugère est du même avis : "La parité a du bon, d'autant que la préparation des voyages d'agrément incombe souvent aux dames. Recruter des femmes, c'est un signe de modernité pour l'entreprise. Ce n'est pas un handicap si elles cumulent le rôle de mère de famille, quitte à trava

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