Retrouvez l'actualité du Tourisme pour les professionnels du secteur tourisme avec l'Echo Touristique : agences de voyages, GDS, prestataires spécialisés, voyagistes

190 ans d’abolition : quand l’esclavage mauricien s’intègre au tourisme

Une histoire cachée voire honteuse revient en force parmi les thématiques développées par l’OT mauricien. Un circuit « route de l’Esclave » émerge.

Discours en créole, dépôts de gerbes aux monuments de la résistance à l’oppression, méga conférence universitaire… Ex-colonie française puis britannique, Maurice vient de commémorer le 190e anniversaire (1er mars 1835) de l’abolition de l’esclavage. La Révolution l’avait votée une première fois, en 1794, mais Bonaparte était revenu dessus !

Attaché à cette histoire, le tout nouveau gouvernement mauricien met à profit l’événement pour le faire cadrer avec l’évolution de la clientèle, majoritairement française (400 000 à 500 000 pour 1,4 million de touristes), tournée de plus en plus vers les resorts à villas et les autotours, avec des centres d’intérêt plus « conscients » que le balnéaire all inclusive.

Un circuit « route de l’Esclave »

« Cette thématique était tombée aux oubliettes, confie Savin Teeha », responsable du marché français au Mauritius Tourism Promotion Authority (MPTA). « Dès cette année, le site du MTPA présentera un circuit « route de l’Esclave », en attendant une brochure ».

Quand l’esclavage mauricien s’intègre au tourisme
Cérémonie du 190e anniversaire de l’abolition de l’esclavage à Maurice : l’occasion pour les autorités de réfléchir au redéploiement du tourisme d’histoire. ©Dominique de La Tour

Le souvenir de la traite humaine fait partie intégrante de la culture locale. Et se retrouve sur de nombreux sites. Parmi eux, le fort Henrik Hendrik où les premières victimes arrivèrent avec les Hollandais. Aussi, le bassin aux Esclaves de Pamplemousse où elles étaient vendues aux enchères. Ou encore le musée dédié de Port-Louis, qui espère effacer la longue honte des Mauriciens d’être issus d’une main-d’œuvre servile. S’y ajoutent les points de révolte de Vieux-Grand Port et surtout, de la montagne-symbole de l’île, le Morne Brabant connu des randonneurs.

Dans le sud-ouest de Maurice, un agréable « sentier des esclaves » monte effectivement jusqu’à mi-pente de ce « Morn ». Une petite randonnée de 3-4 heures pour qui veut découvrir cet endroit symbolique. C’est là en effet qu’une communauté de « nègres marrons » (esclaves évadés ayant pris le maquis), retranchée depuis deux siècles sur cette forteresse naturelle, se serait jetée dans le vide en voyant surgir les Blancs… Ils venaient, comble du tragique, leur annoncer l’abolition !

L’engagement des Indiens

C’est du moins ce qu’affirme la Légende Dorée mauricienne… « J’ai pas mal de clients qui me demandent cette excursion, confie Jaya Bissessur, guide chez le réceptif Mautourco, mais je ne me souviens pas qu’elle ait été au programme des groupes. C’est dommage : si le Morn est sacré pour nous, c’est qu’il est lié à l’histoire commune : pour beaucoup, nous sommes descendants d’esclaves. »

D’origine indienne, Jaya est plutôt liée à ses ancêtres « engagés » – une forme de « volontariat » mise en place par les Britanniques. Elle visait, par des contrats trompeurs, à s’assurer d’une main-d’œuvre indienne pas chère pour… prendre le relais de la source tarie de l’esclavage. Un remarquable musée abordant ce sujet, Aapravasi Ghat, a été ouvert en 2006 à Port-Louis. Il s’intègre bien dans la route thématique.

En 2024, l’Île Maurice a accueilli 1,382 million de touristes venus de l’étranger, soit une augmentation de 6,7% par rapport à 2023. Parmi eux, 339 421 voyageurs proviennent de la France (+6,2%). Et près de 50% sont des habitués qui viennent en voisins : les Réunionnais. Eux plus encore sont touchés par les histoires différentes mais comparables des deux îles. Toutes deux marquées par un passé qu’on commence à peine à aborder.

À lire aussi

Laisser votre commentaire (qui sera publié après modération)

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Dans la même rubrique