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LOW COST LONG-COURRIER, la tendance qui décolle

Si le low cost court et moyen-courrier a déjà fait ses preuves, le modèle reste encore à définir sur le long-courrier. Frileuses il y a peu, les compagnies européennes sont de plus en plus nombreuses à franchir le pas, se frottant aux défis structurels et sociaux qu'un tel pari représente.

La guerre des prix sur les vols transatlantiques aura rarement été aussi coriace. Moins de 200 € pour un Paris-New York, annonçait Norwegian en février. « 223 € ! », rétorquait XL Airways en avril à grand renfort d'affichages publicitaires, changeant même de logo pour l'occasion afin de revendiquer son identité française face à sa concurrente scandinave. Un bras de fer qui en dit long sur l'engouement actuel en Europe pour le modèle low cost long-courrier.

Pas de « copier-coller »

Il y a deux ans encore, personne ou presque parmi les têtes dirigeantes de l'aérien n'aurait parié sur lui. Mais depuis quelques mois, les annonces se multiplient sur le Vieux Continent. En novembre 2015, Lufthansa, le premier groupe aérien européen, se positionnait sur le créneau avec Eurowings, bientôt suivi par le groupe français Dubreuil, propriétaire d'Air Caraïbes, qui confirmait à la mi-mars le lancement de French Blue, nouvelle structure à bas coûts dont le décollage est prévu le 15 septembre. Ryanair a aussi fait sensation en annonçant en mars 2015 des billets transatlantiques à partir de 14 € avant d'opérer un rétropédalage, tout en soulignant que « le groupe est toujours très désireux de lancer ce projet ». Du côté d'IAG, maison mère de British Airways et d'Iberia, la formule « est à l'étude ».

Originaire d'Asie, où les compagnies traditionnelles développent depuis le milieu des années 2000 des filiales dédiées, l'adaptation du business model low cost au long-courrier a plus que jamais le vent en poupe. Si la baisse du prix du pétrole est sans conteste une bouffée d'oxygène qui favorise le développement de structures à bas coûts pour des vols longs (plus de 5 h), le changement de paradigme est d'abord porté par la volonté des compagnies de se doter de structures plus compétitives. Pour autant, la simple transposition des recettes du low cost court et moyen-courrier ne fonctionnerait pas. La longueur du vol implique de fait des coûts de carburant et d'équipage bien plus élevés.

Question sociale

« Le low cost permet de réduire les coûts de plus de 50 % dans le court-courrier, il ne les réduirait que de 20 à 30 % dans le long-courrier », estime Didier Bréchemier, spécialiste du transport aérien au sein du cabinet Roland Berger. Pour obtenir ces résultats, encore faut-il parvenir à résoudre l'épineuse question sociale. Pour améliorer la productivité, les compagnies misent sur des règles de recours aux navigants plus souples impliquant, entre autres, plus d'heures de vol et moins de repos. « Pour faire du low cost long-courrier, il faut un contrat social qui le permette. On est loin du compte avec la majorité des grandes compagnies aériennes européennes. À l'instar de Lufthansa, elles peuvent mettre en place une nouvelle compagnie dédiée comme Eurowings. Dans tous les cas, ces compagnies devraient repartir à la table des négociations avec les syndicats, notamment les pilotes, ce qui est souvent difficile, comme nous le voyons avec Air France », analyse Didier Bréchemier.

Avec French Blue, le groupe Dubreuil n'a d'ailleurs pas manqué d'éveiller l'inquiétude du personnel d'Air Caraïbes. Dans un préavis de grève déposé au mois d'avril, l'intersyndicale de la compagnie exprimait ses craintes quant à la pérennité de l'emploi, redoutant un transfert de lignes et de parts de marché vers la nouvelle entité qui bénéficie de coûts de personnels bien moindres. Pour imposer des conditions plus souples aux pilotes et personnel de bord, les transporteurs ont le plus souvent recours à la création d'une filiale qui leur permet de repartir d'une feuille blanche sur le plan contractuel.

Tarifs « nus »

Autre levier pour faire baisser les coûts : l'offre dépackagée, à savoir des tarifs « nus » auxquels viennent s'ajouter des services additionnels (choix du siège, bagage en soute, repas…), les « frais ancillaires ». Reste à savoir quelle sera l'acceptation de cette offre « brute » par le client, qui s'est certes habitué sur le court et moyen-courrier à un produit simple avec des options supplémentaires, mais découvre cette offre dépouillée sur des vols plus longs. En réalité, le service des low cost ressemble de plus en plus à celui des transporteurs traditionnels. « Entre le low cost pur et dur et l'offre des compagnies régulières, des modèles hybrides font surface, cherchant un équilibre entre une structure de coûts efficace et la nécessité de répondre aux besoins des clients en termes de services », assure Philippe Berland, directeur transport, tourisme et voyage d'affaires chez Sia Partners. En France, XL Airways met d'ailleurs l'accent dans sa dernière campagne de communication sur les bagages et repas inclus dans le tarif, quand French Blue se revendique comme une compagnie smart cost maintenant un certain niveau de confort. Le marketing joue ici un rôle primordial, le succès des low cost long-courrier dépendant aussi de leur capacité à se construire une notoriété suffisante pour maximiser les ventes directes, sans passer par les intermédiaires classiques de la distribution que sont les GDS ou encore les agences de voyage en ligne.

Les pionnières du low cost long-courrier en Europe affichent de bons résultats. Ainsi, Eurowings, dont le projet de développement a été présenté par Lufthansa en 2015, a déjà atteint ses objectifs avec des avions pleins, dit-elle, à plus de 90 %. La flotte long-courrier, composée d'Airbus A330-200, passera d'ailleurs de deux à sept appareils au printemps 2017. De quoi encourager les compagnies historiques encore indécises à sauter le pas.

« Le low cost réduirait les coûts de 20 à 30% dans le long-courrier » Didier Bréchemier, spécialiste du transport aérien, cabinet Roland Berger.

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