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La fraude sévit sur le Net

À l’heure où le gouvernement renforce les mesures de lutte contre la cybercriminalité, les sites du tourisme s’organisent pour contenir un fléau qui grignote leurs marges. Plus que jamais, la vigilance est de mise.

Nous avons été fortement attaqués par des fraudeurs l’an passé, indique Sylvie Brumelot, directeur financier de Go Voyages. Nous avons perdu 2 ME en 2008, sur 460 ME de commandes par cartes bancaires. Nous avons enregistré un pic de 0,9 % d’achats frauduleux en août. » C’est la goutte qui a fait déborder le vase de l’acceptable. Aux grands maux, les grands remèdes : en septembre, Go a nommé un analyste fraudes, Bach Truong, et signé un contrat avec Fia-Net. « Ce tiers de confiance ne nous assure pas. Mais, sur la base de règles établies ensemble, il nous envoie l’équivalent de feux verts, orange et rouges par rapport à chaque dossier. » Le problème, c’est que les fraudeurs sur Internet passent souvent à travers les mailles des filets de la police. L’État français le reconnaît. Le ministère de l’Intérieur vient d’annoncer un train de mesures destinées à endiguer les cyber-actes, qui vont des achats frauduleux à la pédophilie en ligne. Parmi les dispositifs annoncés figurent l’augmentation significative des cyber-enquêteurs dans la police (de 200 fin 2008 à 300 fin 2009), la création dans la police judiciaire d’un groupe escroquerie sur Internet, le renforcement des sanctions à l’encontre des usurpateurs d’identité sur la Toile. La fraude à la carte bancaire touche tous les sites de voyages, qui tentent d’endiguer le problème. « Par le passé, elle a représenté jusqu’à 0,7 % de l’ensemble de nos transactions, indique Patrick Hoffstetter, DG France de Lastminute.com. Nous l’avons fait baisser, avec pour objectif final d’atteindre le niveau de notre site anglais, soit 0,3 %. » Pour ce faire, la marque fuchsia procède à davantage de vérifications de cartes, et effectue une veille par produits et par destinations. De son côté, Expedia a créé une cellule antifraude à Seattle, qui peut bloquer des cartes, suite à des remontées de l’une de ses filiales. Depuis Paris, l’agence américaine multiplie la collecte d’informations, et interroge régulièrement la Banque de France pour connaître les cartes volées. « Chez nous, le phénomène représente moins de 1 % des tarifs aériens négociés et des produits hors vols secs », estime Guillaume Cussac, président d’Expedia France. C’est peu et beaucoup à la fois, reconnaît-il : « La fraude grignote directement notre résultat opérationnel. » De fait, 3 000 E de billets d’avion achetés avec une carte volée, c’est 3 000 E jetés par les fenêtres du site. La faute au code monétaire et financier, qui protège le consommateur (cf. articles L 132-2 et suivants). En cas d’usurpation d’une carte bancaire, le marchand boit la tasse, pas le consommateur. « Un paiement à distance ne permettant pas d’authentifier le porteur, il n’est ni irrévocable ni garanti », rappelle Emmanuelle Llop, avocate spécialisée dans le tourisme. « L’e-commerçant subit, de facto, la perte financière en cas d’opposition dans les 70 jours. Le banquier du client se fait alors rembourser par celui de l’agence. » Ensuite, reste au distributeur le soin de se défendre. Emmanuelle Llop a un cas concret sur son bureau. Le client d’une agence a effectué une répudiation abusive, après un séjour hôtelier qu’il dit ne pas avoir consommé. « Nous allons envoyer par lettre recommandée une mise en demeure. » Et si le voyageur persistait à réfuter ses torts ? L’agence s’assoira sans doute sur ce litige de 2 000 E. Les agences abandonnent souvent, vu les montants en question. Du coup, leur trésorerie peut souffrir quand une poignée de litiges s’enchaînent.

LES BILLETS D’AVION EN PREMIÈRE LIGNE

Selon Fia-Net, le tourisme se situe dans le trio de tête des achats frauduleux, avec l’informatique et le matériel électronique. Mais le fléau aurait plutôt tendance à baisser dans le secteur. Parmi ses clients, il touche à 90 % les vols secs. Logique, surtout à l’heure où les passagers, munis d’un billet électronique, prennent parfois l’avion sans présenter la moindre pièce d’identité. Une tendance que confirment les marchands comme Lastminute France. « Les fraudes concernent davantage les billets d’avion que les forfaits, et plus particulièrement des destinations d’Afrique noire », relève Patrick Hoffstetter. Fabrice Dariot, PDG de BDV.fr, est du même avis : « Certaines destinations de vols secs concentrent plus de risques, comme l’Afrique noire francophone. » L’agence a renoncé à toute forme d’assurance, qui représente un coût et oblige éventuellement à refuser des dossiers suspects. « Nous croisons des critères, à la manière d’un assureur. Nous sommes plus vigilants quand il s’agit de VDM et de destinations ethniques. Le cas échéant, nous demandons des renseignements supplémentaires. » Chez Go Voyages, le portrait-robot du cybercriminel et ses préférences sont à géométrie variable : « À une époque, Bamako, Dakar et Bangkok étaient prisés, note Sylvie Brumelot. Les tendances évoluent. Nous avons eu une fronde sur des hôtels de Dubaï. Les personnes arrivaient avec leurs vouchers. Comme les porteurs attendent en moyenne deux mois avant de faire opposition, les fraudeurs ont le temps de profiter de leurs voyages, sans être inquiétés. » La fraude touche aussi les billets de train, achetés notamment sur Voyages-sncf.com. La SNCF a mis en place des garde-fous afin de limiter la casse, comme un nombre restreint de billets par commande, avec un plafond de 800 E. Pour tout site marchand, il reste difficile de se protéger. Les filières sont parfois très bien organisées. Les fraudeurs ont plusieurs identités, numéros de téléphone, adresses e-mail… Par conséquent, les croisements sont difficiles à opérer. Fia-Net et Ogone font partie des sociétés qui aident les sites à améliorer la sécurisation des paiements. Tout professionnel du voyage doit, en toute modestie, collecter le plus grand nombre d’informations, et veiller à leur cohérence. D’aucuns misent aussi sur le protocole 3D Secure, qui permet l’authentification du porteur après saisie de ses coordonnées bancaires (grâce à la date de naissance, par exemple). « Son déploiement a commencé en France, souligne Patrick Flamant, directeur France d’Ogone. Mais 3D Secure n’est pas la panacée. Sinon, ce serait comme de laisser les fenêtres ouvertes après avoir installé une bonne serrure de porte. » Il ne faut pas baisser sa vigilance. La cybercriminalité a de beaux jours devant elle, dans l’économie parallèle. Les cartes bancaires volées sont revendues sous le manteau 2 E à 5 E, rappelle Patrick Flamant.

Selon Fia-Net, le tourisme se situe dans le trio de tête des achats frauduleux, avec l’informatique et le matériel électronique

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