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Rapatriement : des compagnies aériennes ont-elles (largement) abusé ?

Nous vous racontons les péripéties de voyageurs français, qui ont vu flamber les tarifs des billets d’avion, malgré des promesses de prix modérés.

Nous avons reçu le témoignage kafkaïen d’Helena, 22 ans. Cette étudiante de l’Escaet arrive en Nouvelle-Zélande le 4 mars, pour un voyage d’un mois. Une semaine avant son vol retour, le 25 mars, la compagnie Emirates lui indique par mail que son segment Dubaï-Paris est supprimé. La voyageuse tente alors de contacter son agence en ligne Budgetair pour modifier son vol Christchurch-Paris, en vain. Une agence traditionnelle locale lui propose ensuite le dernier siège sur un vol, au tarif trop élevé. « Le confinement démarre, je me trouve dans une auberge avec une dizaine d’autres Français. » Le gouvernement français commence à évoquer des rapatriements. L’ambassade crée d’ailleurs un formulaire pour « recenser les Français qui ont des difficultés à rentrer », auquel elle s’inscrit. « Le 26 mars, un mail nous indique qu’un accord a été passé avec Qatar Airways : la compagnie assure des vols entièrement dédiés aux Français de Nouvelle-Zélande qui veulent rentrer. » L’espoir de rentrer sans se ruiner va vite être douché.

« Je fais donc une recherche pour un Auckland-Paris le 1er avril, avec le code de réduction TRAVELHOME fourni par l’ambassade. Le prix le moins cher atteint 15200 NZD, soit 8 300 euros. » (voir la capture d’écran ci-après). Trop cher, évidemment. Peu après, « l’ambassade soutient que les tarifs de Qatar ont baissé et je retourne donc sur le site de la compagnie pour regarder. Les prix sont exorbitants, jusqu’à 14 000 euros : seules des classes affaires sont disponibles. Je trouve finalement un billet Auckland-Paris à 3300 NZD (1800€) …le 13 avril seulement, première date abordable. » Bilan : 3100 euros déboursés entre le vol annulé et le vol de substitution, et Budgetair n’aura envoyé qu’un mail automatique pour annoncer la suppression du vol initial sur Emirates, le seul jour J. « J’ai la chance d’avoir des parents qui peuvent m’aider à gérer toutes ces dépenses. Mais la plupart des Français dans mon auberge ne peuvent pas se le permettre. »

Un autre témoignage

Un autre témoignage nous est parvenu, celui d’une famille de trois adultes qui a réservé un vol à destination du Costa Rica, pour un séjour du 8 au 24 mars 2020. Le retour San Jose/Paris doit être opéré par United Airlines via New-York. Le 17 mars, alors que les frontières se ferment, les trois Français redoutent fortement que leur vol retour soit annulé à cause du Covid-19. Ils veulent l’avancer, mais ils ne parviennent pas à joindre leur agence Go Voyages. « Nous sommes rentrés par nos propres moyens par un vol Air France, pour 1620 euros par passager », explique la chef de famille. Le 22 mars en soirée, la compagnie United indique que le vol du surlendemain est bel et bien annulé. Ce que Go Voyages confirmera le 23 mars, à 24 heures du départ initialement prévu, précisant qu’aucun vol de remplacement n’est programmé dans les trois mois. « Nous sommes convaincus qu’avec votre collaboration -Go Voyages (…) proposant le plus large choix d’offres de vols aux meilleurs prix (…) comme vous le prônez sur vos supports commerciaux-, nous aurions pu rentrer en France à un moindre coût », écrit la famille à l’agence en ligne.

Le point de vue (décalé) de Jean-Baptiste Lemoyne

Interrogé sur les prix qui dérapent, Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’Etat, a répondu mardi 31 mars lors d’un point presse, sans montrer de grandes inquiétudes : « Sur les vols commerciaux, pour lesquels les compagnies et notamment Air France continuent d’assurer des dessertes, nous n’avons pas la main. Mais nous avons demandé avec Jean-Yves Le Drian que les compagnies – naturellement notre levier est sur les compagnies françaises – pratiquent des tarifs modérés, et n’utilisent pas leur système d’intelligence artificielle. »

« Par ailleurs, il y a des vols affrétés, qui sont des vols pris en charge par l’Etat, pour lesquels nous demandons aux passagers une participation qui est de l’ordre de 450 euros pour la zone Asie, et plutôt autour de 900 euros pour l’Australie par exemple, et là, on a la main. » Et le ministre a ajouté : « Pour les affrètements, nous travaillons essentiellement avec Air France et Qatar Airways. Qatar Airways joue le jeu -franchement- de manière extraordinaire. » Vraiment ?

Chose certaine, depuis le 14 mars, la compagnie a rapatrié plus de 14 000 passagers en France sur une quarantaine de vols réguliers et plus de 4 000 sur une dizaine de vols charter, souligne un communiqué diffusé hier.

« Nous sommes en train de voir le bout du tunnel pour le retour des touristes français qui étaient bloqués », soulignait Jean-Baptiste Lemoyne mardi 31 mars. Pas tout à fait. Au regard des témoignages qui pleuvent sur les réseaux sociaux, des demandes de dédommagement et des litiges pourraient suivre au sortir de la crise du Covid-19… Sauf si transporteurs, ambassades et distributeurs trouvent des compromis acceptables pour les voyageurs lésés.

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