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[Tribune] « L’industrie du tourisme saura-t-elle évoluer pour sauver la planète et le voyage ? »

Il faut se servir de la puissance de l’industrie pour faire évoluer les comportements, urgemment, souligne Charles-Edouard Girard, le président de HomeExchange. Nous publions sa tribune ce vendredi 27 septembre, journée mondiale du tourisme.

Selon l’Organisation Mondiale du Tourisme, l’industrie du tourisme rapporte 5 milliards USD par jour et représente 10 % du PIB mondial. En plus de son importance financière, les voyages sont utiles au développement personnel de chacun et sont une source d’enrichissement. C’est en voyageant que l’on se construit et que l’on grandit. Le voyage permet de rencontrer l’autre, de découvrir des cultures, des lieux.

En même temps, le tourisme participe à la destruction des lieux les plus beaux de la planète et représente 60% des émissions de CO2 du trafic aérien. Devons-nous nous arrêter de voyager ? Comment, nous, secteur du tourisme, devons-nous réagir dans ces conditions ?

Favoriser un changement de comportement plutôt que le renoncement au voyage

Si aujourd’hui pour beaucoup, les vacances invitent au voyage, c’est parce qu’il permet un moment de ressource, un dépaysement qui favorise le repos de l’esprit, qui donne un sens au travail, qui nourrit la culture, la curiosité, le partage. Le tourisme apporte quelque chose au monde.

Nul ne peut nier que l’économie de nombreux pays est fondamentalement dépendante du tourisme, et que de nombreuses sociétés, de nombreux emplois y sont liés. La faillite récente de Thomas Cook et de nombreuses compagnies aériennes met en lumière les maux du secteur entier, détruit par la concurrence. Il n’est pas question de détruire cette économie. Il faut se servir de la puissance de l’industrie pour faire évoluer les comportements, urgemment. Le bien de la planète et celui de nombreuses populations est en jeu.

Je ne suis pas pour le renoncement, qui me parait bien trop drastique et déconnecté de la réalité et de tous les besoins d’aujourd’hui. D’ailleurs, il serait injuste et facile d’en avoir profité, abusé pendant de nombreuses années et maintenant que nous avons tout vu, d’expliquer aux prochaines générations qu’il faut arrêter. Je pense qu’il faut urgemment changer nos comportements, pour pouvoir continuer à voyager moins, mais mieux.

L’individu, la prise de conscience grandissante et le besoin de sortir des sentiers battus

Heureusement, nous commençons individuellement à prendre conscience de notre impact quand nous voyageons. Le CO2 que génère l’avion que nous prenons, les déchets produits lors de nos voyages, l’effet des masses de touristes sur les habitats sauvages, ne sont plus méconnus.

Nos choix en tant que consommateur sont paradoxaux. Les flux touristiques sont de plus en plus régis par les normes sociales. Aujourd’hui, on est tenté en tant que voyageur d’aller partout où le flux Instagram nous appelle. Les influenceurs et les clips des célébrités sur-exposent des lieux précis et créent des flux déséquilibrés. D’un autre côté, l’envie de sortir des sentiers battus, et d’aller dans endroits méconnus pour en découvrir les secrets devient une priorité. Je pense que c’est une opportunité dans un monde touristique trop souvent standardisé.

Comme tout secteur qui s’est industrialisé, le tourisme a amené les voyageurs vers une standardisation, une forme de destruction des prestations personnalisées et à une sur-consommation. Les différences culturelles, les particularités de chaque lieu sont chassées au profit de l’envie des touristes de se retrouver dans des conditions habituelles de confort et d’accueil. La logique commerciale a pris le dessus.  L’industrie est sans aucun doute l’auteure de ce déséquilibre.

Je pense qu’il est de notre responsabilité, à nous, les acteurs du secteur touristique, d’embrayer le pas de la prise de conscience presque établie.

Mais comment agir ?

Commençons par ne pas nier notre impact, admettons et disons le fort, le tourisme pollue. C’est un fait, et changer les choses commencera par l’assumer.

L’industrie est puissante, et nous devons la faire changer en profondeur pour proposer des solutions de voyages responsables ET viables. C’est en nous regroupant que nous aurons du poids et une offre assez large pour être démocratisée. Pour y arriver, il nous faudra répondre aux besoins des voyageurs en innovant avec de nouvelles offres de voyages plus inclusifs, plus responsables, et plus écologiques.

Pour moi, la deuxième clé qui permettra de convaincre nos clients, c’est de développer une offre personnalisée. L’individu n’est pas une masse, et nous devons nous battre contre la standardisation du tourisme, pour répondre à un besoin personnalisé. C’est en convaincant le client que le tourisme responsable et personnalisé n’est pas plus cher, qu’il vaincra.

Pour stopper la boucle infernale du sur-tourisme, qui épuise tour à tour les ressources de lieux et les rend moins attrayants au fur et à mesure, je pense que la troisième clé, et sûrement la plus difficile, est de respecter l’équilibre naturel des lieux en empêchant de construire et en accueillant les touristes dans des infrastructures existantes. En dictant les flux par la disponibilité de l’offre, les maisons vides des habitants par exemple comme le fait l’échange de maison, cela aurait deux avantages : celui de favoriser des flux de touristes équilibrés et celui d’arrêter de construire, pour se servir de ce qui existe et ne plus détruire les habitats.

L’industrie alimentaire change depuis de nombreuses années en passant sur le Bio notamment. L’industrie de la mode a pris des engagements. Maintenant le tourisme doit se mobiliser pour prendre les mesures nécessaires. Agissons pour pouvoir transmettre aux générations suivantes le goût du voyage et de la rencontre.

Charles-Edouard Girard, président de HomeExchange

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