Raréfaction de l’eau : la filière touristique s’engage dans un plan de sobriété
Nathalie Delattre a réuni différentes fédérations à Bercy pour acter un plan global de sobriété. Objectif : 10% d’économie d’eau à l’horizon 2030.
Stations de ski, golfs, campings, parcs de loisirs… L’eau représente un enjeu stratégique pour l’industrie touristique. Mais cette ressource entre parfois en conflit d’usage avec d’autres industries et les besoins des populations.
La sécheresse de 2022 a accéléré la réflexion sur le sujet, dans tous les domaines. « A l’été 2022, la France a connu une grave sécheresse, a insisté Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée du Tourisme, lors d’une conférence à Bercy jeudi 24 avril. Souvenons-nous des images dramatiques du lac de Serre-Ponçon, du lit de la Loire asséché ou des cultures agricoles brûlées… Fin août, 95 départements étaient soumis à des mesures de restriction d’eau et d’irrigation. Plus d’une centaine de communes se retrouvaient sans eau potable, le robinet à sec. Ces communes étaient approvisionnées par camion-citerne. » Les gorges du Verdon étaient alors assoiffées, et les loueurs de kayaks en difficulté.
Face au dérèglement climatique et au stress hydrique croissant, le secteur du tourisme se mobilise, a ajouté Nathalie Delattre. Rappelant que « l’eau douce est une ressource rare et précieuse puisque les quantités accessibles ne représentent qu’1% de toute l’eau sur terre ».

10% d’économies d’eau en vue
Dix fédérations professionnelles (HCR, sports, activités de plein air)* ont signé, aujourd’hui à Bercy, trois plans d’actions sectoriels de sobriété hydrique qui « concrétisent et pérennisent » des actions mises en place ces dernières années.
Ces plans interviennent deux ans après le plan Eau lancé par Emmanuel Macron, avec un objectif de 10% d’économie d’eau en 2030. La Direction générale des entreprises (DGE) et la Confédération des acteurs du tourisme (CAT) les ont coordonnés.
Un vacancier plus consommateur
Un Français consomme en moyenne 149 litres d’eau potable par jour. Mais quand il est en vacances, son empreinte eau grimpe à 230 litres, selon Nathalie Delattre. « Et cela peut monter jusqu’à 400 ou 500 litres selon le type d’hébergement », complète-t-elle.
« Cette surconsommation accroît évidemment le risque de stress hydrique, surtout en période estivale dans des territoires où la ressource peut être déjà rare et convoitée par d’autres utilisateurs légitimes comme les agriculteurs. »
Prouver sa sobriété
« Pour certains territoires en France, il est devenu impératif de non seulement estimer notre consommation en eau, mais aussi de nous engager à la réduire », souligne Nicolas Dayot, président de la Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air.
Reste à savoir quels seront les indicateurs de suivi, pour bien mesurer les efforts de sobriété. Les organismes et leurs adhérents s’appuieront-ils sur des données déclaratives ou – mieux – le calcul contrôlable à la source, à partir des compteurs d’eau ?
La filière française du tourisme promet de se structurer, et de partager de bonnes pratiques pour tous les opérateurs. La sobriété passera par la mise en place d’indicateurs de référence, et d’actions concrètes : compteurs connectés, détection de fuites d’eau, récupération des eaux grises…
Manque de données
Il est aussi nécessaire de lever les freins administratifs. Quand la quête d’économies d’eau s’avère trop complexe, les professionnels du tourisme peuvent baisser les bras, estime Nicolas Dayot. « Nous proposons une réunion nationale avec les six agences de l’eau, afin d’établir un canevas national », propose-t-il.
Première destination mondiale avec 100 millions de touristes étrangers en 2024, la France manque de données en matière d’empreinte hydrique.
D’après le World Travel & Tourism Council, l’empreinte hydrique du secteur des voyages et du tourisme représente 0,9% de la consommation mondiale d’eau (base 2019).
25 lauréats de l’AMI porté par Atout France
Le ministère a récompensé 25 acteurs suite à l’appel à manifestation d’intérêt « Gestion des ressources en eau dans le tourisme », piloté par Atout France. Ces opérateurs pourront bénéficier d’une subvention allant jusqu’à 50 000 euros. Parmi eux figurent Best Western, le Domaine de Marlioz, Elijo Spring, FNHPA Charente Maritime, Homair, le Futuroscope, Teragir.