Retrouvez l'actualité du Tourisme pour les professionnels du secteur tourisme avec l'Echo Touristique : agences de voyages, GDS, prestataires spécialisés, voyagistes

Il faut s’unir pour ne pas subir l’IA de Booking, selon Arno Pons

L’intelligence artificielle va-t-elle renforcer la désintermédiation du secteur du voyage ? C’est un risque majeur selon Arno Pons, délégué général du think tank Digital New Deal. Pour lui, il est urgent de s’unir, pour ne pas subir la révolution IA, a-t-il expliqué lors de la conférence Net Managers.

L’Echo touristique : Quelle est la vocation du Think Tank Digital New Deal ?

Arno Pons : La souveraineté numérique, soit la création d’un cadre de confiance par la régulation. Nous sommes le seul Think Tank non financé par les Gafam. Nous sommes aussi à l’origine de l’amende de 2,5 milliards d’euros contre Google Shopping et de la taxe Gafa. Olivier Sichel*, récemment nommé directeur général de la Caisse des Dépôts, a fondé Digital New Deal pour mener ce combat.

Nous sommes pour la création d’un numérique européen. Il y a besoin d’un numérique des Lumières, qui ne soit ni chinois autoritaire ni américain libertarien. 

Pourquoi l’Europe n’a pas su enfanter de Gafam – à l’exception selon vous de Spotify ?

Arno Pons : Nous n’avons pas appliqué les deux grandes lois du numérique : la loi de Moore et surtout la loi de Metcalfe qui est l’effet de réseau. Nous ne parvenons pas à avoir l’effet de réseau européen parce que nous n’avons pas un marché unique de la donnée comme il en existe aux Etats-Unis et en Chine.

« Il faut s’unir pour ne pas subir »

Quelle est la difficulté que vous identifiez dans le tourisme ?

Arno Pons : La filière représente un poids économique important. Mais la désintermédiation l’a fortement perturbée, les BigTech ayant opéré une captation de la valeur. La première vague est intervenue avec Internet, la deuxième avec Airbnb et autres Uber. L’arrivée de l’IA générative peut malheureusement accroître le phénomène. D’où notre expression « GenAI = Web2² ». Autrement dit, l’IA générative peut amplifier tout ce que nous n’avons pas aimé avec le Web2 – centralisation et captation de la valeur. Il ne faut pas refaire comme il y a 25 ans et donc éviter de créer de nouvelles dépendances avec OpenAI. Et il est nécessaire de se structurer par de la coopération, puisqu’aucune entreprise n’a la taille escomptée pour contrer les Gafam.

A la conférence Net Managers aux Baléares (3-6 juin 2025), vous avez incité les professionnels du tourisme à rejoindre Eona-X, cette association qui vise à faciliter le partage de données dans le tourisme. Pourquoi ?

Arno Pons : Le Think Tank est membre de Eona-X, précisément parce que nous avons créé une activité de Do Tank au sein de Digital New Deal. Le Do Tank consiste à créer des écosystèmes de confiance par la coopération, et s’assurer ainsi que les filières créent des écosystèmes alternatifs aux Gafam. Nous participons à ce titre aux Data Spaces. Si nous arrivons à créer une Data souveraine en coopérant, nous pouvons aussi créer une IA souveraine en coopérant. De tous les Data Spaces que nous accompagnons, Eona-X, dans le tourisme, est le plus inspirant. C’est le plus structuré, le mieux doté financièrement. Son budget atteint 20 millions d’euros, dont 10 millions d’euros des membres et 10 millions de l’Etat grâce au programme d’investissement France 2030. Nous n’avons pas le droit à l’erreur.

En quoi consiste Gen4Travel ?

Arno Pons : C’est une première famille de cas d’usage qui émerge d’Eona-X. Ce consortium dédié à une IA agentique pour le voyage s’appuie sur les Data Spaces. L’Agentification**, qui va permettre d’orchestrer les travel assistants, va chercher les données des entreprises et les structurer. Si par exemple un vol est annulé, tout le parcours peut être modifié, sans passer par Booking ou Google. Automatiquement par exemple, la chambre d’hôtel Accor sera décalée de deux nuits, jusqu’au paiement de l’éventuel supplément. C’est la force du collectif. Nous attendons un financement de 4 millions d’euros pour Gen4Travel, il doit être annoncé d’ici fin juin : deux millions des membres et autant de l’Etat. Nous espérons une V1 dans 18 mois, et développer le projet à l’échelle européenne. Soit nous parvenons à agentifier les travel assistants en les mutualisant, soit Booking crée son agent IA, fait la désintermédiation de trop. Et on est morts ! Il faut s’unir pour ne pas subir.

*Olivier Sichel est toujours président du Think Tank

**L’Agentification désigne un concept de prise de décisions de manière autonome avec l’IA. Dans Eona-X figurent Accor, Air France, Amadeus, Groupe ADP, SNCF, Renault…

A lire aussi :

Laisser votre commentaire (qui sera publié après modération)

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Dans la même rubrique