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L’hiver perdu de la Guadeloupe

La crise guadeloupéenne s’éternise et s’aggrave. Alors que les touristes ont déserté la destination, en pleine haute saison, tour-opérateurs, compagnies aériennes et distributeurs tentent de se serrer les coudes.

Situation inextricable en Guadeloupe. Après quatre semaines de crise, les événements semblaient prendre, en début de semaine, une tournure plus radicale : barrages routiers, échauffourées, dégradations de magasins… Mardi matin, le manque de personnel à l’aéroport de Pointe-à-Pitre a conduit à la suspension des vols durant plusieurs heures. Resté ouvert, le terminal était toutefois difficile d’accès en raison de nombreuses routes bloquées. En attendant une prochaine sortie de crise, les voyagistes tentent de limiter les dégâts. Mardi, rendez-vous avait été fixé avec les compagnies aériennes au ministère de l’Économie, à l’invitation des ministres du Tourisme, Hervé Novelli, et des Transports, Dominique Bussereau. Autour de la table, les trois transporteurs desservant la Guadeloupe (Air France, Corsairfly et Air Caraïbes) et les principaux TO opérant sur la destination, dont Nouvelles frontières, Thomas Cook, Club Med, Tourinter et Exotismes. Pour les voyagistes, l’objectif était d’obtenir des compagnies aériennes l’assouplissement des conditions de report de voyages pour les clients qui avaient réservé des départs vers la Guadeloupe. « Pour l’instant, les compagnies n’acceptent que des délais de report sans frais de quelques semaines, se plaignait la semaine dernière Michel Rigaud, directeur général adjoint de Tourinter. Mais dans les conditions actuelles, personne n’a envie de repousser son voyage en avril ou mai, et puis les gens n’ont pas forcément prévu de prendre des vacances à ce moment-là. » Message entendu ? Mardi après-midi, Air France annonçait dans un communiqué que les passagers ayant prévu de se rendre à Pointe-à-Pitre d’ici le 15 mars pourraient reporter sans frais leur voyage jusqu’au 15 mars 2010, ou vers une autre destination jusqu’au 14 juin 2009. Chez Air Caraïbes, en revanche, on maintient pour l’instant à mi-juin le délai. « Si on permet un report sur 12 mois, les Antilles ne redémarreront pas avant l’hiver prochain », justifie Marc Rochet, l’administrateur de la compagnie, qui reconnaît toutefois que des discussions sont en cours individuellement avec chaque tour-opérateur. Dans la profession, la solidarité semble donc s’organiser. Lundi déjà, le Snav avait annoncé avoir obtenu des transporteurs aériens, par l’intermédiaire de Iata, qu’ils repoussent l’échéance mensuelle de règlement des billets d’avion pour les agences de voyages guadeloupéennes. Le prélèvement prévu le 17 février a ainsi été reporté au 4 mars. En contrepartie, René-Marc Chikli demande aussi des efforts de la part des distributeurs : « Ils doivent accepter que les annulations et remboursement sans frais ne sont pas la règle d’or et encourager les reports. »

TAUX DE REMPLISSAGE EN CHUTE LIBRE

En plein coeur de la saison touristique, tous les acteurs du tourisme savent que l’hiver est désormais définitivement gâché. Alors que plus de 60 % de l’activité annuelle en Guadeloupe est concentrée entre décembre et mars et que les vacances scolaires de février constituent traditionnellement l’un des sommets de l’année en termes de fréquentation, l’île est aujourd’hui désertée. Nicolas Vion, le président du groupement hôtelier guadeloupéen, évoquait ainsi le week-end dernier un taux de remplissage « de 20 à 30 % au lieu de 90 à 100 % ». Dans les agences, cela fait longtemps que plus personne ne demande à partir ou à maintenir son séjour. Les taux de remplissage des avions lentement s’érodent, y compris chez Air Caraïbes, dont une grande partie de l’activité est pourtant liée au trafic communautaire. « Ces quinze derniers jours, sur l’ensemble de nos destinations, les réservations ont été divisées par deux », confiait mardi Marc Rochet. Côté hébergement, depuis deux semaines, trois des plus grands établissements hôteliers (le village du Club Med et la résidence Pierre et Vacances, à Sainte-Anne, et le Paladien Le Manganao, à Saint-François) sont fermés. Et les TO s’interrogent pour les mois à venir. Alors que certains clients commencent à annuler leur voyage du début de printemps, chez Tourinter on hésite à émettre les billets d’avion pour des départs en avril. « En cas de poursuite de la crise, on risque de ne pas pouvoir se les faire rembourser, explique Michel Rigaud. À l’inverse, si on ne les émet pas, on perd les réservations. » L’autre urgence des voyagistes, ces derniers jours, a été de réorienter leurs clients qui souhaitaient maintenir leurs départs en vacances vers d’autres destinations. S’appuyant sur les synergies de groupe, et après avoir fermé son Paladien, Nouvelles Frontières a décidé d’affréter, le week-end dernier, un vol sur Corsairfly – la compagnie maison -, vers la République dominicaine pour réacheminer sans surcoût ses clients. Un dispositif renouvelé ce dimanche 22 février.

VERS LA FIN DU TOURISME ANTILLAIS ?

La crise peut-elle conduire, à plus long terme, à un abandon de la destination par certains groupes de tourisme ? Comme lors de chaque épisode de ce type dans les Antilles françaises, certains opérateurs laissent à nouveau planer la menace d’un départ définitif. Mais personne ne semble croire sérieusement à cette éventualité. En 2002, déjà, l’annonce tonitruante du PDG du groupe Accor, qui se disait décidé à quitter Guadeloupe et Martinique, n’avait pas eu de suite.

Malgré des soubresauts sociaux récurrents et la concurrence d’autres destinations de la Caraïbe, les Antilles françaises n’ont jusqu’à présent été ni durablement contournées, ni abandonnées. Car, bon gré mal gré, la grande majorité des acteurs du tourisme y font des affaires, ne serait-ce que grâce à l’important trafic affinitaire. Cette fois, pourtant, la mauvaise conjoncture internationale pourrait bien décupler les effets de la crise locale. Et compliquer sérieusement la relance.

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