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Les hôteliers veulent en finir avec les abus des e-agences

Chaînes volontaires et syndicats se sont réunis pour mettre fin à la pression tarifaire des agences en ligne sur les hôteliers. Un guide des bonnes pratiques pourrait voir le jour cette année. Les députés pourraient être saisis pour que les contrats soient régis par le droit commercial.

Assez ! Le 9 mars, une quinzaine de professionnels de l’hôtellerie (syndicats et chaînes volontaires) se sont rencontrés pour échanger sur leurs relations tendues avec les agences de voyages en ligne. Relations qui peuvent même tourner au diktat commercial, au détriment des hôtels indépendants, bien sûr ! « Il y a une vraie volonté de l’ensemble des chaînes volontaires à travailler sur l’élaboration de règles déontologiques avec les agences en ligne », explique Laurent Duc, le président de la Fédération nationale de l’hôtellerie française à l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie, à la sortie de la réunion. La situation n’est en effet plus tenable selon lui. « Nous plaidons pour une harmonisation des procédés, ajoute-t-il. Les contrats sont trop déséquilibrés. Tous les sites veulent, par exemple, que les hôteliers leur garantissent leur dernière chambre disponible, ce qui est totalement abusif ». Parité de tarifs, de disponibilités et de conditions de ventes : les hôteliers sont, depuis des années, soumis à de fortes obligations qu’ils jugent unilatérales. « Les agences renouvellent leur contrat annuellement et en profitent alors pour monter les taux de commission à leur guise. Les hôteliers ont-ils vraiment le choix ? Non, car s’ils refusent, le site les sortira », note-t-il.

SOUS LA PRESSION DES FOURNISSEURS

On se souvient qu’en octobre dernier, Choice Hotels, pour avoir refusé les exigences d’Expedia lors de la renégociation de leur contrat, s’était vu retirer du site en une nuit l’ensemble de ses 5 000 hôtels. Un mois plus tard, les deux groupes enterraient la hache de guerre. « Aujourd’hui c’est rentré dans l’ordre. Choice Hotels a signé, en fin d’année, un accord mondial de trois ans avec Expedia qui est plus équilibré », indique Isabelle Rochelandet, sa vice-présidente Europe. En d’autres termes, chacun a mis de l’eau dans son vin pour se retrouver sur un terrain d’entente. C’est d’ailleurs certainement sous la pression des fournisseurs qu’Expedia a mis en place, en 2009, un nouveau contrat, plus light, baptisé Expedia Easy Manage (EEM). Le principe est simple : le client paie l’hôtelier, qui reverse 15 % de commission au site. « L’EEM intéresse les hôtels qui n’ont pas besoin d’une forte visibilité de notre part », explique Emmanuel Parisot, le directeur de marché France d’Expedia. Ce partenariat concerne typiquement l’auberge de 15 chambres, bien placée, au pied de la cathédrale de Strasbourg, à la différence du premier contrat, historique, plus draconien et visant davantage les hôtels haut de gamme qui ont besoin d’attirer la clientèle internationale. L’Expedia Special Rate (ESR) repose sur un prix net « défini » par l’hôtel. En fait, l’hébergeur doit accorder un prix 25 % inférieur à son meilleur tarif… « De quoi saigner certains hôteliers indépendants », estime un observateur avisé. « Nous ne forçons personne à signer un contrat, rétorque Emmanuel Parisot. Nous proposons à l’hôtel de préserver 75 % du prix d’une chambre qu’il n’aurait peut-être jamais vendue. » Car le groupe Expedia, qui a écoulé 70 millions de nuitées en 2009, a une force de frappe marketing considérable. Et dans le cadre de l’ESR, il s’engage : le géant américain vend l’hôtel seul, ainsi qu’en forfait dynamique, et lui assure une forte visibilité, notamment via ses 15 000affiliés. Du côté d’eBookers, c’est Orbitz, sa maison mère, qui négocie avec les hôtels. « Nous sommes la troisième plus grande agence en ligne internationale, au niveau des ventes hôtelières. Du coup, notre rapport de force est probablement plus équilibré. Et nos pratiques, moins agressives, tant au niveau des taux de commission que de notre façon de construire des relations à long terme », indique Guillaume Cussac, directeur général d’eBookers France (et ex-président d’Expedia). Sur le terrain, les hôtels indépendants ont forcément un handicap par rapport aux grands groupes aux milliers de chambres, qui disposent de leurs propres outils de commercialisation. « Les relations avec les hôteliers sont du même ordre que celles avec les compagnies aériennes, les TO ou les loueurs de voitures, résume Guillaume Cussac. C’est au final une histoire de gros sous ! Les points d’achoppement, quand ils existent, tournent autour du taux de commission. Des groupes comme Expedia et Booking.com ont des positions si fortes qu’ils peuvent en tirer parti. » Pour mettre fin au monopole de ces agences, chaînes volontaires et syndicats n’excluent pas la mise en place d’une action commune. « On pourrait décider de fermer tous les hôtels d’un pays à la réservation. Nous n’excluons pas non plus de saisir les députés pour que les contrats soient régis par le droit commercial français », précise Laurent Duc.

MULTIPLIER LES CANAUX DE VENTE

En attendant, pour sa survie, le principal recours de l’hôtelier est de multiplier ses canaux de vente. Donner trop de pouvoir à un seul intermédiaire, c’est se mettre en danger le jour où le moindre problème survient. Ainsi, pour garantir aux franchisés de dégager de meilleures marges (la commission moyenne d’un intermédiaire oscille entre 15 % et 20 %), et de garder le contrôle sur la gestion de leurs inventaires et de leurs tarifs, les groupes hôteliers investissent en masse sur leurs sites maison. Choice Hotels rénovera dans le courant de l’année ses sites Web français et américain. Best Western joue aussi cette carte. Pour la chaîne, la multiplication des intermédiaires n’apporte pas de services supplémentaires au client qui, en réservant sur le site de l’enseigne, ne peut qu’être gagnant sur la qualité de la prestation. « Les meilleurs prix et la meilleure disponibilité sont sur Bestwestern.fr », assure Stéphane Gauthier, le directeur général de Best Western France. La plupart des hôtels jouent aussi sur ces deux arguments pour mettre en avant leurs sites de ventes directes. Des sociétés technologiques comme FastBooking les aident à se doter de la technologie nécessaire, mais aussi à mener des actions marketing pour toucher le consommateur final. « Les hôteliers prennent progressivement en main leur distribution en ligne », disait récemment dans nos pages Guillaume de Marcillac, le directeur financier de FastBooking.

Les hôteliers sont, depuis des années, soumis à de fortes obligations qu’ils jugent unilatérales

Donner trop de pouvoir à un seul intermédiaire, c’est se mettre en danger

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