Le Louvre ensablé
« C’est une première. En 2012, un musée du Louvre dessiné par l’architecte Jean Nouvel devrait émerger des sables d’Abu Dhabi. Le contrat a été signé le 6 mars dans l’urgence par le ministre de la Culture, qui n’entendait pas voir sombrer ce projet qui lui tient à coeur, à la veille de l’élection présidentielle. Car ce Louvre bis défraye la chronique depuis plusieurs mois, semant la zizanie dans le microcosme des professionnels de la cult
C’est une première. En 2012, un musée du Louvre dessiné par l’architecte Jean Nouvel devrait émerger des sables d’Abu Dhabi. Le contrat a été signé le 6 mars dans l’urgence par le ministre de la Culture, qui n’entendait pas voir sombrer ce projet qui lui tient à coeur, à la veille de l’élection présidentielle. Car ce Louvre bis défraye la chronique depuis plusieurs mois, semant la zizanie dans le microcosme des professionnels de la culture. Des pétitions circulent et Françoise Cachin, ancienne directrice des Musées de France, mène la fronde, parlant de délocalisation des trésors nationaux, de bradage de la culture voire de disneylandisation du Louvre. Rien que cela !
Pourtant, en quoi un Louvre à Abu Dhabi serait-il moins glorieux qu’une antenne à Atlanta, dont l’ouverture récente n’a pas suscité de polémique ? Sans parler du musée que le Centre Pompidou doit créer à Shanghai… Les 150 millions d’habitants du golfe persique ont tout autant droit à la culture que les Américains et les Chinois. Et l’image de la France ne peut qu’en sortir grandie. Et les oeuvres ? Seulement 300 seront exposées dans le Golfe pour une durée maximale de deux ans, issues de plusieurs musées de l’Hexagone. Et quand bien même elles proviendraient uniquement du palais de la rue de Rivoli, le Louvre d’Abu Dhabi sera loin de dépouiller son glorieux aîné, alors que 350 000 oeuvres dorment dans ses réserves ! La France ne prêtera en outre ses trésors que durant dix ans, le contrat prévoyant d’aider l’émirat à se constituer sa propre collection.
Ce qui fâche sans doute le plus, c’est évidemment le versant financier, certains dénonçant le scandaleux commerce de la culture. Mais alors, il faut de toute urgence rendre gratuit tous les musées français ! Les 700 ME du contrat permettront de réaliser de nouvelles acquisitions, d’éviter que des oeuvres majeures ne quittent la France en tombant dans les mains de collectionneurs privés, autoriseront des rénovations de bâtiments à bout de souffle. Encore faut-il que l’Etat n’utilise pas l’excuse de cette rente pour diminuer parallèlement ses crédits alloués aux musées français. C’est une autre histoire…
