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Les compagnies aériennes polluées par les taxes

Les différentes charges pesant sur les entreprises françaises constituent un handicap face à la concurrence. Mais au niveau mondial, le secteur aérien bénéficie d'un régime avantageux.

Le 15 juillet dernier, l'annonce de l'augmentation de la taxe de solidarité sur les billets d'avion (dite taxe Chirac) de 12,4%, a suscité une levée de bouclier des professionnels du secteur aérien français. Plus récemment, le principal syndicat de pilotes d'Air France a alerté le gouvernement sur sa politique : « On voudrait tuer le transport aérien français qu'on ne s'y prendrait pas autrement ». Mais les compagnies aériennes sont-elles réellement trop taxées ?

En France, « le contexte n'est pas favorable au développement de compagnies aériennes nationales », estime Laurent Magnin, président du Scara (Syndicat des compagnies aériennes autonomes). L'exemple de la taxe Chirac est parlant. Elle a coûté 54 millions d'euros à Air France en 2009, contre 5,7 M€ à easyJet, car elle ne s'applique, en Europe, qu'aux liaisons depuis et vers la France. « Cela crée une distorsion de concurrence », rappelle Laurent Magnin.

Les dépenses de sûreté ont été multipliées par 7

Sur chaque billet, les compagnies françaises doivent également s'acquitter de la taxe d'aviation civile, de la taxe sur les nuisances sonores et de la taxe d'aéroport. Entre 2001 et 2011, cette dernière est passée d'une moyenne de 2,73 euros par billet à 11,50 euros, notamment pour couvrir la hausse des dépenses de sûreté qui, elles, ont été multipliées par 7. Là encore, la France est un des pays les plus durement taxés, certains états prenant en charge ces dépenses. « L'État n'assure plus ses missions régaliennes », juge Jean-Pierre Sauvage, président du BAR (Board of Airline Representatives) France.

En plus des taxes à proprement parler, les compagnies françaises s'acquittent également des redevances aéroportuaires qui peuvent varier de 7 à 44 euros, dans le cas d'un vol long-courrier à Paris en hiver. Roissy et Orly sont, avec Francfort et Londres Heathrow, les plates-formes les plus chères d'Europe. Air France aurait ainsi une facture de 30% plus élevée à Paris que KLM à Francfort. « Les redevances ne sont pas des taxes et on ne peut les apprécier que par rapport au service rendu, il est donc très difficile d'établir des comparaisons entre plates-formes en l'absence d'éléments identiques d'appréciation », note toutefois Jean-Pierre Sauvage.

Reste que nombre de responsables de compagnies aériennes estiment qu'ADP (Aéroports de Paris) capte une part trop importante de la valeur ajoutée dans la chaîne de l'aérien. Dans une lettre au Premier ministre, les administrateurs salariés d'Air France jugent que la marge opérationnelle de l'entreprise publique, 24,4%, est « insolente » et rappellent que « les classements internationaux font apparaître l'aéroport Roissy-Charles-De-Gaulle parmi les moins appréciés » des passagers.

« On demande aux compagnies aériennes de financer la totalité de leurs besoins en France, avec les liaisons pour relier les aéroports, les redevances, les taxes de sûreté. Mais allez demander aux autres compagnies, notamment dans le Golfe, si elles paient tout », s'emporte Laurent Magnin.

La convention de Chicago, un cadeau fiscal

Toutes les difficultés d'Air France, ou des compagnies françaises en général, ne peuvent pas être liées uniquement à cette distorsion de concurrence. « Il y a une question de modèle et ils ne s'adaptent pas assez vite », estime un ancien dirigeant. La masse salariale d'Air France représente ainsi 32,4% de son chiffre d'affaires contre 24% pour IAG (British Airways et Iberia). Mais au final, l'ensemble de ces taxes, redevances et charges, a un réel impact sur la compétitivité du pavillon français.

Un constat qu'il convient de nuancer au niveau global. Si les médias se font souvent l'écho des alertes d'IATA contre la multiplication des taxes, notamment sur le CO2, et des pertes du secteur, peu rappellent le régime spécial des compagnies aériennes. En vertu de la convention de Chicago, le transport aérien international, considéré comme un instrument de paix et de développement, est exonéré de taxes sur le kérosène et bénéficie d'un taux de TVA à 0% en Europe. Un cadeau fiscal qui se compte en dizaines de milliards d'euros au niveau européen. « Le prix d'un billet d'avion n'intègre pas le coût de son impact sur l'environnement. On ne peut pas dire que le secteur aérien est trop taxé. Il reste privilégié par rapport à d'autres modes de transport comme le train », souligne Philippe Callot, professeur à la France Business School et auteur de Que serait le tourisme sans pétrole ?. « Une fumisterie » pour Jean-Pierre Sauvage qui rappelle que le transport aérien ne contribue qu'à 3% des rejets globaux de CO2 et que d'autres activités polluantes ne sont pas non plus taxées.

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