Rovaniemi : comment le surtourisme rattrape le pays du Père Noël
Pas moins de 41 vols directs (dont 6 en France) relient cet hiver Rovaniemi, la petite capitale de la Laponie, au reste de l’Europe. C’est quatre fois plus qu’il y a deux ans.
60 euros pour une photo, le tout sous le ballet incessant des vols des compagnies low cost : bienvenue au célèbre village du Père Noël, situé tout près de Rovaniemi, la petite capitale de la Laponie finlandaise. Une destination phare de l’hiver pour les touristes français. Si la fascination pour le cercle polaire, le Père Noël et les aurores boréales attire plus que jamais, elle pose aussi questions. Entre surfréquentation, prix qui explosent et pénuries de logements, les autorités touristiques locales tentent de calmer le jeu en essayant de promouvoir la destination en été.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En 2023, Rovaniemi a enregistré 1,5 million de nuitées, soit 30% de plus que l’année précédente. Pour une population locale qui avoisine les 38 000 habitants dans le centre. Sur l’hiver 2024-25, les records seront une nouvelle fois battus. En décembre 2024, le nombre de nuitées vendues a encore grimpé de 22%, les arrivées de 4% et les revenus touristiques totaux de… 33%, avec un prix moyen par chambre d’hôtel s’établissant désormais à 381 euros la nuit. Ceci, avec des prix d’expéditions sur place qui explosent également.
La bataille de l’aérien
Des hausses expliquées par l’arrivée de nombreuses compagnies aériennes sur la destination ces derniers mois. En décembre dernier, le petit aéroport lapon a accueilli près de 130 000 passagers, en hausse de 24%. De 11 lignes directes en 2022 et 24 en 2023, ce ne sont pas moins de 41 liaisons directes qui sont opérées en cet hiver 2024-25, avec une offre décuplée depuis la France.
Lyon, Nice, Bordeaux (ainsi que Genève) sont depuis cette année reliées à Rovaniemi par easyJet. Depuis les plateformes parisiennes, Ryanair effectue la liaison en direct depuis Beauvais, Transavia depuis Orly, et Air France depuis Charles de Gaulle. Le tout avec une très forte saisonnalité : seuls trois vols sont effectués toute l’année, les 38 autres n’opérant qu’en saison d’hiver, de novembre à mars.
« Nous avons 10 jours en décembre qui sont des journées de pointe, avec 10 000 personnes arrivant à l’aéroport chaque jour », reconnait Sanna Kärkkäinen, à la tête de Visit Rovaniemi, qui met toutefois en avant la dernière enquête de satisfaction menée en décembre 2024. « Le taux de satisfaction était de 90%, le NPS de 77%, la volonté de revenir de 85%, et l’expérience dépassait les attentes pour 92% des répondants, ce qui indique une bonne satisfaction client. Ces résultats sont très positifs », argue-t-elle.

Boîtes à clefs et double-booking
Le nombre de visiteurs dépassant en décembre dix fois la population de la ville, Rovaniemi fait logiquement face à une pénurie de logements. Dans le centre-ville et sa succession d’agences réceptives organisant balades en chiens de traîneaux et autres expéditions au-delà du cercle polaire, les boîtes à clefs et appart hôtels installés dans des immeubles résidentiels sont désormais légion. « Les professionnels du tourisme n’ont souvent plus d’autres choix que de se loger dans des Airbnb partagés », témoigne un guide français habitant en Laponie depuis quatre ans.
« Le pic de la haute saison affiche un taux de réservation complet, au-delà des 100%, mais au début (octobre-novembre) et à la fin (mars-avril), il reste encore de la capacité, avec des taux d’occupation d’environ 80% », tempère Sanna Kärkkäinen. À noter que lors de notre visite dans la ville, fin janvier, outre la difficulté de trouver un hébergement sur place, nous avons été confrontés à des soucis de double-booking, notre logement réservé via une agence ayant déjà été loué à un autre groupe à notre arrivée…
Autre conséquence de cet afflux peu contrôlé de touristes internationaux : la multiplication des « attrapes touristes » aux tarifs parfois fous, comme le détaille l’agence francophone Nordic Odyssey, positionnée elle sur les expéditions natures en très petits groupes.
« Il faut aller voir la Finlande en dehors de l’hiver »
« On ne veut pas avoir plus de monde en hiver : on en a trop ! Il faut que l’on fasse savoir que le Père Noël attend aussi ses visiteurs au printemps et en été », lance ainsi Javier Roig, à la tête de la compagnie nationale finlandaise, Finnair, sur le marché français. « Il faut aller voir la Finlande en dehors de l’hiver », ajoute-t-il.
« Nous nous concentrons maintenant sur l’été et l’automne pour développer un tourisme plus responsable et mieux réparti tout au long de l’année », confirme Sanna Kärkkäinen, mettant en avant le fait que la ville avait obtenu en 2024 le label Sustainable Travel Finland.
« La ville de Rovaniemi mène également un projet baptisé “la nouvelle ère du tourisme à Rovaniemi », qui créé un pont entre la ville, son organisme de promotion touristique et les entreprises du secteur. Ceci afin de renforcer l’interaction et la planification stratégique commune pour le développement touristique futur dans la région », conclut-elle.