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Cyrielle Bon (Destination Canada) : « Pour moi, le tourisme durable va de soi »

Cyrielle Bon représente désormais la destination Canada sur le marché français. Pour la directrice de l’agence 360tourisme, l’écologie, particulièrement dans le voyage, est une évidence. Et, comme elle le dit, il faut se donner les moyens de réaliser ses rêves.

L’Echo touristique : Cyrielle Bon, qui êtes-vous ?

Cyrielle Bon : Difficile question… Je suis quelqu’un de très passionné. Quand je fais quelque chose, je le fais à fond. Je suis en plus très curieuse, ce qui m’a amenée aux quatre coins du globe. J’ai l’âme d’une exploratrice, je cherche toujours à rencontrer de nouvelles personnes, des lieux, des choses innovantes. C’est dans mon ADN et ça fait de moi une éternelle optimiste.

Justement, dans votre parcours, vous avez fait des études à Moscou, pourquoi ?

Cyrielle Bon : Au lycée, j’ai eu la chance d’apprendre le russe, en troisième langue. Très vite, côté carrière, je me suis lancée dans l’hôtellerie. En étant dans le département commercial, je rencontrais tous les tour-opérateurs, notamment russes. Je me suis dit, autant y aller à fond. J’ai repris les études et suis restée pour travailler à Moscou. Une aventure décidée plus par le cœur que par la raison.

Le tourisme est-il venu par hasard ou par envie, au départ ?

Cyrielle Bon : C’est l’évolution d’une envie de départ. En faisant Sciences Po et des stages de journalisme, je me suis rendu compte que j’aspirais à faire autre chose. À l’époque, j’aimais pas mal voyager et je me suis donc tournée vers le tourisme. Un secteur un peu mal aimé et pourtant l’un des plus beaux secteurs qui soient : on vend du rêve aux gens, on leur permet de s’ouvrir l’esprit, dans un bel environnement de travail. J’ai eu la possibilité de bifurquer dans l’hôtellerie d’abord puis, après différents postes, dans le tourisme de façon plus général.

Vous êtes une jeune femme, dans un monde assez macho. Est-ce un avantage ou un inconvénient ?

Cyrielle Bon : Je n’y avais pas pensé… De manière générale, je ne pense pas que ça fasse une grande différence. Le monde en général est ce qu’il est, il faut jouer avec les cartes que l’on a. Donc être une fille, je n’ai pas décidé, je fais avec, je suis assez pragmatique à ce niveau-là. Le tourisme est un environnement très bienveillant, je n’ai pas ressenti de machisme même si on peut être surpris qu’il y ait autant d’hommes PDG dans le secteur et si peu dans les jobs de terrain.

Le Canada m’a choisie, d’une certaine façon.

Vous êtes Charentaise et vous vous occupez du Canada. Un choix ou une opportunité ?

Cyrielle Bon : C’est un choix et une opportunité. Un très beau hasard de la vie. Déjà petite, j’étais curieuse de nouvelles cultures. Je voulais m’immerger à l’étranger. J’aurais bien voulu avoir des parents qui m’apprennent des langues étrangères, mais ils sont franco-français…  Un jour, en regardant le programme TV, la chanteuse Nolwenn Leroy expliquait qu’elle parlait très bien anglais parce qu’elle était partie à l’étranger grâce au Rotary Club.  Je suis allée rencontrer un dentiste de ma ville qui était au Rotary Club, et mon projet a été soutenu, ce qui m’a permis d’apprendre l’anglais. J’ai fait mon année scolaire au Canada, à Princeton, dans la vallée de vignobles. J’avais 17 ans, cela a constitué un tournant dans ma vie. Le Canada m’a choisie, d’une certaine façon.

Quel est votre regard sur la gestion de crise du Canada qui s’ouvre aux voyageurs vaccinés ?

Cyrielle Bon : Quand la crise a eu lieu, les frontières se sont fermées, comme dans beaucoup de pays. Mais contrairement à d’autres destinations, ils n’ont pas fait d’aller-retour, entre ‘on ouvre, on ferme’. Les autorités sont restées prudentes et constantes, dès le début. Aujourd’hui, la population canadienne est fortement vaccinée, une destination très prisée par les Français. Donc, rouvrir maintenant fait du sens. Ils ont fixé une date et s’y sont tenus. Cette crise a été gérée de façon sensible et humaine. C’est aussi ce qui fait que j’aime ce pays, et les voyageurs français aussi.

Vous prenez la direction de destination Canada à travers votre agence. Quel est votre plan d’action ?

Cyrielle Bon :  J’ai travaillé pendant six ans avec l’agence qui, avant, représentait le Canada. Donc j’étais en plein accord avec ma prédécesseur Sandra Teakle, je l’admire. Pour moi, c’est un changement dans la continuité. C’est une opportunité d’aligner ma sphère professionnelle et personnelle. Dans ma sphère personnelle, je suis très portée sur l’écologie. Pour moi le tourisme durable va de soi et comme l’a dit Jean-François Rial (PDG de Voyageurs du Monde, NDLR), un voyage long-courrier de moins de 5 nuits n’a pas de sens. Pour moi, la promotion du Canada passe par une vision raisonnée et plus durable du tourisme.

Tourisme et écologie peuvent vraiment aller de pair ?

