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Le cri d’alarme et de rage d’un patron du tourisme, face au lobby des compagnies aériennes

C’est une lettre courageuse et inquiétante qu’a rédigée le président de l’agence de voyages en ligne MisterFly, prenant la défense de toute une profession.

Membre de la French Tech 120, MisterFly est un l’une des pépites françaises du voyage. L’entreprise a passé la barre des 500 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019, contre 350 millions d’euros en 2018. Ses ventes sont réalisées via son site de vente directe, de nombreuses agences de voyages, et des sites partenaires (en B2B2C). Mais la dynamique s’est totalement enrayée avec la crise liée à la pandémie, pour MisterFly comme pour ses partenaires. C’est ce qu’explique son président et cofondateur Nicolas Brumelot, dans une lettre ouverte à Alexandre de Juniac (traduite en anglais), directeur général de l’Association internationale du transport aérien (Iata), intitulée « Cris de désespoir d’un pan entier d’une industrie que vous menez à l’échafaud ». Une missive qui dénonce les agissements de l’association, regroupant 290 compagnies aériennes dans le monde. « C’est un cri d’alarme, du cœur, de rage, que je vous transmets au nom de toute cette industrie du tourisme, explique Nicolas Brumelot. Je le fais avec l’espoir que vous nous entendrez ».

Un « stratagème »

À la suite de la pandémie de Covid-19, la communauté des agents de voyages a interrogé Iata, sur les aménagements des conditions de règlement et de remboursement des billets d’avion annulés, au profit ultime des consommateurs. La réponse de Iata, diffusée le 17 mars 2020 aux agences, est plus que décevante, souligne le président de la société. L’association a écrit que « les remboursements seraient retardés si les délais de règlement devaient être prolongés », précise-t-il. « Vous n’êtes pas sans savoir que face au tsunami de demandes de remboursements, nous n’avons pas le temps matériel de traiter en temps réel ces remboursements via des procédures et des systèmes, qui requièrent une intervention pour chaque opération et nécessitent un travail technique d’une ampleur exceptionnelle. Qui plus est, nous effectuons ce travail pour nos clients, sans rémunération », alors que de nombreux salariés sont confinés, et pour la plupart en chômage technique.

Pour Nicolas Brumelot, il s’agit d’un « stratagème qui consiste à exiger le paiement selon le calendrier habituel, pour ensuite tout faire pour ne pas rembourser ».

« 90% des avions composant la flotte de vos membres, seront à peu de chose près, cloués au sol d’ici cette fin de semaine », ajoute la lettre. « Toutefois, chez Iata, ‘c’est business as usual’, ‘circulez il n’y a rien à voir’, malgré les mobilisations et les demandes d’efforts de tous par les gouvernements. (…) Nous autres professionnels du tourisme, agences de voyages, tour-opérateurs, agences réceptives, agences évènementielles, organisateurs de voyages scolaires etc…, ne sommes que de simples et modestes agents ‘agréés’. (…) Vous disposez ainsi sur nous agents, d’un droit de vie ou de mort. (…) Je vous prédis seulement ceci, Monsieur de Juniac : vous aurez des centaines d’entreprises, des dizaines de milliers d’emplois sur la conscience. »

Changer les règles

Nicolas Brumelot dénonce une autre procédure : « Alors que la Commission Européenne a rappelé aux compagnies aériennes qu’elles devaient rembourser les billets annulés en numéraire, vos membres les compagnies aériennes, lorsqu’elles acceptent le remboursement, émettent des avoirs non remboursables. Comme nous avons pour obligation de payer les billets au moment de leur émission, vous captez la trésorerie que vous conservez ensuite par tous les subterfuges possibles. »

Au-delà du problème de l’avoir, c’est aussi et surtout l’absence de fonds de garantie des compagnies aériennes -exposées plus que jamais au risque de faillite- qui choque la profession toute entière, ajoute-t-il. Un point de vue qu’il avait déjà partagé sur Facebook  à la suite de la défaillance d’Aigle Azur et de XL Airways. A titre de comparaison, les clients des agents de voyages bénéficient d’une garantie totale et illimitée des fonds déposés pour les forfaits qu’ils achètent. Garantie qui s’applique en cas de défaillance de l’agence.

En conséquence, Nicolas Brumelot exhorte Alexandre de Juniac à adapter les règles de Iata, et à apporter dans l’immédiat une attention particulière au calendrier des envois de fonds (notamment pour l’échéance du 31 mars), pour toutes les agences de voyages. Affaire à suivre…

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