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Libéralisation du ciel : comment l’Europe se tire une balle dans le pied

La Commission européenne laisse le champ libre aux concurrents des compagnies aériennes européennes alors que la Chine, les Etats-Unis et d’autres Etats protègent leurs marchés.

L’Europe semble être la seule entité politique à s’imposer d’elle-même des règles qui nuisent à son économie, au nom de la libéralisation. Une politique restrictive qui touche le secteur aérien de plein fouet.

Faillites et pertes

La libéralisation, enclenchée aux États-Unis en 1978, a permis aux compagnies européennes de devenir des leaders dans leur secteur. Mais elle se retourne aujourd’hui contre elles. Outre les faillites récentes de Spanair et de Malev, nombre d’anciennes compagnies nationales (Tap, Lot, SAS) sont dans le rouge. Quant aux leaders comme Air France-KLM ou Lufthansa, ils sont empêtrés dans des plans perpétuels de réduction des coûts.

Le problème est simple. Les coûts des compagnies européennes augmentent sous le poids des taxes, des charges, des redevances et de la réglementation et leur compétitivité se dégrade. Mais les pays européens, à la différence du reste du monde, n’ont pas de marge de manœuvre pour soutenir leurs entreprises.

"Les compagnies du Golfe sont issues de stratégies d’Etat"

Ce constat a été dressé par la plupart des acteurs. "Les compagnies du Golfe sont issues de stratégies d’Etat (…) Elles ont des conditions sociales moins coûteuses et un soutien très important de leurs Etats", déclarait récemment Alexandre de Juniac, le PDG d’Air France-KLM. "En Europe, les compagnies aériennes financent les infrastructures. Ce n'est pas le cas partout, comme dans les pays du Golfe. Si nous n'avions pas à financer nos hubs, nous économiserions des centaines de millions d'euros" par an, ajoutait le PDG.

Plusieurs compagnies aériennes étrangères reçoivent également le soutien de leur gouvernement pour accéder aux financements de nouveaux appareils.

Etihad multiplie les prises de participation

Au nom du libre-échange, l’Europe permet également aux investisseurs étrangers de prendre le contrôle de 49% d’une compagnie européenne. Des compagnies comme Etihad peuvent donc multiplier les prises de participation (Alitalia, Air Berlin, Darwin Airline..). Résultat, Lufthansa a dû cesser ses vols vers Abu Dhabi. "Des surcapacités énormes sont apparues ces dernières années sur les liaisons entre l'Allemagne et les Émirats", souligne le groupe allemand, qui dénonce une "concurrence déloyale".

A l’inverse, les Etats-Unis empêchent toute prise de contrôle de plus de 25%. Et d’autres Etats, comme le Chine, refusent tout simplement toute arrivée de capitaux non approuvée par le parti.

L'Europe créé les conditions d'une concurrence déloyale entre ses Etats membres

Autre exemple : les règles sociales et fiscales. Norwegian Air International (NAI), grâce à son immatriculation en Irlande, peut se soustraire au droit social norvégien, limiter ses charges liées à l’impôt et embaucher du personnel thaïlandais via une filiale à Singapour tout en obtenant des droits de trafic.

Les différents montages fiscaux des compagnies low cost ou le recours à des pilotes auto-entrepreneurs pour éviter les charges liées à un véritable contrat de travail témoignent également d’une incohérence des règles imposées par la Commission européenne. Car l’Europe créé également les conditions d'une concurrence déloyale entre ses Etats membres.

Que fera la nouvelle Commission européenne ?

La nouvelle Commission européenne, nommée cette semaine, est censée s’attaquer à ces problèmes. "Nous avons demandé d’intervenir auprès des Etats du Golfe pour négocier des conditions de concurrence équitable. Apparemment, la Commission européenne a commencé à travailler sur ce sujet", a déclaré Alexandre de Juniac, il y a un mois.

Mais il faudrait aller plus loin et suivre les recommandations du rapport publié par le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, "Les compagnies aériennes européennes sont-elles mortelles".

Pour éviter la chute des acteurs européens, il conseillait d'"éviter l’alourdissement des charges et taxes qui désavantageraient les différentes compagnies européennes" et d’assurer l’équité de la concurrence, à la fois à l’intérieur de l’Europe, mais également face aux compagnies extra-communautaires.

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