Cyrielle Bon : Oui ! Prendre un avion n’est pas écologique à court terme, évidemment – Paris-Montréal génère plus de 2 tonnes de CO2. Si on se limitait au seul aspect aéronautique, effectivement, il faudrait arrêter. C’est pour cela que dans ma vision, faire des voyages tous les week-ends n’a pas de sens. Du moins tant que l’aéronautique n’aura pas trouvé, en recherche et développement, des moyens beaucoup plus neutres. Mais le tourisme durable n’est pas qu’écologique, c’est aussi sociologique. Faire des voyages moins souvent mais plus longtemps est intéressant. Une telle expérience peut marquer une vie, c’est mon cas, et développer un plus grand respect de l’autre. On a tendance à penser qu’il faut redécouvrir son territoire, c’est vrai. Mais découvrir l’autre passe aussi par l’ouverture à d’autres cultures. Les Canadiens, que l’on  appelle nos cousins, ont beaucoup à nous apprendre, ils ont une mentalité différente de la nôtre, une autre façon de vivre plus tranquille. C’est aussi ce qui charme les Français.

Êtes-vous d’accord avec Jean-François Rial quand il dit qu’il faudrait faire payer plus cher ?

Cyrielle Bon : Quand il dit qu’il faudrait faire payer plus cher, il pense à intégrer des taxes carbone.

Alors, faut-il faire payer pour polluer ? 

Cyrielle Bon : Payer pour polluer peut être un peu incitatif mais sous-entend que l’on « s’achète une bonne conscience ». Je pense que le fait d’intégrer la taxe permettrait de débloquer des budgets plus importants dans la recherche et le développement de solutions de transports beaucoup plus neutres pour l’environnement, ce qui est positif. Le problème, c’est nos entreprises risquent d’être moins compétitives. Il y a tellement de taxes dans les aéroports qu’il y a peut-être moyen d’intervertir aussi, et d’intégrer cette taxe sans favoriser des entreprises étrangères.

Les Maldives ne sont pas une destination écologique par excellence.

Vous qui avez travaillé aux Maldives, ces îles magnifiques mais polluées…

Cyrielle Bon : Effectivement, les Maldives ne sont pas la destination écologique par excellence. J’y étais en 2011, 2012, déjà 10 ans. Ma conscience écologique n’était pas encore développée. À l’heure actuelle ce n’est pas une destination écologique mais les autorités pourraient en avoir la volonté. Toute l’eau consommée dans les resorts est traitée au centre des îles, ils pourraient aussi traiter les déchets sur place. C’est une réflexion qui leur revient. Les Maldives sur le papier, c’est magnifique. Mais en réalité quand on y travaille, vraiment pas.  Le personnel (des hôtels) est contraint de rester au centre de l’ile, de ne pas perturber les vacances de rêve des clients. On vit en petite communauté, ce qui m’a permis de fréquenter des personnes d’horizons différents, notamment un Indien devenu un ami. Il m’a ouvert aux pouvoirs de l’instant présent, de la pleine conscience. 

Que pensez-vous de ces voyageurs qui vont souvent très loin pour s’enfermer dans un club ?

Cyrielle Bon : Je pense que c’est triste. En tant que professionnels du tourisme, nous avons une responsabilité. Ces lieux peuvent exister mais, comme l’a très bien montré Olivier Kervella avec les Kappa Clubs, il est possible d’inciter les voyageurs à aller vers l’autre, pour faire des découvertes culturelles. C’est à nous de leur montrer qu’ils pourraient tirer beaucoup plus qu’espéré de leurs vacances.

Qu’est ce qui vous fait avancer tous les jours ?

Cyrielle Bon : Je pense que ce sont les rencontres que l’on peut faire dans le tourisme et qui vont façonner une façon de penser, une envie de travailler, des projets à promouvoir. Le tourisme est un secteur très humain. On est en contact permanent avec des gens même quand on télétravaille.

La vie pour Cyrielle, c’est quoi ?

Cyrielle Bon : En dehors de l’écologie, tout ce qui est artistique me plaît énormément. Au-delà du tourisme qui est déjà très large, j’aime la possibilité de créer, de ne rien s’interdire. La vie, c’est la possibilité de façonner un monde à son image. Se dire qu’on aimerait voir évoluer le monde et, de façon humble, se donner les moyens de réaliser ses rêves.

Quel serait pour vous le monde idéal ?

Cyrielle Bon : Un monde très ouvert, et si je suis très utopiste, où les frontières n’existeraient pas. Un monde où les gens sont conscients de l’instant présent, sans faire des sauts de puce dans 50 000 endroits. Un monde tourné vers l’autre et pour cela tourné vers l’ailleurs.

Vous êtes croyante ?

Cyrielle Bon : Non. Cependant, j’ai une certaine forme de spiritualité. Je suis très sensible au développement personnel et à l’impact qu’une personne peut avoir sur d’autres. D’une certaine façon, la religion accapare ces thèmes. Je ne pense pas avoir une foi particulière, l’instant présent est trop important. Le voyage c’est beaucoup l’instant présent aussi. La plupart des voyageurs reviennent transformés parce qu’ils ont su laisser de la place à des vraies rencontres, à l’inattendu.

Vous vous attendez à l’inattendu ?

Cyrielle Bon : Je suis peut-être du genre à le chercher… J’ai tendance à vivre hors de ma zone de confort. Mais je ne recommande pas à tout le monde d’aller chercher l’inattendu. C’est bien d’avoir des projets, de se donner une direction. 

Le prénom Cyrielle ça vient d’où ?

Cyrielle Bon : Du Grec, de Curios, consacré au divin. Mais ça n’a pas été choisi pour une étymologie quelconque.

Vous auriez quelque chose à refaire ?

Cyrielle Bon : C’est une question difficile parce qu’on a forcément, chacun, des choses qu’on aimerait refaire. Et pour autant, ces erreurs nous ont façonnés et permis de rebondir. J’ai toujours vécu intensément, passionnément. Même si j’ai toujours été très spontanée, avec l’âge, j’ai appris à gagner en patience et en ouverture. Je suis contente de la vie qui m’a été offerte et des difficultés rencontrées. Non je ne referais rien.

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