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Hébergements insolites : saisi par Huttopia, le Conseil d’Etat suspend l’application de la nouvelle réglementation environnementale

Les campings, yourtes, pods, cabanes et autres lodges étaient visés par de nouvelles obligations dont le coût aurait pu mettre cette offre d’hébergements très prisés des vacanciers en péril, selon les professionnels.

Depuis plusieurs mois, les professionnels de l’hôtellerie de plein air tentaient d’obtenir gain de cause pour qu’une nouvelle réglementation environnementale, la RE2020, ne s’applique pas aux Habitations Légères de Loisirs (HLL). La réponse tardait visiblement à venir. Au point d’inciter Philippe Bossanne, le patron de Huttopia, à saisir le Conseil d’Etat à ce sujet par le biais de sa holding, Algonquin. Et le verdict est tombé.

Dans un communiqué diffusé le 2 juillet, Philippe Bossanne annonce que l’institution lui a donné raison, en suspendant le décret du 3 septembre et l’arrêté du 22 décembre 2022 concernant les HLL de moins de 35 mètres carrés.

Des surcoûts dissuasifs

Dans les campings, les yourtes, pods, cabanes et autres lodges – pour n’en citer que quelques-uns – étaient en effet visés par de nouvelles obligations qui auraient imposé notamment de mieux isoler ces hébergements insolites.

Ces contraintes auraient fortement pesé sur les coûts de fabrication de ces hébergements d’après les professionnels. « En fonction du constructeur, le coût pourrait augmenter de 30 à 40%, ce qui risque de faire grimper de 20 à 30% le prix du séjour, analysait en décembre dernier Nicolas Dayot, le président de la Fédération Nationale de l’Hôtellerie de Plein Air (FNHPA). Or le rapport qualité-prix, c’est notre argument numéro un. » « Les campings auraient alors acheté des mobiles-home qui eux n’étaient pas soumis à la RE2020 du fait de la présence de roues », pense de son côté Philippe Bossanne, qui chiffre quant à lui le surcoût de fabrication à 50%. Pour les professionnels, les hébergements insolites étaient donc en péril.

« Le Conseil d’Etat a souligné dans son ordonnance qu’ »à l’audience, les représentants du ministre n’ont contesté ni la faible consommation d’énergie de ces habitations légères de loisirs, ni le fait que la durée de leur utilisation, limitée à 20 ans, ne permettait pas de compenser l’émission supplémentaire de gaz à effet de serre résultant des nouvelles normes de construction, souligne le communiqué. Ils n’ont pas, par ailleurs, fourni d’élément permettant de justifier de l’impact positif sur le climat de l’application des exigences de performance énergétique et environnementale à ces habitations légères de loisirs alors que les résidences mobiles de loisirs, dont 20 000 sont vendues chaque année en France contre 2 000 habitations légères de loisirs, demeurent hors du champ de ces nouvelles règles. »

L’Etat a également accordé à Algonquin 3000 euros au titre des frais irrépétibles, « un signe fort envoyé à l’Etat », souligne Philippe Bossanne tout en ajoutant que l’avocate de la société, Corinne Lepage (ancienne ministre de la Transition écologique, ndlr), « manifestement su faire entendre nos arguments. »

Huttopia doublement concerné

« Nous avons essayé de montrer aux services de l’Etat concernés les non-sens écologiques, sociaux et économiques que représentait l’application de cette nouvelle réglementation aux petits HLL, rappelle Philippe Bossanne dans le communiqué. Toute la profession, fabricants et exploitants à travers la FNHPA, s’est rassemblée pour démontrer au ministère du Logement que soumettre les petits HLL à la RE2020 allait à l’encontre du but poursuivi de produire moins de carbone. Nous n’avons jamais pu faire réellement entendre nos arguments, pourtant simples et étayés. »

Une situation qui a conduit le groupe à déposer un recours gracieux auprès de la Première ministre et du ministre de la Transition écologique en janvier dernier. Sans réponse, affirme Philippe Bossanne. « Alors nous avons décidé, avec l’aide du cabinet Huglo-Lepage de déposer un recours contentieux devant le Conseil d’Etat avec un Référé-suspensif. Une première pour notre entreprise », insiste-t-il.

Une offre qui a explosé

Si la société a décidé de monter au créneau, c’est qu’elle est concernée à double titre. La holding familiale de la famille Bossanne contrôle Huttopia, concepteur- exploitant de campings-nature mais aussi Hekipia, fabricant de HLL

« Nous sommes très heureux de cette décision car elle permet à l’industrie des HLL de continuer à innover au service des campings. Elle doit aussi permettre aux habitats insolites, tant prisés des vacanciers en espace naturel, de continuer à se développer, et au mouvement des tiny houses de continuer à nous montrer la voie en termes de sobriété de nos modes de logements », pense Philippe Bossanne.

« L’ordonnance rendue par le Conseil d’Etat démontre l’importance et la complexité du sujet, a réagi ce lundi la fédération des professionnels du secteur, interrogée par L’Echo touristique. La FNHPA travaille depuis des mois avec le gouvernement et l’administration pour trouver un équilibre permettant de sauver les HLL, car la profession aura impérieusement besoin de cet outil pour s’adapter aux effets du changement climatique ou pour développer l’hébergement insolite en France, pointe ainsi Nicolas Dayot. Pour cela, nous avons encore écrit récemment à la Première ministre et au ministre du Logement pour demander l’exonération des petites HLL de moins de 25 mètres carrés. »

Les hébergements insolites sont en plein essor en France et l’offre a explosé ces quatre dernières années. Ils font d’ailleurs partie d’une réflexion avec la Banque des Territoires. Ils pourraient notamment contribuer à « sauver 3000 petits campings français qui pourraient devenir des lieux d’hébergement insolite », rappelait Nicolas Dayot en décembre dernier. En novembre 2021, Jean Castex, alors Premier ministre, avait annoncé l’augmentation du quota de HLL dans le cadre du plan Destination France.

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1 commentaire
  1. Cronier dit

    Assez de décrets, d’obligations, d’interdits et de réglementations. La France étouffe sous le poids des décisions administratives. Messieurs les parlementaires, arrêtez d’entraver les initiatives de développement de citoyens courageux et enthousiastes.

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