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Le ciel aérien traverse de grosses turbulences

Les faits : pertes financières, vagues de licenciements, réductions de flotte et des dessertes. Rachats et alliances pour tenter de faire face.L’historique : la flambée du prix du pétrole a plongé le transport aérien dans une nouvelle crise. Peut-être la plus grave de son histoire.L’enjeu : l’avenir de nombreuses compagnies, de tout le secteur du transport aérien et du tourisme mondial.

Déjà 100 dollars le baril début 2008, 130 en mai puis 147 en juillet… le prix du pétrole a flambé au premier semestre de l’année. Même si son cours s’est nettement replié depuis début septembre, le mal est fait, et les risques géopolitiques, voire naturels, comme l’a montré le passage de l’ouragan Gustav sur le golfe du Mexique, font toujours peser la menace d’un nouvel embrasement des prix. Le secteur du transport aérien a durement encaissé le coup, et le poids du kérosène pèse toujours plus lourd dans l’économie des compagnies. Devant les salaires, il représente aujourd’hui 30 à 40 % de l’ensemble de leurs coûts, contre moins de 15 % en l’an 2000. Au mois d’avril dernier, l’Association internationale du transport aérien (IATA) espérait encore que le secteur réaliserait un bénéfice de 4,5 Mds$ en 2008, confirmant les 5,6 Mds$ de 2007. Les choses se sont gâtées avec l’envolée des prix du pétrole, et l’association a dû réviser ses prévisions à la baisse, tablant d’abord sur une perte de 2,3 Mds$, avant de dévoiler qu’elle atteint 5,2 Mds$ début septembre. Et personne ne serait vraiment surpris si le bilan de fin d’année était plus catastrophique encore. Même sans atteindre l’endettement record de 1,2 Mde d’Alitalia, ou les 13,4 Mds$ de perte des cinq grandes compagnies américaines sur les six premiers mois de 2008, la plupart des transporteurs perdent aujourd’hui de l’argent. La bérézina n’est pourtant pas générale. Les compagnies du Golfe semblent faire bande à part et continuent d’afficher une réussite insolente. Avant les spectaculaires incidents à répétition de l’été, la compagnie australienne Qantas annonçait un résultat en forte hausse (+44 %). Air France/KLM affiche aussi de bonnes performances financières, mais la compagnie le doit à sa politique de couverture, stratégie financière qui consiste à acheter à l’avance le carburant à un prix fixé, pour éviter de subir les fluctuations des cours. Sans cela, elle serait déjà dans le rouge.

