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Roland Héguy : « Nous croyons au rural pour mieux irriguer le tourisme »

Hôtelier et restaurateur pendant 40 ans, le président de l’Umih Roland Héguy a signé le livre « Changeons le tourisme ». L’Echo l’a rencontré à cette occasion.

Voilà dix ans qu’il est à le tête de l’Umih. Dix années pour le moins mouvementées, dont il a observé les évolutions depuis un “strapontin privilégié”, comme il se plaît à l’appeler. Dix années où le secteur a dû apprendre à composer avec les OTA et Airbnb, subi l’onde de choc des attentats, commencé à se questionner sur le surtourisme et le développement durable… Une décennie de mutations, donc, que Roland Héguy a voulu consigner dans un livre récemment paru aux Editions du Cherche Midi, préfacé par Laurent Fabius. Une boussole, pour décrire les principaux enjeux du secteur. Mais aussi pour rappeler aux professionnels du CHRD (Cafés, Hôtels, Restaurants, Discothèques) qu’ils sont des acteurs à part entière du tourisme. “Les professionnels du CHRD sont très militants dans leur métier, mais je leur rappelle souvent qu’ils représentent 60 à 65% du chiffre d’affaires du tourisme. On doit être beaucoup plus impliqués et beaucoup plus présents dans les actions de politiques du tourisme”, affirme Roland Héguy. D’ailleurs, il s’y est employé ces dernières années. Il préside la Confédération des Acteurs du Tourisme (CAT), qui réunit depuis 2017 l’ensemble de la profession, tours-opérateurs, agences de voyages, professionnels de l’événementiel… “On a appris à se connaître, et on s’est aperçu qu’effectivement, nos dossiers prioritaires étaient souvent les mêmes, explique Roland Héguy. Portés par cette confédération, ils ont une résonance beaucoup plus forte. Avec les autres acteurs du tourisme, nous avons appris à nous parler et ça fonctionne très bien, au final on a appris à s’aimer !” “En trois ans, on a fait beaucoup de choses pour avoir l’oreille du Premier ministre, poursuit-il. Nous nous sommes dit travaillons, travaillons, à un moment, ils vont nous ouvrir les portes, ils vont être obligés de nous entendre.”

« La ruralité va devenir un vrai sujet de société »

Puis il y a eu le premier comité interministériel du tourisme, et plus récemment encore, l’installation du Comité de filière tourisme, qui réunit des figures bien connues du secteur. “Les choses avancent, avec l’objectif d’aboutir à un contrat de filière à la fin de l’année sur quatre thématiques : l’emploi et la formation, le développement durable, le numérique, la réglementation, énumère Roland Héguy. J’aimerais qu’il y en ait une cinquième, dédiée à l’attractivité des territoires.” Un sujet, longuement détaillé dans le livre, lui tient à cœur : la ruralité. “Quand on voit que 80% des touristes sont sur 20% des territoires, à un moment donné ça ne fonctionne plus”, s’alarme Roland Héguy. “Nous croyons au rural pour mieux irriguer la France, pour gagner des parts de marché, pour développer l’emploi… Nous amenons des propositions en ce sens. (…) La ruralité va devenir un vrai sujet de société qu’on ne pourra pas éviter, il faudra le repenser entièrement.” Ce n’est sans doute pas un hasard si Airbnb fait aussi de la campagne un de ses sujets d’intérêt. Quand il s’agit d’évoquer la firme californienne, Roland Héguy veut mettre – une nouvelle fois – les choses au clair. “Nous ne sommes opposés à rien du tout. Nous ne sommes pas contre la modernité, pas contre le digital, nous-mêmes sommes, dans nos métiers, de gros consommateurs d’outils numériques. Mais depuis le début, nous demandons simplement une chose qui est déterminante : respecter la loi, respecter le monde de l’entreprise, autrement le modèle économique va s’écrouler. On ne peut pas imaginer que jusqu’à maintenant, 60 à 70% du chiffre d’affaires généré par une plate-forme passe à travers toutes les failles de la fiscalité. Dans Paris c’est devenu un sujet sociétal”, martèle-t-il.

« Notre rôle ce n’est plus de la défense, c’est de la proposition »

On l’aura compris, au cours des dix dernières années, les sujets n’auront donc pas manqué. De tous ces combats, lequel lui apporte le plus satisfaction ? “C’est l’oreille beaucoup plus attentive du politique”, répond Roland Héguy. Ça passe par un gros travail. (…) Notre rôle, notre responsabilité d’organisation patronale, ce n’est plus de la défense, c’est de la proposition. C’est d’accompagner les entreprises, de la plus faible à la plus forte, en leur disant attention, autrement vous allez disparaître. Ma plus grande satisfaction, c’est aussi d’avoir fait reconnaître le tourisme et nos métiers – hôtels, cafés et restaurants – comme une économie qui est vitale. C’est ce que je dis toujours : quand les hôtels et les cafés ont fermé, il ne reste plus que la rumeur. Et après la rumeur, il y a le rond-point. Et là le politique ne maîtrise plus rien.”

Un autre dossier d’envergure s’annonce : la loi sur le regroupement des branches professionnelles, en 2021. “Ça, ça va décoiffer, prévient Roland Héguy. Soit on commence à travailler ensemble pour faire des propositions pour encore se rapprocher et arriver avec des propositions construites, soit on va tout nous imposer. C’est ça l’enjeu.”

 Roland Héguy, Changeons notre tourisme, éditions du Cherche Midi, 144 pages, 18 euros.

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