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J.-F. Rial sur Thomas Cook : « Arrêtons de tirer sur l’ambulance ! »

10 000 clients sont rentrés, 70 000 doivent en théorie partir. Le séisme Thomas Cook France n’est pas fini, explique Jean-François Rial, le vice-président du Seto, qui salue le travail accompli par les équipes du groupe.

L’Echo touristique : Globalement, Nicolas Delord et ses équipes ont-ils vraiment bien géré la crise, ou pas ?

Jean-François Rial : Il faut bien comprendre que la gestion de ce dossier est extrêmement complexe. Cette énorme faillite concerne à la fois un TO – Jet tours -, 174 agences intégrées et 247 franchisées, ainsi que l’un des plus grands voyagistes au monde. En tant que vice-président du Seto, j’ai pas mal travaillé sur le dossier, à la demande d’Alix Philipon, de René-Marc Chikli*, en collaboration avec les Entreprises du Voyage. Ainsi, s’agissant de la problématique des versements à la centrale de paiement sur les TO distribués, nous avons dénombré au moins 12 situations différentes parmi les franchisés ! Il est impossible d’en déduire des règles générales, capables de s’appliquer à tous. La lecture des observateurs est souvent partielle, voire partiale. Nicolas Delord et ses équipes ont très bien géré le sinistre, tout comme l’APST. Nous n’avons rien à leur reprocher ! Mais personne ne peut être parfait en pareille situation. Et il ne faut pas oublier que la faillite de Thomas Cook France, c’est la conséquence de la liquidation de Thomas Cook au Royaume-Uni.

Justement, Nicolas Delord a pu être accusé d’avoir fait acte de favoritisme…

Notre profession adore la simplification et le complotisme. La situation est plus complexe qu’il n’y parait. Par exemple, l’argent des franchisés sur la centrale de paiement a été utilisé pour payer les fournisseurs des agences intégrées, ce qui résulte d’une erreur de la banque, qui depuis a effectué les remboursements. Il n’y a jamais eu de favoritisme dans le traitement des dossiers.

Que s’est-il passé pour Alpitour, qui se plaignait le 3 octobre de ne pas avoir été payé, contrairement à d’autres ?

La date de paiement prévue par la centrale de paiement intervenait quelques jours plus tard pour quelques TO comme Alpitour, comparativement à d’autres TO. Ces voyagistes ont été ‘plantés’ pour cette raison. Il n’y a eu aucun « calcul » de la part de Thomas Cook, qui a toujours agi avec honnêteté. Il y a eu quelques erreurs involontaires et des circonstances malheureuses. Les TO ont été intégralement payés sur les départs des clients des agences franchisées et assumeront les pertes sur les ventes des agences intégrées.

Combien de voyageurs reste-t-il à faire partir ?

Il reste environ 70 000 voyageurs à faire partir, soit avec Jet tours, soit avec d’autres TO vendus par les agences intégrées, sans compter les départs payés par les agences franchisées à la centrale de paiement. Il faudra du temps pour gérer tous ces dossiers. L’APST a déjà fait revenir 11 000 clients. Je ne dis pas que tout s’est déroulé sans erreur, mais on s’en sort vraiment bien, sans scandale dans les médias. Nicolas Delord n’est peut-être pas parfait en communication, mais il n’a jamais failli. Ses équipes et celles de l’APST se sont défoncées pour régler les problèmes. Nous avons récupéré le maximum d’argent pour les TO auprès des agences franchisées, tout en veillant à ne pas fragiliser ces dernières.

Comment expliquez-vous qu’il y ait eu autant de critiques ?

Bien sûr, il y a de la casse, c’est évident. Mais arrêtons de tirer sur l’ambulance ! Tirer sur des personnes qui sont en difficulté, totalement investies alors même qu’elles vont perdre leur emploi, c’est peu élégant. Les procès d’intention, c’est scandaleux et facile. C’est insupportable, et particulièrement injuste concernant Nicolas. Le summum a été atteint avec Richard Vainopulos (président de TourCom, NDLR). C’est un populiste et un récidiviste : après le crash de l’avion de Flash Airlines à Charm el-Cheikh co-affrété par Fram et Jet tours, Monsieur Vainopoulos avait dit en commission des lois à l’Assemblée nationale – j’étais présent – que les TO choisissaient des compagnies aériennes sur le critère du prix, quitte à minimiser leurs exigences en matière de sécurité. J’avais trouvé ses propos très peu solidaires et choquants. A contrario, j’ai trouvé absolument remarquable la collaboration entre l’APST, le Seto, Thomas Cook, les EdV.

La déclaration de cessation de paiement aurait-elle pu être effectuée plus tôt ?

La déclaration de cessation de paiement n’a pas pu être effectuée plus tôt pour des raisons techniques et juridiques. Nicolas a voulu le faire, le tribunal l’en a empêché, il fallait remplir un grand nombre de documents au préalable. Nous avons toutefois réussi à convaincre les pouvoirs publics et l’APST de prendre en charge les retours des clients avant la déclaration de cessation de paiement, de manière exceptionnelle. Des personnes ont prétendu que l’APST avait tout fait pour retarder la déclaration afin de limiter le montant du sinistre, ce qui est faux et absurde puisque la caisse de garantie n’a pas attendu pour prendre en charge les clients !

Des PNR Jet tours ont-ils été bloqués ?

A mon avis, non. Mais Thomas Cook a pu subir la complexité du droit. La transmission des PNR à d’autres TO est très complexe dans un tel contexte. Nicolas Delord a agi pour protéger le fonds de commerce. Un autre point mérite d’être clarifié : la centrale de paiement Tess n’a pas « gardé » l’argent, c’est impossible, c’est un simple outil informatique opéré par la centrale de paiement.

Qu’est-ce qui reste compliqué ?

Tout est compliqué. Les professionnels voulaient une réponse immédiate de l’APST sur les départs au-delà du 15 novembre. Nous venons d’obtenir un accord pour organiser les départs jusqu’au 31 décembre. Au-delà, la caisse de garantie ne peut pas répondre pour le moment, c’est normal. Nous devons attendre que l’administrateur judiciaire tranche sur les offres de reprise. Il faut accepter de telles contraintes liées à cette situation totalement atypique. Les TO sont un peu coincés, mais c’est la vie des entreprises. Les voyagistes doivent prendre leurs responsabilités, en émettant des billets ou en annulant des départs par exemple. Il faut accepter la prise de risques, c’est la vie des chefs d’entreprise.

*Alix Philipon est la présidente de l’APST, et René-Marc Chikli président du Seto

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