5 Désert blanc

Dans le désert blanc, les nuits sont aussi belles que les jours. Il y a d’abord ces couchers de soleil somptueux, quand la craie, éclatante quelques heures plus tôt, se teinte de rose et de mauve puis se paillette d’or, caressée par les premiers rayons de lune. À l’approche du bivouac, notre caravane se dessine en ombre chinoise sur les rochers luminescents, dans un paysage fantasmagorique que n’auraient pas renié les surréalistes. Lorsque s’allument les premières étoiles, chacun a depuis longtemps choisi l’emplacement de sa tente ou de son matelas. Quel que soit le mode de couchage, les chambres sont avec vue. Ici et là, tels d’immenses cierges fluorescents, des pitons laiteux balisent le campement, au centre duquel les chameliers ont dressé un petit salon égyptien, trois panneaux de tissu aux couleurs chatoyantes, qui abrite le repas du soir. Le poulet grillé a mis en alerte le petit monde du désert. Sitôt les randonneurs enfouis dans leur duvet, les fennecs entrent en action. Objectif : chiper quelques reliefs du dîner avec une chorégraphie bien réglée. Course silencieuse, demi-tour, dérapage, retour derrière un rocher à l’affût. Nos visiteurs du soir s’élancent tour à tour. On n’est pas prêt d’oublier cette sarabande au clair de lune, qui fait battre le coeur un peu plus vite. Dans le faisceau de la lampe de poche, on distingue à peine leurs longues oreilles légendaires. Au ras du sable, leurs yeux brillent comme des étoiles tombées du ciel.