déjà quelques mesures prises

Si la liste des compagnies bénéficiaires est courte, celles qui se trouvent en danger s’allonge. Certaines ont déjà plongé : durant les six premiers mois de l’année 2008, pas moins de 25 compagnies aériennes affiliées à l’IATA ont cessé leurs activités, contre huit seulement au cours des six mois qui avaient suivi les attentats de septembre 2001. Pour ne pas connaître le même sort toutes les compagnies prennent des mesures visant à réduire la consommation de carburant des avions. Et tous les moyens sont bons : Japan Airlines a choisi une vaisselle plus légère pour sa première classe, Singapore Airlines optimise la quantité d’eau embarquée, Southwest Airlines fait voler ses avions plus lentement, tandis que la Lufthansa les nettoie plus souvent, afin d’améliorer leur pénétration dans l’air, rappelait récemment un article du quotidien Suisse Le Temps. Ces dispositions ne suffisent évidemment pas, et les compagnies prennent des mesures bien plus drastiques. Les premières concernent l’augmentation des tarifs, de manière définitive ou momentanée, grâce aux surcharges carburant. Seules les low cost se sont refusées à les appliquer, mais pourront-elles pratiquer longtemps cette politique ? Comme cela ne suffit pas, le passager est encore prié de passer à la caisse, avec un nombre de services payants qui augmente sans cesse. La réduction de l’offre est l’autre mesure radicale employée pour tenter d’atténuer les effets de la crise. Qantas supprime ses vols entre Melbourne et Tokyo, Thaï Airways ferme ses liaisons Bangkok et New York, tout en réduisant ses rotations vers Los Angeles. Japan Airlines annule 15 destinations de son plan de vol et réduit son offre sur quatre autres. Aux États-Unis, Continental et American Airlines ont, elles également, annoncé des réductions de capacités. Au mieux, les compagnies limitent leurs capacités en deçà de ce qui était initialement prévu, comme devraient le faire British Airways et Air France-KLM pour cet hiver. Au pire, les compagnies ne se contentent pas de réduire la voilure, elles vont jusqu’à mettre leurs appareils trop gourmands en kérosène au rencard. Aux États-Unis, ce sont les Boeing 737 qui font les frais de l’opération. Continental Airlines devrait en retirer 67 avant fin 2009. United sortira de sa flotte une centaine d’appareils de ce type. Même si c’est dans de moindres proportions (les flottes sont moins importantes et moins obsolètes), les compagnies européennes font de même. SAS taille dans sa flotte comme dans celle de sa filiale espagnole Spanair. Iberia va se passer de onze McDonnell Douglas. Même Ryanair pourrait y venir, et Michael O’Leary, le patron de la compagnie, envisage d’immobiliser 10 % de sa flotte cet hiver si les tarifs du carburant restent aussi élevés. Une étude américaine, pourtant publiée avant l’été, prévoit que près d’un millier d’appareils pourraient ainsi quitter les tarmacs.

i Une modification en profondeur

Les employés des compagnies font les frais de ces réductions de capacités, et les annonces de suppressions d’emplois se multiplient. Malgré ses bénéfices de l’année, Qantas en annonce 1 500, tandis que SAS devrait allonger sa liste de 2 000 postes supprimés de 500 emplois supplémentaires. Le plan de relance d’Alitalia entraînera une importante casse sociale, et on parle déjà de 5 000 à 7 000 emplois en moins. Le Japon n’est pas épargné par les compressions de personnel : Japan Airlines va supprimer 4 300 emplois en 2009. Aux États-Unis, les grandes compagnies taillent durement dans leurs effectifs, avec 3 000 emplois en moins chez Continental, 6 840 chez American Airlines et 7 000 chez United Airlines. Au final, l’industrie du transport aérien (soit 8 % du PIB de la planète) pourrait perdre 100 000 emplois dans le monde. Du côté du trafic passager, la situation semble moins dramatique, même si le taux de croissance de 2007 (+7,4 %) n’est déjà plus qu’un lointain souvenir. Les chiffres IATA dévoilés début août traduisent un ralentissement de la croissance du trafic mondial. La progression entre juin 2006 et juin 2007 était de 5,3 %, elle n’est plus que de 3,8 % entre juin 2007 et juin 2008, soit la plus faible enregistrée depuis 2003, année de la crise du SRAS. Ce ralentissement vient confirmer celui du mois d’avril (+3 % contre 5,4 % en avril 2007). Toutes les zones géographiques ne sont cependant pas affectées de la même façon, et les compagnies européennes progressent moins vite que leurs homologues asiatiques ou nord-américaines. Seules quelques régions du monde, comme le Moyen-Orient ou l’Amérique du Sud continuent de progresser à un bon rythme. Globalement, ce ralentissement de la croissance n’ayant pas été anticipé, la capacité mondiale du trafic poursuivait sa hausse à un rythme supérieur à la demande, entraînant une baisse du coefficient d’occupation des avions, qui descend à 77,6 %, contre 78,8 % en juin 2007. « La crise va modifier en profondeur le transport aérien », déclarait au magazine L’Express Pierre-Henri Gourgeon, le directeur général exécutif du Groupe Air France-KLM, ajoutant qu’elle allait « faire beaucoup de victimes ». Il ne pensait pas à celles des crashs de Spanair et d’Itek Air, qui sont venus assombrir dramatiquement un été décidément bien noir pour le transport aérien.

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