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Pharaonique

L’objectif pharaonique de 30 millions de visiteurs que se fixe l’Egypte à l’horizon 2017 me donne le vertige. Ce pays, qui en a accueilli 10 millions en 2011, est une merveille culturelle qui souffre déjà de l’affluence étrangère. Comment concilier essor touristique et protection de l’immense patrimoine culturel égyptien ?

Pendant 40 siècles, les temples de l’Egypte ancienne ont été momifiés par les dunes. Débarrassées de leurs bandelettes de sable, les couleurs, visibles sur cette lithographie réalisée au début du 19e siècle par l’irlandais David Roberts, ont fané en moins de deux siècles. Le soleil a fait des ravages depuis que les sites ont été désensevelis. Aujourd’hui, les voyageurs ont l’outrecuidance de respirer et de transpirer. Surtout, quand les tombeaux se transforment en étuves l’été venu.La Vallée des Rois et des Reines sont en danger. Les pharaons doivent se retourner dans leur tombeau…

Lors de son récent passage à Paris, le ministre égyptien du Tourisme Mounir Fakhry Abdel Nour a reconnu que certains touristes sont « peu respectueux » des sites de l’Egypte ancienne. Ils « posent leurs doigts sur les hiéroglyphes et les couleurs », en plus de les prendre en photo avec leurs flashs. « Il faut mettre un terme à cela », assure le ministre. La préservation doit se faire au dépend des prix qui sont pratiqués. Ce genre de tourisme culturel est plutôt haut de gamme ». Le ministre, qui espère à priori figurer dans le gouvernement constitué après les présidentielles en mai, se dit favorable à la hausse tarifaire des entrées aux tombeaux des pharaons, et donc à celle des croisières.

La bonne nouvelle pour la préservation du pays, c’est qu’une telle inflation découragerait nombre de touristes attirés justement par les petits prix… L’objectif pharaonique de 30 millions de visiteurs me semble, du coup, complètement illusoire. Le ministre égyptien du Tourisme veut le beurre et l’argent du beurre. Je ne comprends pas pourquoi le pays ne veut pas se contenter d’une augmentation de la qualité du produit touristique, qui s’accompagnerait de facto d’une hausse des recettes.

Le ministre ajoute que la croissance des arrivées touristiques passera par la diversification du produit touristique (avec des produits comme le tourisme vert, sportif, religieux, axé sur la découverte du désert), et la dilution concomitante des flux sur le territoire. Mais en toute bonne foi, le triplement du nombre de visiteurs dans 5 ans pourrait difficilement se réaliser sans un sursaut de ces croisières sur le Nil.

Que laisserons-nous à nos enfants et petits-enfants si les arrivées se développent rapidement ? Des facsimilés, comme pour les grottes de Lascaux ? Le dilemme de l’Egypte est commun à d’autres destinations : concilier les besoins immédiats des populations locales, dans un pays en mal de recettes touristiques, et l’avenir du potentiel inestimable du pays. En Egypte par exemple, le tourisme était encore en 2010 la première source de devises étrangères, et le secteur emploie plus d’une personne sur sept.

Linda Lainé

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