Garantie voyage : « Il faut une loi pour faire payer les clients » – Laurent Abitbol
Selon Laurent Abitbol, président de Marietton, les consommateurs doivent mettre la main à la poche pour contribuer à financer les défaillances. Il n’est pas nommément question de taxe, mais d’une contribution du voyageur.
L’Echo touristique : Pourquoi vous êtes-vous présenté comme administrateur de l’APST, pour la toute première fois ?
Laurent Abitbol : Avant la faillite de Thomas Cook, je n’avais pas réellement pris conscience de l’importance de l’APST. Aujourd’hui, je me présente parce que je pense que c’est une association importante pour la profession. Toute taille d’entreprise doit y être représentée.
Pourriez-vous prétendre ensuite au poste de président, pour trois ans, comme certains professionnels l’envisagent ?
Laurent Abitbol : On me l’a demandé. Mais j’ai dit non parce que je n’ai absolument pas le temps. Je suis déjà président du directoire de Selectour et président de Marietton Développement. C’est beaucoup de travail.
Les entreprises du secteur sont invendables.
Selon vous, quelles sont les qualités requises pour la présidence de l’association, et succéder ainsi à Alix Philipon ?
Laurent Abitbol : Il faut que le futur président – ou présidente – ait la valeur de l’argent. Et qu’il soit à l’écoute de toute la profession, de toutes les sensibilités. Petits comme gros opérateurs.
Vous parliez de Thomas Cook, qui a fait trembler l’APST. Malgré le système des contre-garanties. Faut-il le modifier en profondeur ?
Laurent Abitbol : Les contre-garanties, c’est l’essence même du fonctionnement de l’APST. D’ailleurs, pourquoi doit-on garantir les fonds déposés ? C’est l’un des seuls métiers avec un tel système de garantie financière des clients. Si je commande une cuisine et que le cuisiniste fait faillite, je perds le dépôt. Il n’y a pas d’APST de la cuisine !
Le système des contre-garanties, ajouté aux deux ans de caution demandés par Iata, va contribuer à affaiblir la profession. Cela coûte trop cher et dissuade de jeunes entrepreneurs d’entrer dans le secteur. Nous sommes en train de nous mettre une balle dans le pied. Les entreprises du secteur sont d’ailleurs invendables.
Heureusement, l’Etat va prendre 75% de la garantie (soit assumer 75% du risque via la Caisse Centrale de Réassurance, NDLR), c’est une bonne chose.
Un euro par pax pour les voyages à forfait, ce serait bien. (…) Cela doit donc prendre la forme d’une loi pour tous les garants.
Que faut-il changer ? Faire payer le client, comme l’avait suggéré l’APST en 2019 ?
Laurent Abitbol : Déjà, je souhaite dire que l’APST a été bien gérée pendant la crise. Le problème vient de Bruxelles et de ses règles européennes. Donc, oui, il faut que nous fassions payer un euro par client sur tous les forfaits. Pas sur les vols secs, bien sûr, puisque nous n’en sommes pas responsables. Un euro par pax pour les voyages à forfait, ce serait bien. Cette contribution ne va pas changer la face du monde pour le consommateur. Nous pourrions ensuite passer à deux euros. Plus globalement, une fourchette d’un à trois euros est envisageable, en fonction de la situation financière de l’APST.
Il était justement question d’une contribution de 3 euros par pax à l’APST, ce qui n’est jamais passée…
Laurent Abitbol : Avant les élections en France, c’était difficile. Aujourd’hui, c’est différent. Il faut que cette nouvelle règle s’applique à tous, pas seulement à l’APST. Cela doit donc prendre la forme d’une loi pour tous les garants, ce qui permettra de faire baisse les contre-garanties. Il ne faut pas tuer la poule aux œufs d’or. Avec notre lobbying, la profession doit aboutir à un projet de loi.
Faudra-t-il réformer autre chose au niveau de la caisse de garantie ?
Laurent Abitbol : J’aimerais surtout dire que le risque que représente une entreprise n’est pas lié à son chiffre d’affaires. C’est sa trésorerie qui compte, ses bilans. La surveillance des adhérents doit avoir lieu deux à trois fois par an, selon moi.
Marietton Développement étant un grand groupe du tour-operating et de la distribution (avec Havas Voyages), vous vous sentez parfois visé comme un risque fort pour la profession ?
Laurent Abitbol : Oui. Pourtant, la situation financière de Marietton est sans risque. Le groupe est bénéficiaire en 2021. En 2022 aussi.
La réassurance publique n’est toujours pas en application, il manque le Go de Bruxelles. Inquiétant ?
Laurent Abitbol : Je ne suis pas inquiet. Cela va arriver.
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