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John-Lee Saez, directeur général France de Kayak : « Nous avons sept ans d’avance sur Google »

Le comparateur Kayak, qui vient d’être racheté par le géant américain Priceline.com, se développe comme challenger en France. Avec le mobile en tête de pont. Interview exclusive avec John-Lee Saez, DG de Kayak en France, et de Checkfelix en Autriche.

L’Écho touristique : Quelle est la position de Kayak en France ?

John-Lee Saez : Sur Internet, nous sommes bien sûr en position de challenger, sachant que nous ne faisons pas exactement le même métier qu’Easyvoyage ou Liligo. Mais selon nos partenaires, nous sommes le leader en taux de conversion. Notre application mobile est celle qui est la plus téléchargée en France parmi les comparateurs. Nous avons commencé à investir dans le mobile dès 2009. 15 % de notre trafic global provient du mobile, et même davantage en France.

Plus précisément ?

Je ne peux pas donner les parts de marché par pays. L’Angleterre, l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, la France et l’Italie sont nos principaux marchés en Europe.

Quel est le modèle économique de Kayak ?

Notre modèle fonctionne à la performance, alors que le CPC (coût par clic, Ndlr) est la norme en France. Sur les vols, nous demandons en général 13 à 16 euros à l’achat d’un billet d’avion, que ce soit sur du court-courrier ou du long-courrier. Nous prenons une commission de 10 % à 12 % sur les hôtels, autant sur la location de voiture, et 6 % à 8 % sur les séjours. Avec notre système, nous avons tout intérêt à augmenter le taux de conversion, pour nos partenaires comme pour nous. Notre stratégie d’acquisition doit être intelligente, le risque est partagé.

Les compagnies ne demandent-elles pas des prix variables selon la nature du vol, court, moyen, long-courrier ?

Il y a eu des discussions. Nous aurions effectivement pu imaginer des prix différenciés selon les catégories de vols. Mais nous essayons de garder un système simple.

Que va changer le rachat par Priceline.com (*) ?

Suite à leur rachat par le groupe Priceline, Booking.com, Agoda et Swoodoo sont toujours des sociétés indépendantes. Kayak devrait le rester, mais nous opérerons certainement des synergies. Notre siège social européen est à Zurich, où je suis basé. Nous n’avons pas de bureau en France.

La croissance de Kayak en Europe s’est faite par acquisition. Easyvoyage pourrait-il l’intéresser ?

Kayak a effectivement racheté Swoodoo en Allemagne en mai 2010, puis Checkfelix.com en Autriche en avril 2011. Le rachat d’Easyvoyage est une des nombreuses options qui existent dans l’univers des comparateurs. Tout dépendra, éventuellement, de la valorisation de l’entreprise. Easyvoyage indexe sa valeur sur son contenu éditorial, qui mobilise beaucoup de salariés, et ne correspond pas à notre modèle.

Quels dangers pèsent sur les comparateurs ?

Je me ferais davantage de soucis si j’étais une agence en ligne ! Oui, des menaces existent, qu’elles viennent de grands opérateurs comme Google ou Apple. Mais au premier semestre 2012, 75 % de notre trafic venait en direct, et seulement 10 % des moteurs de recherche.

Vols, hôtels, voitures, séjours… Ne risquez-vous pas la dispersion ?

Nous ne dispersons pas nos efforts, contrairement à d’autres ! Nous sommes concentrés sur quatre produits, et nous ne développons pas de contenu éditorial. Nous avons pris de fortes positions sur le mobile, mais pas sur les réseaux sociaux, qui nous semblent moins stratégiques pour un moteur.

Qu’avez-vous changé l’an dernier, au niveau technologique ?

Nous avons simplifié le processus de réservation. Les clients se montrent assez frustrés de basculer sur les sites des partenaires, qui en profitent parfois pour faire du cross-selling. Désormais, nous pouvons garder les clients jusqu’à la finalisation de la réservation, mais nous n’encaissons pas. L’expérience utilisateur est proche de celle d’une agence en ligne. Avec cette procédure que nous proposons à nos partenaires, notre temps de booking a été divisé par trois. Et le taux de conversion est meilleur. Ce nouveau système est disponible en France pour les rubriques hôtels et voitures, avec les fournisseurs qui ont basculé dessus. Nous devrions bientôt le déployer sur le produit vols.

Aux États-Unis, GFS (Google Flight Search) détient 1,4 % de part de marché, contre 60 % pour Kayak. Comment expliquer sa contre-performance, par rapport à vous ?

À mon sens, on donne beaucoup d’importance à ce produit, dont on attend toujours le lancement en Europe. L’interface est très peu engageante. Les prix sont complètement faux. Je n’ai pas trouvé l’option pour enregistrer un deuxième passager. Pour moi, GFS est toujours en version plus que bêta, même si officiellement ce n’est plus le cas. Nous avons sept ans d’avance. Kayak a renforcé ses positions avec le rachat en 2007 de SideStep.com pour 196 millions de dollars. Ce qui explique notre prépondérance aux États-Unis. Nous détenons effectivement 60 %, et même 70 % avec notre partenariat conclu avec Bing.

Kayak faisait partie de la fronde anti-Google, FairSearch. Or le gendarme américain de la concurrence (FTC) a déclaré que son enquête ouverte en 2011 sur Google était terminée. Êtes-vous déçu ?

C’est une bataille qui dépasse le tourisme. Google abuse de sa position dominante, ce qui est dommage pour le consommateur final. Le chapitre n’est pas clos, même s’il l’est pour l’instant aux États-Unis. L’Europe doit à son tour trancher, et son jugement pourrait être différent.

Quelle est votre dépendance à ITA Software, technologie rachetée par Google pour le lancement de GFS ?

Notre dépendance à ITA, qui était de 60 %, est passée à un peu plus de 30 %. Pour l’instant, ITA respecte tout ce qui est contractuel. Kayak devrait donc reconduire son contrat avec lui.

Quelles sont vos relations avec les compagnies aériennes ? Cherchent-elles à tout prix à couper les intermédiaires ?

Les compagnies ne nous voient pas comme un intermédiaire. Pour elles, nous sommes un apporteur direct de trafic. Par contre, elles essaient depuis longtemps de court-circuiter les agences en ligne. Certaines aimeraient nous prendre à partie, comme ce fut le cas d’American Airlines (en 2008, Ndlr). Or c’est à elles de discuter avec les pure players, de manière contractuelle. Nous n’avons pas à régler leurs différends. Le problème, c’est que les compagnies ont mis du temps à se positionner sur Internet, et se sont alors reposées sur le travail marketing des agences en ligne. Elles essaient aujourd’hui de rattraper leur retard en augmentant leur trafic direct.

Cette année, quels projets sont prioritaires ?

Nos développements prioritaires porteront sur le mobile. Nous sommes toujours plus attentifs à la précision des prix, à la rapidité et au caractère intuitif de notre moteur. Je ne peux pas en dire davantage. Notre application a déjà été téléchargée plus de 20 millions de fois dans le monde.

* Kayak a annoncé en décembre son rachat par Priceline pour 1,4 milliard d’euros. La transaction doit être finalisée au premier trimestre 2013.

« La bataille se situe aujourd’hui au niveau du mobile ».

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