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Pour agences, TO et clients, quel est le poids des « Conseils aux voyageurs » ?

Les fameux Conseils aux voyageurs sont au cœur de l’actualité depuis quelques jours. Mais quel est leur valeur ?

Les deux ex-otages au Bénin ont estimé qu’ils auraient « dû prendre davantage en compte les recommandations de l’État ». Depuis, les Conseils aux voyageurs et leurs cartes avec des zones verte, jaune, orange et rouge sont de tous les médias. L’événement aura au moins eu l’avantage de rappeler aux voyageurs l’existence de ces précieuses fiches établies par le ministère des Affaires étrangères. Mais quelle est leur valeur ?

Des « avis » non contraignants…

« Ce sont des avis du Quai d’Orsay, ils ne sont pas contraignants », à l’égard des citoyens français, souligne Emmanuelle Llop, avocate à la cour, pour le cabinet Equinoxe Avocats. « Il ne s’agit pas de consignes. La France n’interdit jamais, quel que soit le pays. C’est un principe lié à la souveraineté de l’Etat de destination et à la libre circulation des personnes ». Et à la diplomatie bien sûr.

Supposons maintenant qu’un client choisisse un séjour dans un hôtel situé en zone jaune au moment de la réservation, mais qui bascule en zone orange ou rouge quelques jours avant le départ. Pourra-t-il demander l’annulation auprès du professionnel ? « Avec le nouveau droit applicable au 1er juillet 2018, le professionnel ou le voyageur peut demander l’annulation sans frais en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables, à destination ou à proximité immédiate, ayant des conséquences sur l’exécution du voyage ou du transport. » Reste maintenant à savoir si l’avis du Quai d’Orsay, comme le passage du Sri Lanka en orange, est constitutif d’une circonstance exceptionnelle et inévitable, ajoute l’avocate. Un tribunal pourrait être amené à trancher cette question.

Les agences ont « une obligation de sécurité »

« Les agents de voyages ont une obligation de sécurité, il serait malvenu de ne pas tenir compte des conseils aux voyageurs et de leur mise à jour », ajoute Emmanuelle Llop. Car la responsabilité reste sur les épaules du professionnel qui a effectué la réservation, jusqu’à un certain point : si le voyageur séjourne dans une zone sans risques, mais choisit seul de s’aventurer en 4X4 dans une zone rouge, l’agence – qui n’a pas organisé l’excursion – ne devrait pas être tenue responsable.

« Voyageurs du Monde n’envoie pas de clients en zone rouge ou orange dans 99% des cas », indique son PDG Jean-François Rial. Le groupe suit donc les avis du Quai d’Orsay, mais s’autorise de très rares entorses, en tant compte de son expérience du terrain et de l’avis par exemple de l’équivalent du Quai d’Orsay au Royaume-Uni.

Clio ose la Syrie

Ce n’est d’ailleurs pas le seul. A titre d’exemple, quelques voyagistes osent la Corée du Nord (en orange, soit formellement déconseillée sauf raison impérative). Clio, lui, a décidé de programmer la Syrie, avec des départs garantis en septembre, octobre et novembre. Pourtant, le ministère des Affaires étrangères est formel : « Des agences de voyages proposent des séjours touristiques en Syrie. Il est rappelé que tout déplacement en Syrie, y compris à Damas, et Alep et Palmyre, est formellement déconseillé en raison des risques élevés auxquels s’exposent les voyageurs. »

« Les destinations à risques, il faut les éviter, en prenant en compte les zones rouges et oranges, mais aussi les avis du Seto, estime Emmanuel Llop. C’est une mauvaise idée de programmer la Syrie. Il faut raison garder. Plus globalement, je recommande aux agences de voyages de faire des fiches d’information très précises, pour éventuellement modérer l’avis d’un juge. » L’affaire Jolo rappelle avec force qu’il est de fait nécessaire de redoubler d’information à l’égard des clients : Ultramarina avait été condamné en 2006 à indemniser les trois touristes français enlevés en 2000 lors d’un stage de plongée, et détenus ensuite sur l’île de Jolo, aux Philippines. Le TO n’avait pris « aucune mesure » pour éviter d’exposer les voyageurs au risque d’enlèvement, avait estimé le tribunal de grande instance de Paris. Pourtant, ce n’était pas la zone du kidnapping qui était déconseillée, mais une zone voisine…

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