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Les compagnies charters sous pression

Concurrence européenne, saisonnalité toujours très prononcée, ouverture au long-courrier… Les compagnies touristiques françaises doivent faire face à de nouveaux défis pour maintenir leurs parts de marché.

En février 2006, Star Airlines au bord du gouffre était rachetée par le groupe d’investissements islandais Avione. Tout récemment, c’est la petite compagnie d’aviation d’affaires Phénix Aviation qui annonçait sa volonté de débarquer sur le marché des charters, grâce à l’affrètement pour cet hiver d’un Airbus A330 long-courrier appartenant au transporteur espagnol Iberworld. Objectif : voler vers les Bahamas, le Mexique, ou la République dominicaine pour le compte du Club Med.

Ce projet a immédiatement déclenché un tollé chez le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) et les autres compagnies charters françaises. Deux exemples qui rappellent combien, après la disparition d’Air Horizons en décembre 2005 et celles, plus anciennes, d’Air Lib et Aéris, le transport charter français est plus que jamais arrivé à la croisée des chemins. D’autant que parallèlement, les consommateurs se font de plus en plus exigeants et la concurrence des compagnies low cost de plus en plus vive.

Dans le sens de l’histoire ou libéralisation sauvage ?

Initié par Cédric Pastour, ex-PDG de Star Airlines et responsable du courtier Aerolines, le projet Phénix/Iberworld est désormais au point mort. Il entendait dans un premier temps utiliser des pilotes espagnols et des PNC français pour la saison d’hiver. Dans un deuxième temps, Phénix devait troquer son A330 contre deux moyen-courriers A320, toujours fournis par Iberworld, pour voler durant l’été. Enfin, à partir de novembre 2007, la nouvelle compagnie envisageait d’intégrer dans sa flotte les avions, avec cette fois des équipages entièrement français. Et promettait d’embaucher 90 salariés.

Ce projet va dans le sens de l’histoire. Il faut arrêter de penser franco-français et profiter des complémentarités européennes possibles, persiste Cédric Pastour. Je suis outré qu’on puisse envisager de donner toute liberté à un transporteur étranger, avec des pilotes étrangers pour venir opérer en France alors que, dans le même temps, on matraque le transport aérien français avec des hausses continuelles de taxes et de charges sociales ou la création de nouvelles contraintes, rétorque Antoine Ferretti, PDG d’Air Méditerranée. Je suis réaliste sur le fait que l’on tend vers une libéralisation à l’échelle européenne mais point n’est besoin pour le gouvernement français d’ouvrir des boulevards alors qu’on peut laisser jouer la concurrence !, ajoute-t-il.

La polémique a encore rebondi il y a quelques jours avec la défection surprise du TO Switch, qui s’était pourtant engagé dès le mois d’août avec Phénix Aviation/Iberworld pour affréter des vols vers la République dominicaine et le Mexique. Il a finalement tout stoppé, pour se rabattre sur Star Airlines.

On est dans un système de compagnie virtuelle

Reste que le procès fait à Phénix Aviation peut sembler excessif dans la mesure où deux des plus importantes compagnies charters françaises (Corsair et Star Airlines) sont désormais contrôlées par des groupes étrangers (TUI et Avione). Même si elles sont soumises à la réglementation nationale. Toutefois, Star Airlines s’apprêterait pour la saison d’hiver à faire venir en France un B767 de la compagnie Excel Airways, autre filiale du groupe Avione, avec des pilotes britanniques ! Cet avion, qui devrait opérer une partie des vols long-courriers de Marsans, n’a curieusement pas déclenché le même tollé que celui de Phénix !

Il ne faut pas se tromper de problème. Les affrètements des compagnies étrangères par les transporteurs français ont toujours existé et sont nécessaires. Mais on est, avec Phénix, dans un système de compagnie virtuelle ! Si on donne un blanc seing à n’importe quel opérateur international pour débarquer en France par le biais d’une minuscule société d’avions taxis, cela peut créer un précédent qui pourrait avoir des conséquences incalculables !, prévient Laurent Magnin, PDG de Star Airlines. Si c’était si facile, on se demande pourquoi Avion Group et TUI ont pris la peine de racheter des compagnies déjà constituées pour s’installer dans l’Hexagone !

Des vols long-courriers pour Axis Airways

Au-delà de la polémique, ces réactions très vives rappellent aussi que le transport charter français reste fragile, comparé à d’autres pays européens, alors qu’il manque toujours des acteurs majeurs (depuis la disparition d’Air Charter, filiale d’Air France, au début des années 1990), capables de répondre à toutes les demandes, moyen et long-courrier.

Un des problèmes récurrents est celui de la saisonnalité. Traditionnellement, les vols moyen-courriers sont moins nombreux en hiver au profit du long-courrier, explique Laurent Magnin. Ce qui complique la gestion des flottes, à moins d’envisager des échanges d’avion avec d’autres compagnies, selon les saisons. En France pour l’instant, seules Corsair et Star Airlines disposent d’avions pour le marché long-courrier. Elles pourraient toutefois être rejointes par Axis Airways. Cette dernière, qui disposait jusqu’alors d’une flotte de cinq appareils (quatre Boeing 737 et un Boeing 757), a intégré un deuxième Boeing 757 en juin, avant l’arrivée de deux Boeing 767 long-courrier, qui devraient opérer cet hiver. Ce fort développement a été rendu possible par l’entrée du groupe financier belge Prado Finances dans le transporteur à hauteur de 65 %. Nous avons une très forte demande des tour-opérateurs pour des vols long-courriers, et nous sommes maintenant prêts à y répondre, déclarait récemment Pierre-Olivier di Fusco, PDG d’Axis Airways.

