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[Tribune] Faut-il changer de métier pour sauver la planète ?

Alors que l’impact du dérèglement climatique se fait de plus en plus sentir, la question taraude un nombre croissant de professionnels du tourisme. Faut-il pour autant quitter le métier ? Entrepreneur engagé à la tête de Vie Sauvage, membre du bureau d’Agir pour un tourisme responsable, Jean-Christophe Guérin partage sa vision.

Jean-Christophe Guérin.

Faut-il changer de métier pour sauver la planète ? Les deux mon capitaine !

Il est salutaire de voir, dans cette transition, de plus en plus de personnes s’engager dans un changement de métier pour mettre en cohérence leurs valeurs et leur compréhension des enjeux climatiques.

Mais est-ce la seule option pour résoudre le problème ? Devons-nous demander à tous les métiers dépendants du pétrole d’interrompre immédiatement leur activité ? Est-ce réalisable ? Difficile à mettre en œuvre tant les effets systémiques seraient colossaux.

Pour autant, les rapports d’experts confirment, les uns après les autres, que la transition ne peut être à la marge et qu’il nous faut radicalement revoir nos organisations humaines. Cela invite à un changement drastique, une refonte de fond en comble, quel que soit le secteur d’activité, personne ne peut, ne pourra en faire l’économie.

Rester dans les métiers du tourisme a autant de sens que de le quitter ! Parce qu’il y a tout à repenser et réinventer ! Rester oblige à s’engager dans cette transition !

Le premier engagement, c’est de se former aux enjeux du climat, quelle que soit sa position (étudiant, salarié, freelance, cadre, dirigeant). C’est le socle pour comprendre l’ampleur du problème, l’assimiler puis se mettre en action ! Faire sa part, individuelle comme collective et mettre en œuvre une stratégie ambitieuse et motivante !

Transformer nos organisations : le premier levier, c’est de réduire les impacts de nos organisations. Si la proportion des émissions de l’organisation du voyage est assez faible comparée au voyage lui-même, il y a du sens à mettre en œuvre un plan de sobriété carbone, car il est possible d’agir vite et de concrétiser des changements à notre échelle.

Et le voyage ? C’est bien là le plus gros sujet puisqu’il est le sens de notre métier, la création de valeur dont dépend notre secteur.

L’Avion : 80 à 90% du sujet carbone se concentre sur ce seul outil, pièce maîtresse de la mobilité et qui implique autant les agences émettrices que réceptives et toute la chaîne qui s’est construite autour. Et pour autant, soyons clair, nous n’avons pas LA solution (les rapports scientifiques, y compris des experts de l’aérien, ne manquent pas). 

Tout pousse à réduire et croire dans les solutions techno (hydrogène, électrification, SAF…) est plus qu’hasardeux pour imaginer une croissance ou un maintien de notre niveau de passagers atteint ces dernières années…

Être transparent sur ce constat et communiquer dans ce sens, plutôt qu’éviter le sujet ou rassurer par «la compensation».

Engager la réduction n’a rien de tabou, c’est même assez cohérent si nous tenons compte des prévisions de stock et des limites d’approvisionnement… Car cette limite, physique, va naturellement s’imposer et rendre le voyage plus rare… Par le prix ou par une régulation plus équitable ?

La réduction passe, de notre côté, par une évaluation précise de notre intensité carbone (combien de TCo2 génère la marge brute de mon organisation) et déterminer une stratégie de réduction de cette intensité pour qu’elle soit en ligne avec la réduction attendue en 2050 !

Il nous faut apporter une contribution carbone. Cette démarche ne neutralise pas les émissions mais permet de mobiliser des moyens pour soutenir des projets de réduction, d’absorption ou de préservation des puits de carbone existants tout en sensibilisant nos clients. Être transparent ce n’est pas culpabiliser, mais expliquer ce que nous pouvons faire de plus concret, cohérent.

Revoir nos « produits » et ce qui nous fait vivre ! Une stratégie de réduction n’est pas seulement, imaginer moins (plus que probable si nous ne changeons pas les offres actuelles), mais aussi différemment : autre moyen de mobilité, autre périmètre de destinations (quel territoire en fonction de quels accès, quelle durée de voyage), création de valeur ajoutée repensée, nouveaux clients à trouver…

Et que faire aujourd’hui de nos voyages lointains qui dépendent de l’avion ? Réponse : les rendre plus utiles !

Le tourisme diffuse aux quatre coins de la planète des bénéfices économiques, sociaux et même environnementaux (et tout autant d’effets pervers…). C’est sur ces éléments que nous devons être de plus en plus exigeants.

L’utilité du voyage, c’est :

– Augmenter significativement la contribution économique aux hôtes de la destination, veiller à une diffusion la plus fine possible (et équitable) mais aussi apporter une contribution à ceux qui ne vivent pas du tourisme mais participent, par leur simple présence, au sens du voyage.

– Prioriser des hébergements, des activités, des transports qui s’engagent dans la réduction de leur empreinte carbone et environnementale.

– Promouvoir les territoires insoupçonnés, peu touristiques pour quitter l’enchaînement des best of, vecteur de surfréquentation, et diffuser plus largement les revenus.

Toutes ces actions nécessitent une évaluation précise et une feuille de route, une communication transparente et des actions concrètes, visibles et perceptibles par les voyageurs.

Car ce sont nos clients mais aussi le grand public (et les médias) qui valideront l’acceptabilité environnementale et sociale du voyage de demain.

L’aventure, si vous l’acceptez, sera engagée et sans concession mais passionnante !

Jean-Christophe Guérin

Entrepreneur et voyageur engagé

*Cette tribune a été initialement rédigée à l’invitation de Thomas Loubert du réseau TogeZer travel. Nous l’avons reproduite en intégralité ici.
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