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Tribune : entreprise nouvelle et agence de voyages, la double peine

Thierry Prangère a cofondé une agence de voyages digitale en pleine crise. Dans une tribune que nous publions, l’entrepreneur explique pourquoi les jeunes entrepreneurs sont souvent exclues des dispositifs d’aide.

« Beaucoup d’entreprises en France, ont subi des pertes importantes. Beaucoup ont pu trouver, grâce à l’Etat, aux Régions et aux chambres consulaires, des sources de financement, d’aides et de reports leur permettant de survivre et dans beaucoup de cas de repartir.

Là où l’image idyllique s’estompe, c’est pour les entreprises qui ont eu la mauvaise idée de démarrer il y a moins d’un an, voir qui on eu l’audace de débuter leurs activités juste avant les périodes d’urgence sanitaire. En effet, quand la crise les frappe, contrairement aux autres sociétés ayant déjà au moins publié un bilan, clôturé un exercice, voire en capacité de démontrer un comparatif de chiffre d’affaires entre l’année N et N-1, les aides seront réduites à presque rien.

Thierry Prengere a longtemps travaillé dans la finance, d’abord pour Barclays Banque, puis il a fondé son cabinet de gestion privé pendant 20 ans

Exemple de 2 entreprises du tourisme (Réunion) face aux aides : société A, 3 ans d’existence, C/A de 2019 1M€, 1salarié. Charges : 150 k€, coût d’achat 700 K€. Société B, 10 mois d’existence, C/A 2019 nul, C/A sur le début d’année 2020, 3 000 €, 1 salarié, Charges 70K€, investissement 50k€.

La société A pourra bénéficier d’un PGE de 250K€, du FSN (fonds national de solidarité) volets 1 & 2 de 1 500 € + 2 500€/mois (mars à septembre), plus le FSRT de 3500 €, plus le Fonds de Rebond Régional de 30000 €, plus le chèque numérique de 3 200 €. Avec le nouveau FSN, si son chiffre d’affaires ne dépasse pas de 499 k€ en 2020, elle pourra obtenir 10 k€ supplémentaires. La société B pourra prétendre à un Prêt garanti par l’Etat (PGE) de 20K€ et éventuellement au FSN volet 1 de 1 500€…et encore.

L’écart des aides et prêts, vont de 1 à 12 entre ces deux sociétés, alors que leurs charges vont de 1 à 2. Tout le cynisme lié à la comparaison de chiffre d’affaires, prend une tournure encore plus désagréable, quand pour toucher le nouveau FSN, l’entreprise doit montrer qu’elle est : soit fermée administrativement ou que son chiffre d’affaires a baissé de plus 50% (depuis le début de son activité). Or si cette société B fait au mois de novembre un chiffre d’affaire de 1 600€, elle perd tout bénéfice à cette aide.

Députés, conseillers généraux, régionaux, membres des chambres consulaires, se sont précipités pour apporter l’aide aux entreprises, DÉJÀ existantes et ont entièrement délaissé les entreprises très récentes, qui sont presque totalement exclues des plans de soutien ou de relance. Ils ont utilisé comme référence pour l’attribution aux aides le chiffre d’affaires. C’est oublier qu’une entreprise, c’est avant tout des charges. L’Etat a bien intégré cet élément essentiel, sur le volet social. Mais les régions, Bpifrance, les fonds FEDER, les aides des Chambres de Commerce, et en partie l’État ont entièrement oubliés les entreprises qui n’ont pas eu le temps de faire du chiffre d’affaires, mais qui ont pourtant des charges importantes et qui représentent des emplois.

Les entreprises du tourisme (surtout les agences de voyages) mais aussi les prestataires de loisirs et sociétés d’événementiel, les discothèques, etc. cumulent comme frein supplémentaire l’absence de chiffre d’affaires, même sans le confinement. La visibilité est nulle. Celles qui sont à la Réunion, sont dans une situation ubuesque, car l’île n’est pas en confinement, pour l’heure, ni même en couvre-feu. Pour autant, avec l’obligation de motifs impérieux pour aller et partir de la Réunion, les agences de voyages de l’île ne peuvent pas bénéficier de la fermeture administrative, qui leur donnerait un accès automatique au FNS. (…)

Les héros de l’économie en 2020, sont les créateurs d’entreprises, qui cumulent la difficulté de la situation sanitaire, le manque de soutien et une situation déloyale vis-à-vis de leurs concurrents, déjà en place, qui captent l’essentiel des aides financières. »

Thierry Prangère, le président de LAhLANhLA Voyages Privés fondateur de l’agence

1 commentaire
  1. Anonyme dit

    Très bonne et pertinente intervention ou encore une fois nos politiques sont déconnectés du terrain et des réalités économiques.
    Bravo et félicitations

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