La compagnie marseillaise a déjà testé le marché en lançant depuis le 28 juin un vol hebdomadaire (le mardi) vers les Comores et Mayotte au départ de Paris/CDG et Marseille pour le compte de Pacific Elysées, une agence parisienne spécialisée dans les vols secs. Axis Airways évoque maintenant la possibilité de desservir les Antilles, la Réunion, la République dominicaine ou le Mexique. Elle table sur un chiffre d’affaires de 110 ME au 30 septembre 2006, pour grimper dans les trois ans à 250 ME.

Les exigences des TO et les habitudes de consommation des Français constituent un autre problème. Contrairement à leurs homologues allemandes ou britanniques, les compagnies françaises ont énormément de mal à voler le mardi, le mercredi ou le jeudi, explique Laurent Magnin. Les TO français se livrent une intense compétition pour programmer des vols le vendredi, samedi ou dimanche. Cela crée forcément des goulets d’étranglement, avec des flottes à flux tendus le week-end et des avions qui restent sur le tarmac en semaine. Ces difficultés sont encore amplifiées par les couvre-feux mis en place à Orly et Roissy, qui limitent beaucoup les départs matinaux et les retours tardifs. Du coup, les voyagistes peuvent être tentés d’affréter des compagnies étrangères, ce qui explique en partie depuis quelques années la baisse régulière du poids du pavillon français dans les vols charters. Même si les récents problèmes de sécurité les poussent désormais à être plus attentifs sur ce point.

Pour lutter contre ces effets pervers, les compagnies charters ont tendance à se spécialiser sur plusieurs niches de marché, ou cherchent de nouveaux systèmes de gestion de flotte. Blue Line, par exemple, a privilégié le tourisme d’affaires. Air Méditerranée multiplie pour sa part les contrats d’affrètements longue durée, qui lui assurent une meilleure rentabilité de sa flotte. Après celui conclu en avril 2004 avec Fram pour trois ans portant sur la location de deux A321, le transporteur toulousain a conclu avec Go Voyages un contrat portant sur un autre A321 dédié, pour une période de cinq ans à compter de mars 2006. Le TO s’est engagé sur un total de 18 000 heures de vol, pour un chiffre d’affaires de plus de 100 ME. Par le biais de ces contrats, nous avons environ 60 % de notre activité, axée sur le moyen-courrier, qui est consolidée, se réjouit Antoine Ferretti. Une méthode qui semble faire ses preuves puisqu’Air Méditerranée table sur un trafic de près de 1 million de passagers en 2006, soit une croissance de 25 % par rapport à 2005 !

Des passagers le jour, du courrier la nuit

De son côté, Europe Airpost, filiale aérienne de la Poste issue de l’Aéropostale, développe continuellement son activité de transport passagers en misant sur deux marchés. Dotée d’une flotte de 20 appareils, elle dispose notamment de 12 Boeing 737 Quickchange qui peuvent être équipés en version cargo la nuit, et passagers le jour. Objectif : rentabiliser au maximum l’utilisation des avions. Ainsi, alors qu’elle n’avait réalisé que 5 800 heures de vol pour le transport passagers (40 % de son activité) en 2004, elle veut passer à 10 000 heures d’ici 2007 en séduisant de nouveaux affréteurs.

L’autre option, de plus en plus suivie par les compagnies touristiques, est le développement de vols réguliers. Il est évident qu’exploiter des lignes avec des droits réguliers est sécurisant. L’ouverture à la vente dans les GDS permet de diversifier les canaux de distribution et peut à l’occasion permettre aux agences de fabriquer elles-mêmes des produits, reconnaît Laurent Magnin. Néanmoins, il faut quelque fois se battre très longtemps pour obtenir ces droits. Il a fallu plus de dix ans à Corsair pour obtenir l’autorisation de voler vers l’île Maurice cet hiver ! Sans aller si loin, le passage au régulier est par exemple devenu la règle chez Aigle Azur, notamment vers l’Algérie et le Maroc. Cette stratégie permet de gommer presque totalement les problèmes liés à la saisonnalité, explique le PDG Arezki Idjerouidène. Bien sûr, nous avons traditionnellement une petite baisse d’activité en hiver mais sur l’ensemble de l’année cette diversification est rentable, surtout en se spécialisant sur les marchés ethniques. Dans cette logique, Aigle Azur a repris récemment les vols de Hi Fly (ex-Air Luxor) entre la France et le Portugal. Mais elle poursuit aussi son développement sur ses marchés traditionnels. Et après le Maroc, elle va prochainement ouvrir des vols réguliers vers la Tunisie (Djerba et Monastir). C’est toutefois autant d’avions disponibles en moins pour les tour-opérateurs. Nous ne conservons que 10 à 15 % de notre activité en charter, ce qui préserve une certaine diversification et permet d’apporter quelques solutions sur les pointes d’affrètement, explique Arezki Idjerouidène.

Autant d’initiatives qui permettent aux compagnies charters françaises (même si elles sont plus sollicitées qu’auparavant depuis le crash de Sharm el-Sh

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