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France.com en justice : l’histoire surréaliste d’une bataille franco-américaine

Atout France et l’Etat français remportent une nouvelle bataille pour conserver France.com. C’est le dernier épisode d’un long contentieux dans lequel Christian Mantei (Atout France) a mouillé sa chemise.

Dans une décision rendue le 25 mars 2021, la cour d’appel fédérale de Virginie a donné raison à la France et à Atout France, contre l’ancien propriétaire de France.com Jean-Noël Frydman. L’occasion, pour L’Echo touristique, de revenir sur un long bras de fer, à rebondissements, porté par Christian Mantei, l’actuel président d’Atout France. Une histoire presque surréaliste, qui découle d’une réalité plutôt sidérante : la France n’avait pas protégé l’emblématique nom de domaine France.fr.

« A l’origine, Laurent Fabius voulait que l’on fasse évoluer le nom de domaine Rendezvousenfrance.com, raconte Christian Mantei, alors directeur général d’Atout France. Le ministre des Affaires étrangères avait obtenu, à l’époque, qu’Atout France puisse utiliser France.fr, jusqu’alors site généraliste du service d’information du gouvernement. Une excellente nouvelle. »  

Une tentative de négociation, à plus de 10M€

« Dans nos discussions autour du Comité de promotion du tourisme, plusieurs personnes dont Frédéric Vanhoutte, Jean-Pierre Nadir et Jean-François Rial me disent qu’il serait bon de récupérer France.com. » Problème, la France n’a pas déposé le nom de domaine France.com, l’extension naturelle de France.fr pour son développement international, elle ne peut donc pas l’exploiter l’Url.

C’est dès 1994 que le franco-américain Jean-Noël Frydman l’a déposé. Depuis la Floride, il développe un site avec des contenus éditoriaux puis marchands. « France.com est la plus ancienne agence de voyages en ligne toujours sous la même direction », clamait-il sur son profil LinkedIn.

France.com et Atout france
L’ancien site France.com, développé par un franco-américain.

Jean-Noël Frydman est d’ailleurs venu rencontrer Christian Mantei. « C’était de mémoire en 2016 », explique-t-il. L’entrepreneur franco-américain lui explique qu’il veut faire évoluer son activité d’agence de voyages aux Etats-Unis, et « donner » France.com. « Dans la conversation, je comprends qu’il est prêt à donner la marque, mais en échange de plus de 10 millions d’euros », raconte avec amusement Christian Mantei, qui décide alors de prendre le dossier en main.

« J’ai déposé une plainte pour obtenir la propriété de France.com. C’était avec mon ami et très bon avocat Jean-François Vilotte, chez De Gaulle Fleurance. Il a observé une faille dans le dépôt de la marque France.com en France. » Le contentieux peut commencer. « J’étais un peu seul au début dans cette bataille. Sans trop y croire, l’Etat s’est ensuite montré solidaire de la démarche d’Atout France. »

Une victoire en France…

Par un jugement rendu le 27 novembre 2015, le Tribunal de grande instance de Paris fait droit à l’action en revendication de l’Etat français sur l’ensemble des marques françaises et communautaires ayant pour objet la dénomination France.com ainsi que sur le nom de domaine France.com.

Ce premier jugement est ensuite confirmé par un arrêt de la Cour d’appel du 22 septembre 2017, qui ordonne le transfert du nom de domaine France.com à l’Etat français, estimant qu’il était juridiquement fondé à opposer un droit au nom lui permettant d’en revendiquer la propriété.

… puis aux Etats-Unis

Consécutivement à son pourvoi en cassation formé contre cet arrêt – dont la procédure est toujours en cours -, Jean-Noël Frydman introduit une plainte le 19 avril 2018 auprès d’une juridiction fédérale américaine. Objectif : faire valoir ses droits en territoire américain, en attaquant la France pour … cybersquatting. « La partie adverse était convaincue que, culturellement, la justice américaine protègerait les entrepreneurs installés aux Etats-Unis. »

Or le 25 mars 2021, la cour d’appel fédérale de Virginie a finalement donné raison à la France et à Atout France. « Sa décision valide la stratégie initiée en 2015 par le gouvernement français, notamment en écartant les exceptions à l’immunité des Etats (Foreign Sovereign Immunities Act) invoquées par Monsieur Frydman », selon une source proche du dossier. « Cette décision est d’une portée très importante. Si la partie adverse peut toujours effectuer des recours, ses chances de succès sont désormais plus ténues. ».

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Le précédent de Travelocity

Dans le voyage, une autre affaire de cybersquatting a marqué l’industrie. Le 21 mai 2002, le tribunal de grande instance de Paris a condamné Pierre Duarte et Bassem Miled à verser 30 000 euros de dommages et intérêts à Travelocity.com, plus 7 500 € d’honoraires d’avocat. Les deux hommes avaient déposé la marque Travelocity en France, avant de créer une page web sans réel contenu à l’adresse travelocity.fr.

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1 commentaire
  1. david chelly dit

    Ce qui est surréaliste est à mon avis la tournure de l’article.
    Sur le fond, Atout France a dépossédé l’ancien titulaire du nom de domaine, qui en était le propriétaire légal, sans la moindre indemnité. Et on devrait s’en réjouir ? Pourquoi ne pas désormais faire la chasse à tous les noms de domaine qui comportent le mot France, et se les approprier ? Peut-être car on préfère chez AtoutFrance abuser du pouvoir politique pour seulement s’accaparer celui qui avait de la valeur. Et rien de risible au passage mentionnant « Plus de 10 millions », quand on connaît le secteur. C’est bien la privation d’un bien d’une personne à plus de 10 millions dont il s’agit ici.

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